Nous allons à Auschwitz parce que l’antisémitisme a retrouvé droit de cité
Nous devons condamner les antisémites et dénoncer ceux qui ne le font pas, car le silence fait le lit de la haine
JTA — Aujourd’hui, nous nous rendrons à Auschwitz-Birkenau pour la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de la Shoah.
Nous représenterons les États-Unis et honorerons la mémoire des six millions de Juifs et de millions d’autres qui ont péri, assassinés.
Pendant notre séjour à Auschwitz, nous exprimerons également notre gratitude aux survivants et évoquerons les leçons tirées de cette période effroyable.
Il suffit de regarder l’histoire récente pour constater que le fanatisme à l’origine de la Shoah n’a pas désarmé à la libération des camps.
L’antisémitisme est sans doute l’une des formes les plus anciennes de haine, mais son impact insidieux et ses dangers profonds n’appartiennent certainement pas au passé.
L’antisémitisme progresse [aux États Unis] comme à l’étranger.
La haine du peuple juif, simplement parce qu’il est juif, est bien réelle et elle gagne du terrain.
Nous ne pourrons arrêter ce fléau que si les gouvernements et dirigeants religieux le déclarent inacceptable et incompatible avec nos valeurs.
Dans cet esprit, nous réunirons les dirigeants communautaires en Pologne pour évoquer la façon de lutter contre l’antisémitisme.
Ensuite, nous nous rendrons à Berlin, où nous nous entretiendrons avec des représentants de gouvernements attachés à lutter contre la diffusion des discours de haine.
Notre objectif est d’approfondir nos relations avec nos partenaires européens – à l’intérieur et à l’extérieur des gouvernements – pour contrer la montée de l’antisémitisme.
Nous pouvons apprendre les uns des autres et partager les meilleures pratiques.
Nous pouvons agir en nous laissant guider par nos valeurs communes d’égalité, diversité et de respect des droits humains.
Ce qui se passe aujourd’hui nous impose d’agir, ensemble, sur la base de ces valeurs.
Il y a beaucoup trop d’attaques contre les communautés juives, de vandalisme, de menaces et de discours aussi violents que chargés de haine.
Auparavant, les gens n’osaient pas dire tout haut ces mots ignobles ou ces mensonges.
Aujourd’hui, ils n’hésitent pas à les crier bien haut.
En 2018, une horrible agression antisémite a coûté la vie à 11 innocents, dans la synagogue Tree of Life.
En 2019, un homme armé a ouvert le feu sur le Chabad de Poway en Californie, tuant une personne et en blessant trois autres dans le cadre d’une attaque antisémite. Et l’an dernier à Los Angeles, des banderoles antisémites ont été installées en surplomb d’une autoroute.
Ces violences odieuses et insensées font souffrir la communauté juive.
Nous avons entendu ces parents, inquiets d’envoyer leurs enfants à l’école maternelle du centre communautaire juif parce qu’ils craignent pour leur sécurité. Ils doivent expliquer à leurs enfants pourquoi leur synagogue est gardée par un homme armé alors que l’église de l’autre côté de la rue, non.
En décembre, nous avons tous deux assisté à une table ronde à la Maison Blanche avec des dirigeants juifs américains. Nous avons évoqué l’impact de l’antisémitisme sur leurs communautés, en termes de sécurité, d’éducation et de responsabilité.
Sous la direction du président Joe Biden et de la vice-présidente Kamala Harris, nous avons augmenté le budget dévolu à la sécurité des organisations à but non lucratif et des synagogues, et nommé des responsables chargés de lutter contre les crimes haineux et l’antisémitisme.
Grâce à une approche globale, qui implique tout le gouvernement, l’administration Biden-Harris élabore en ce moment-même un vaste plan de lutte contre l’antisémitisme. Le premier mandat de cette interagence est en effet de créer un plan d’action national contre l’antisémitisme.
Mais nous savons qu’il reste beaucoup à faire.
Nous devons tous agir, à notre niveau, pour éduquer ceux qui nous entourent et la future génération de dirigeants, afin qu’ils luttent également contre l’antisémitisme.
Nous ne permettrons pas que l’antisémitisme soit admis ou ait sa place en politique.
Nous avons tous la responsabilité de prendre la parole et de dire clairement que l’antisémitisme est mauvais, comme tous les autres préjugés.
Nous devons tous condamner les antisémites et dénoncer ceux qui ne le font pas.
Face au mal, il n’y a pas de place pour la neutralité. Rester silencieux n’est pas une option. En effet, le silence est précisément ce qui permet aux oppresseurs de prospérer et au virus de la haine de se répandre.
Encore une fois, il nous appartient de remplacer le silence, passé et présent, par un chœur de voix puissantes déterminées à reléguer la haine antisémite au rang de relique.
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Douglas Emhoff est le « second gentleman » des États-Unis [NDLT : Terme qui désigne l’époux de la Vice-Présidente, Kamala Harris]
Deborah Lipstadt est l’Envoyée spéciale des États-Unis chargée de la surveillance et de la lutte contre l’antisémitisme.