Gideon Levy, l’anti-guerre israélien qui nage à contre-courant
Grande plume du quotidien de gauche Haaretz, Gideon Levy a été propulsé symbole de l’opposition à l’opération « Bordure protectrice », lancée début juillet dans la Bande de Gaza par l’armée israélienne.
Connu de tous en Israël pour son attachement à la cause palestinienne, son verbe acéré et son visage carré au teint halé, Gideon Levy est devenu le « traître » par excellence après avoir signé à la mi-juillet un texte au vitriol accusant les pilotes israéliens de « perpétrer les gestes les plus cruels » dans la bande de Gaza.
La réaction a été immédiate. Des lecteurs ont annulé leur abonnement, un des ténors de la coalition de droite au pouvoir, Yaris Levin, a menacé de le poursuivre pour « traîtrise », des gens l’insultaient dans la rue. Par prudence, la rédaction du journal Haaretz lui a attribué des gardes du corps.
« Je n’ai jamais fait face à des réactions aussi agressives, jamais », confie-t-il dans son bureau exigu au premier étage de la rédaction du Haaretz, à Tel Aviv, lieu de rencontre discret, privilégié aux cafés où il craint encore de se faire insulter par de simples citoyens ou des soldats.
« Cela fait sept ans que ce gouvernement israélien d’extrême droite incite au racisme à coup de loi antidémocratique, de déshumanisation des Palestiniens dans les médias. Alors en temps de guerre, cela atteint un pic », dit-il.
Bref, « tout le monde se fout éperdument de la souffrance à Gaza. Plus encore, si vous osez exprimer de l’empathie, vous êtes un traître », juge-t-il, amer de sa société, mais reconnaissant à l’égard de certains lecteurs et la direction de son journal, qui l’a soutenu dans cette épreuve, plutôt que de lui retirer sa chronique.
« J’ai eu beaucoup de soutien à l’étranger, en Europe, aux Etats-Unis, au Pakistan, à travers le monde, mais en Israël moins », dit-il.
« La vie continue. Personne ne se soucie du prix payé de l’autre côté… personne ne se soucie de la destruction et des meurtres à Gaza », tance Gideon Levy, nageant à contre-courant dans l’ombre de son bureau.
– AFP