Netanyahu « ne croit pas à la paix », affirme Abbas à la Ligue arabe
Le dirigeant de l'AP a demandé aux Etats arabes d'aider les Palestiniens à combler un manque budgétaire majeur
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a déclaré lors d’une rencontre de diplomates arabes, ce dimanche, que le Premier ministre Benjamin Netanyahu ne croyait pas à la paix entre Israéliens et Palestiniens.
Les propos tenus par Abbas à l’occasion d’un rassemblement de ministres des Affaires étrangères et de responsables au siège de la Ligue arabe, au Caire, surviennent alors que les spéculations portant sur un plan américain de résolution du conflit israélo-palestinien – qui devrait être révélé au plus tôt au mois de juin – ne cessent de prendre de l’ampleur.
Des médias ont laissé entendre que le plan n’inclurait pas la création d’un Etat palestinien. Ainsi, Ramallah, qui a juré de rejeter le document, cherche le soutien des pays arabes face à cette perspective.
« [Netanyahu] ne croit pas à la paix. Nous savons – par le biais de ses positionnements, de ses déclarations et de ses insinuations – qu’il ne croit pas à la paix entre nous et eux », a déclaré le président de l’AP peu après avoir rencontré le leader égyptien Abdel Fattah el-Sissi.
Depuis longtemps, les Palestiniens affirment que toute initiative de paix devra entraîner la création d’un Etat palestinien avec Jérusalem-est comme capitale. Fin février, Netanyahu a estimé qu’un Etat palestinien « mettrait en péril notre existence ».
Abbas a raillé les positions adoptées par l’administration Trump sur des questions déterminantes du processus de paix et a prétendu que le président Donald Trump avait renoncé à soutenir une solution à deux Etats sur le conseil de ses adjoints.
Détaillant une conversation tenue durant une rencontre avec Trump, Abbas a déclaré : « J’ai demandé au président : ‘Croyez-vous en une solution à un Etat ou à une solution à deux Etats ? Pour vous, c’est un Etat ou deux Etats ?’ et il m’a répondu : ‘Je crois en une solution à deux Etats et je suis prêt à le dire en public. Je suis prêt à dire dès maintenant que je soutiens une solution à deux Etats.’ Et l’un de ses conseillers a alors dit : ‘Monsieur le président, ne vous précipitez pas.’ Et Trump a rétorqué : ‘D’accord.' »
Fustigeant la proposition imminente de Trump, Abbas a expliqué : « Je me le demande : que reste-t-il donc à nous présenter ? Que nous reste-t-il encore à attendre ? Quelle raison avons-nous de nous réjouir ? On nous a pris Jérusalem et les territoires occupés. On a abandonné la question des réfugiés. On a légalisé les implantations. Et les territoires ne sont plus considérés comme occupés », a-t-il dit.
« Alors que nous reste-t-il ? », a-t-il déploré.
Les responsables israéliens ont fréquemment affirmé qu’Abbas n’était pas un partenaire de paix.
Netanyahu a indiqué qu’il se pencherait sur le plan américain en conservant « l’esprit ouvert » tandis qu’Abbas, dont l’administration boycotte les efforts de paix de Washington, a juré de ne pas prendre en compte une proposition qui serait seulement américaine.
Les responsables américains ont recommandé aux deux parties d’approcher le plan de paix avec l’esprit ouvert, et certains responsables palestiniens ont récemment affirmé qu’ils liraient la proposition attendue avant de prendre position.
Jared Kushner, haut-conseiller de Trump qui est également son gendre, a indiqué à des diplomates étrangers, la semaine dernière, que le plan attendu serait médiatisé au plus tôt au mois de juin.
Dans un entretien publié vendredi par Sky News Arabic, l’envoyé pour la paix au Moyen-Orient Jason Greenblatt a mis en garde Israël et les Palestiniens contre un éventuel rejet du plan de paix américain, disant que les deux parties devaient être prêtes à des discussions directes.
Il a également précisé que les deux devraient faire des concessions et qu’il y aurait des éléments, dans l’accord, qui satisferaient chacune des parties en lice et d’autres qui les mécontenteraient.
Dans des propos rapportés vendredi par Sky News Arabic, un haut-responsable de la Maison-Blanche, qui n’a pas été nommé, a pour sa part rejeté le terme de « solution à deux Etats ».
Dans une interview accordée publiée vendredi, Gérard Araud, ambassadeur de France sortant à Washington, a dit que la proposition de la Maison-Blanche serait « très proche de ce que veulent les Israéliens » et à 99 % « vouée à l’échec ».
Dans son discours de dimanche, Abbas a aussi appelé les Etats arabes à aider les Palestiniens à combler une pénurie budgétaire majeure.
« Un filet de sécurité financier doit nous être fourni », a expliqué Abbas.
Au mois de février, Israël a commencé à mettre en vigueur une nouvelle loi permettant aux autorités de geler le versement à Ramallah des revenus issus des taxes prélevées par Israël au nom de l’Autorité palestinienne à hauteur du montant qui, selon Jérusalem, est payé par l’AP aux prisonniers sécuritaires palestiniens – notamment aux terroristes – et aux familles de terroristes tués.
Les Palestiniens ont protesté contre cette législation et refusé de recevoir la totalité des revenus collectés chaque mois aussi longtemps que l’Etat juif ne versera pas la somme entière qu’ils représentent.
Cette somme équivaut à des centaines de millions de shekels, et représente plus de la moitié du budget mensuel de l’Autorité palestinienne.
Le ministre des Finances de l’AP Shukri Bishara a annoncé que Ramallah avait adopté une série de mesures d’austérité pour amoindrir l’impact du manque de financement des opérations gouvernementales, réduisant notamment de manière drastique les salaires des fonctionnaires.
Au mois de mars, les fonctionnaires n’ont reçu ainsi que 50 % de leur rémunération habituelle.
La Banque mondiale a mis en garde contre une crise économique la semaine dernière, si la situation ne devait pas être résolue.
Malgré les tensions avec les Etats-Unis, Abbas a expliqué que la coopération sécuritaire avec les Etats-Unis continuait.
Le département d’Etat a récemment cessé de fournir des aides aux forces de sécurité de l’AP, sur demande de Ramallah.
Les liens entre l’Autorité palestinienne et l’administration Trump se sont constamment détériorés depuis que la Maison-Blanche a reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël au mois de décembre 2017 et lancé la relocalisation de son ambassade dans la ville sainte.
Saeb Erekat, secrétaire général du comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine, a expliqué que les Palestiniens ne pouvaient plus accepter les aides des Etats-Unis en raison d’une nouvelle loi américaine sur l’antiterrorisme, qui pourrait plonger l’AP dans des poursuites judiciaires à hauteur de millions de dollars si elle devait accepter l’assistance de Washington.
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