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Explication

Netanyahu n’a pas désigné de ministre suppléant : Que cela signifie-t-il ?

Conformément à son habitude, Netanyahu n'a pas choisi de remplaçant automatique. Toutefois, ses pépins de santé et ses déboires judiciaires pourraient affecter son mandat

Carrie Keller-Lynn

Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu dirige la réunion hebdomadaire de cabinet à son bureau de Jérusalem, le 9 juillet 2023. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool/Flash9
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu dirige la réunion hebdomadaire de cabinet à son bureau de Jérusalem, le 9 juillet 2023. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool/Flash9

A notre connaissance, le Premier ministre Benjamin Netanyahu n’a pas désigné de remplaçant temporaire pendant sa récente hospitalisation dans une unité cardiaque – mais son refus continu de nommer officiellement un Premier ministre suppléant qui deviendrait automatiquement son successeur en cas de nécessité (il a été brièvement hospitalisé à deux reprises en l’espace d’un an) soulève une question : Qui donc deviendrait le chef du gouvernement dans le cadre d’une situation d’urgence ?

Dans l’état actuel des choses, cette fonction serait assumée par un Premier ministre par intérim qui serait choisi par le cabinet, ce qui provoque une profonde incertitude sur la personnalité qui pourrait être amenée à prendre la barre du pays si une telle crise devait survenir.

La loi israélienne exige qu’un Premier ministre par intérim intervienne lorsqu’un leader est à l’étranger ou qu’il est temporairement dans l’incapacité de faire son devoir – comme c’est le cas lors d’une intervention chirurgicale nécessitant une anesthésie générale. Conformément à la loi, Netanyahu a toujours nommé un suppléant lorsque cela s’est avéré nécessaire.

Quand le 37e gouvernement d’Israël a fait sa prestation de serment au mois de décembre, Netanyahu s’en est tenu à son habitude de longue date en refusant de nommer une personnalité qui prendrait automatiquement sa place, ce qui signifie qu’à chaque fois qu’il se rend à l’étranger ou qu’il est appelé à subir une anesthésie générale, il est dans l’obligation de nommer un remplaçant temporaire.

Mais sans Premier ministre par défaut, le cabinet serait plongé dans la plus profonde confusion si le Premier ministre devait, pour une raison ou une autre, être incapable de désigner un suppléant. Il est difficile de déterminer qui aurait pu nommer Netanyahu samedi s’il avait eu besoin de choisir un Premier ministre temporaire.

Netanyahu a quitté l’hôpital Sheba dimanche – il a déclaré aller bien, ce qu’ont également confirmé les médecins. L’hôpital a noté que ces derniers avaient soumis le chef de gouvernement à toute une série d’examens – des examens qui auraient eu lieu au sein du service de cardiologie – et qu’ils n’ont rien décelé d’anormal, même s’ils ont implanté un Holter, un dispositif de monitoring cardiaque de manière à pouvoir suivre l’évolution de son état de santé.

Sheba a affirmé que l’hospitalisation de Netanyahu avait été entraînée par une déshydratation après un vendredi passé par le Premier ministre – sans chapeau – au Lac de Tibériade dans un contexte de vague de chaleur intense.

Une source proche du bureau du Premier ministre a indiqué dimanche au Times of Israel qu’à aucun moment de son hospitalisation, Netanyahu n’avait subi d’intervention induisant une perte de conscience. Toutefois, certains médias israéliens avaient laissé entendre qu’avant sa prise en charge à l’hôpital, le Premier ministre s’était effondré et qu’il s’était évanoui à son domicile de Césarée dans la journée de samedi.

Le cabinet choisirait un Premier ministre suppléant, formant potentiellement un nouveau gouvernement

Si le ministre de la Justice Yariv Levin est aussi vice-Premier ministre, ce titre est largement honorifique et il ne permet nullement à Levin de remplacer automatiquement Netanyahu en cas de défaillance.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre de la Justice Yariv Levin lors des délibérations sur le projet de loi interdisant le réexamen, par les juges, des décisions gouvernementales à l’aune de la « raisonnabilité », le 10 juillet 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

De la même manière, le chef du parti Shas, Aryeh Deri, avait le titre de vice-Premier ministre avant que la Haute cour de justice n’ordonne son renvoi du cabinet en raison de ses multiples condamnations antérieures – mais ce titre n’avait aucune importance légale et il n’impliquait nullement qu’il tiendrait un rôle officiel dans le cas d’un éventuel remplacement du Premier ministre à ses fonctions.

Cela fait des années que Netanyahu n’a jamais désigné de Premier ministre suppléant permanent. Des sources du parti du Likud ont expliqué ce refus de désigner un remplaçant par l’ascension-surprise du Premier ministre intérimaire, Ehud Olmert, à la tête du gouvernement après l’attaque majeure dont avait souffert feu Ariel Sharon, qui était alors chef du gouvernement, en 2006. Sharon n’avait jamais souhaité qu’Olmert prenne la tête du parti ou du gouvernement et il ne l’avait nommé comme remplaçant que pour des raisons d’opportunisme politique.

Israël n’a pas de plan de succession à mettre en pratique si le Premier ministre devait être frappé d’incapacité comme cela avait été le cas avec Sharon.

Ce sont deux processus parallèles qui seraient lancés à la place – par le cabinet et, dans le cas de Netanyahu, par le parti du Likud, qui désignerait un chef par intérim dans un premier temps puis un dirigeant permanent dans un deuxième temps.

Les ministres du cabinet se rassembleraient pour choisir un Premier ministre intérimaire, le siège restant officiellement vacant avant la prise de décision finale. Le Premier ministre suppléant, note la loi, doit être ministre, député et membre de la même faction que le chef de gouvernement sortant. Le Premier ministre intérimaire aurait cent jours pour tenir ce rôle – une période à l’issue de laquelle un changement permanent devrait intervenir.

Le député Aryeh Deri pendant un vote en séance plénière de la Knesset, le 14 juin 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Dans l’hypothèse d’un changement à la barre du pays, la Loi fondamentale : Le gouvernement stipule qu’un nouveau gouvernement devrait être formé et approuvé par un vote devant la Knesset – ce qui impliquerait de rassembler une nouvelle coalition avec potentiellement des partis différents, non-inclus dans la coalition existante. Il est interdit, dans le pays, de se contenter de nommer un Premier ministre et de continuer avec le même gouvernement.

« Un nouveau gouvernement doit être formé et il faut le faire en repartant de zéro », explique Amir Fuchs, expert sur la question des institutions démocratiques au sein de l’Institut israélien de la démocratie.

C’est le même processus qui s’appliquerait si Netanyahu devait volontairement démissionner sans que le gouvernement ne s’effondre – comme cela pourrait arriver si cette démission devenait une condition préalable dans le cadre d’une négociation de peine dans son procès pour corruption. Dans tous les scénarios, l’incertitude règnerait probablement pendant un certain temps – le temps que les politiciens décident de l’identité des personnalités appelées à occuper les postes de premier plan rendus vacants.

Le processus interne au Likud

Parce que le Likud est l’un des quelques partis à organiser des Primaires – un processus parallèle visant à choisir un nouveau dirigeant, un vote interne à la formation – ces Primaires auraient probablement un impact sur le processus gouvernemental si Netanyahu devait libérer de façon permanente son fauteuil.

Selon le président du tribunal intérieur du Likud, Michael Kleiner — qui a été pendant longtemps député lui-même – la constitution du mouvement établit qu’ « il est impossible d’être candidat au poste de Premier ministre sans être président du parti », ce qui implique que la course à la présidence du Likud deviendrait de facto une course au poste de Premier ministre (en prenant pour hypothèse que la Knesset, de son côté, n’appelle pas à des élections générales anticipées).

Michael Kleiner, alors qu’il était membre de la Knesset, le 17 avril 2002. (Flash 90)

« Dès qu’un leader par intérim est choisi, alors il est évidemment le candidat naturel pour former un gouvernement », a ajouté Kleiner qui s’était entretenu avec le Times of Israel peu après l’investiture du nouveau gouvernement de Netanyahu, au mois de décembre dernier.

Le ministre du Tourisme Haim Katz est président du Comité central du Likud, un conseil du parti chargé de décider des questions liées à la formation politique et qui est formé d’environ 3 500 adhérents.

Kleiner a précisé que la constitution du Likud désignerait immédiatement Katz, en tant que dirigeant du comité central, comme président temporaire pendant une période de 21 jours. Il serait alors tenu de convoquer le panel pour prendre un plus grand nombre de décisions.

Le Comité central assumerait deux fonctions : D’abord, il devrait élire un leader temporaire du parti et ensuite, il devrait décider d’une date pour des primaires entre les candidats désireux de prendre la tête de la faction dans les quatre-vingt dix jours suivant la désignation du dirigeant intérimaire.

En fonction du moment choisi pour les prises de décisions variées à la fois au sein du gouvernement et au sein du Likud, le passage du bâton automatique et temporaire à Katz – qui n’est même pas membre du cabinet de sécurité – pourrait faire, en théorie, de ce dernier le candidat de facto au poste de Premier ministre par intérim.

Ou des politiciens entreprenants pourraient aussi bien tenter de profiter de l’incertitude qui dominerait pour provoquer l’aube d’un avenir politique très différent.

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