Noam Chomsky et le recteur du Bard College auraient reçu des fonds passés par les comptes de Jeffrey Epstein
L'universitaire de gauche dit avoir demandé l'aide du financier mais assure que l'argent ne venait pas du délinquant sexuel décédé depuis
Jeudi dernier, le Wall Street Journal a titré sur l’universitaire et militant de gauche Noam Chomsky, qui aurait reçu 270 000 dollars d’aide financière de la part du délinquant sexuel décédé Jeffrey Epstein.
Chomsky a confirmé avoir sollicité l’aide d’Epstein pour retirer des fonds communs du compte bancaire de sa première épouse, à sa mort. Le linguiste a tenu à préciser que l’argent transféré depuis un compte lié à Epstein n’appartenait pas au financier tombé en disgrâce.
« Ma défunte épouse est décédée, il y a 15 ans, des suites d’une longue maladie. Nous n’avions absolument pas pensé aux questions financières », écrit Chomsky dans un courriel au journal. « Nous avons demandé conseil à Epstein. Le plus simple était de transférer les fonds d’un compte à mon nom à un autre, par l’intermédiaire de son bureau.
Selon le Wall Street Journal, Leon Botstein, président du Bard College, aurait également confirmé avoir reçu 150 000 dollars de la part du financier, qui ont été transférés à son institution.
Dans une précédente enquête, le Wall Street Journal avait avancé que le cinéaste Woody Allen et l’ex-Premier ministre israélien Ehud Barak avaient eux aussi eu des entretiens avec Epstein. L’existence de tels entretiens n’est en soi pas constitutive d’une infraction.
Le décès d’Epstein en prison, en 2019, a été qualifié de suicide, mais les circonstances mystérieuses de sa mort en ont fait douter plus d’un. Au moment des faits, il attendait son jugement pour trafic sexuel suite à l’enquête du Miami Herald qui avait mis à jour l’existence d’une série d’abus sexuels et la liste des célébrités dont il était proche.
Les entretiens révélés par le Wall Street Journal ont tous eu lieu des années après la première arrestation d’Epstein pour crimes sexuels, en 2008. On relève par exemple un entretien en 2015 avec Chomsky, critique de longue date d’Israël et Barak, dont la relation avec Epstein a fait l’objet d’une enquête très minutieuse.
Epstein avait organisé les entretiens avec Chomsky et Barak dans le but d’évoquer « la politique d’Israël en matière de questions palestiniennes et la scène internationale », a expliqué Chomsky au Wall Street Journal.
Il ajoute à propos d’Epstein : « C’est quelqu’un que je connaissais : nous nous voyions de temps en temps. »
Les deux hommes se sont vus à plusieurs reprises en 2015 et 2016, comme à l’occasion d’un dîner avec Woody Allen et sa belle-fille Soon-Yi Previn, devenue son épouse, ou encore avec l’ex-président de l’Université de Harvard.
Botstein, quant à lui, aurait vu Epstein à des dizaines de reprises pour évoquer la participation financière d’Epstein à des programmes du Bard College. Epstein a effectué des dons ponctuels mais, dans les colonnes du Wall Street Journal, Botstein parle du « sadisme » d’Epstein « qui lui faisait souvent miroiter des soutiens philanthropiques » auxquels il ne donnait pas suite.
L’existence de relations entre Chomsky et Epstein n’avait jamais été révélée auparavant.
Quant à Botstein, il s’était déjà confié sur des dons effectués par Epstein à Bard, mais l’existence d’une relation entre les deux hommes n’avait jusqu’alors pas été évoquée.
Chomsky et Botstein ont tous deux expliqué les raisons qui les ont amenés à continuer à voir Epstein après ses premières condamnations pour trafic sexuel, à savoir pour Chomsky le fait qu’Epstein ait purgé sa peine de prison, ce qui « remettait les comptes à zéro » et pour Botstein, la fidélité à l’esprit de Bard, qui soutient les programmes de réhabilitation des prisonniers.