Mobilisation : le Kazakhstan et la Géorgie confrontés à un exode de Russes
Le Kazakhstan confirme 98 000 arrivées depuis l'annonce de la mobilisation ; la Géorgie rapporte 10 000 entrées par jour ; Washington accueille les demandeurs d'asile russes
« Par précaution » face au « chaos total », Fiodor a choisi de quitter la Russie précipitamment pour se rendre au Kazakhstan, comme beaucoup de ses concitoyens, par peur d’être mobilisé pour l’offensive en Ukraine.
Il aura fallu près de deux jours à ce Moscovite pour arriver à la frontière avec le Kazakhstan, puis une attente de plusieurs heures avant d’être autorisé à entrer sur le territoire de ce vaste pays d’Asie centrale.
« Il pleuvait, il faisait froid, mais six heures d’attente, c’est quand même raisonnable vu les circonstances », lance-t-il à l’AFP, joint par téléphone.
Selon Fiodor, il n’est pas inscrit sur la liste des 300 000 réservistes prévus pour renforcer les troupes de Moscou engagées en Ukraine. Mais « on ne mesure pas encore tout ce qui va se passer », dit-il.
Fiodor explique avoir donc quitté Moscou samedi « par mesure de précaution », « pour avoir une longueur d’avance, au cas où… ».
Son récit n’est pas isolé et les autorités du Kazakhstan, ainsi que celles de la Géorgie, une autre ex-république soviétique frontalière de la Russie, ont fait état mardi d’une forte hausse des arrivées de Russes depuis la mobilisation décrétée le 21 septembre par Vladimir Poutine.
Les arrivées de Russes en Géorgie ont presque doublé, à près de 10 000 par jour, après cette annonce, selon le ministère géorgien de l’Intérieur.
« Le nombre a augmenté à quelque 10 000 par jour. Par exemple, ils étaient 11 200 dimanche et moins de 10 000 lundi », contre « 5 000 à 6 000 » juste avant l’annonce de la mobilisation en Russie le 21 septembre, a indiqué le ministère.
A la frontière avec la Géorgie, les autorités de la région russe d’Ossétie du Nord ont admis une « situation tendue » au poste de contrôle de Verkhni Lars.
Le ministère local de l’Intérieur a annoncé l’installation prochaine d’un « commissariat militaire de mobilisation » dans la zone frontalière afin de recruter les réservistes qui tentent de partir.
« Peur »
De son côté, le ministère de l’Intérieur du Kazakhstan, une ex-république soviétique d’Asie centrale voisine de la Russie, a indiqué que 98 000 citoyens Russes étaient arrivés dans le pays depuis le 21 septembre.
Il n’a toutefois pas fourni d’éléments de comparaison avec la semaine précédente.
Le président kazakh, Kassym-Jomart Tokaïev, a lui assuré mardi que son pays, un allié traditionnel de Moscou mais qui a pris ses distances depuis l’offensive en Ukraine, protégerait les Russes qui fuient vers le Kazakhstan pour échapper à la mobilisation.
« Nous devons nous occuper d’eux, assurer leur sécurité », a-t-il ajouté.
Vladislav, un barman de 25 ans qui résidait à Moscou, a trouvé refuge à Astana, la capitale, depuis lundi soir.
La « peur » l’a poussé à faire ses bagages précipitamment et partir dans l’urgence : « Il y a une semaine, je ne pouvais pas imaginer que je serais au Kazakhstan. Mais imaginez, je pourrais aller travailler ou faire les courses et ne jamais revenir à la maison… », affirme-t-il à l’AFP. « Je ne voulais pas mourir ».
Le président Kassym-Jomart Tokaïev, de son côté, a aussi une nouvelle fois condamné le conflit en Ukraine, et appelé au respect de l’intégrité territoriale au moment où la Russie organise des « référendums » dénoncés comme des « simulacres » par Kiev dans quatre régions ukrainiennes pour formaliser leur annexion.
« L’intégrité territoriale d’un Etat doit être inaliénable, c’est un principe clé », a-t-il rappelé.
Allié à la Russie et notamment membre d’une union économique et douanière, le Kazakhstan cultive cependant aussi de bonnes relations avec l’Occident et la Chine.
L’offensive de Moscou contre l’Ukraine a réveillé chez certains Kazakhs la crainte de devenir également la cible des ambitions russes, notamment du fait de sa longue frontière avec la Russie et de sa large minorité ethnique russe.