Pas de successeur pour le gouverneur de la Banque du Liban – vice-Premier ministre
Le gouvernement démissionnaire n'est pas en mesure de nommer un successeur à Riad Salamé, suspecté de détournement massif de fonds publics et dont le mandat expire le 31 juillet

Le gouvernement libanais démissionnaire n’est pas en mesure de nommer un successeur au patron contesté de la Banque du Liban, Riad Salamé, dont le mandat expire le 31 juillet, a reconnu mardi le vice-Premier ministre Saadé Chami dans un entretien avec l’AFP.
« Conformément à la loi », c’est donc le Premier vice-gouverneur qui devra assumer cette fonction, a ajouté M. Chami, écartant une éventuelle reconduction de M. Salamé évoquée dans les médias.
Le pays en plein effondrement économique est privé de président depuis près de neuf mois en raison des profondes divisions de la classe politique, et dirigé par un gouvernement démissionnaire qui ne peut pas prendre de décisions importantes.
Les quatre vice-gouverneurs avaient menacé début juillet de démissionner pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il nomme un successeur à M. Salamé, grand argentier du pays depuis 1993.
Le gouverneur, suspecté de détournement massif de fonds publics, est poursuivi au Liban et dans plusieurs pays européens.
« Le mandat du gouverneur se termine à la fin du mois (…) à mon avis, la meilleure option est de nommer un gouverneur, bien que le gouvernement soit chargé d’expédier les affaires courantes », a affirmé M. Chami.
Mais il a reconnu qu’en raison des divergences qui paralysent le pays, « les circonstances ne sont pas réunies pour désigner un nouveau gouverneur dans un délai d’une semaine ».
Le vice-Premier ministre, qui a participé lundi à une réunion avec les quatre vice-gouverneurs, issus des différentes communautés religieuses conformément au partage confessionnel du pouvoir au Liban, a affirmé qu’ils n’avaient pas évoqué leur démission.
« Ils ont certaines demandes, ils veulent l’appui du gouvernement et du Parlement pour poursuivre leur action », a-t-il dit.
Le Premier ministre Najib Mikati « a exprimé le souhait de les voir poursuivre l’exercice de leurs fonctions, et nous aurons une réunion avec eux dans les deux prochains jours pour parvenir à une solution », a ajouté M. Chami.
La situation est tellement désastreuse que les vice-gouverneurs réclament par exemple d’avoir l’accord du gouvernement pour débourser 200 millions de dollars par mois, afin de payer les salaires de la fonction publique et financer les médicaments subventionnés, selon lui.

Réformes cruciales
Mais les vice-gouverneurs réclament surtout l’application des réformes cruciales exigées par le Fonds Monétaire International (FMI), notamment la restructuration du secteur bancaire et une loi sur le contrôle des capitaux, a expliqué M. Chami.
Le vice-Premier ministre, en charge des négociations entre le gouvernement et le FMI, a rappelé que le Liban a conclu un accord de principe avec l’instance internationale en avril 2022.
« Il est maintenant nécessaire de prendre certaines mesures pour parvenir à un accord final. Nous sommes devenus des experts de la perte de temps. Mais plus nous tardons, plus la solution sera difficile », a-t-il averti.
« L’Etat et l’administration sont dans une situation lamentable, il y a des grèves, les salaires de la fonction publique sont très bas, les gens n’arrivent plus à entrer à l’hôpital ou payer l’école pour leurs enfants », a-t-il ajouté. « Il est nécessaire de prendre des décisions courageuses de la part des responsables ».
L’accord de principe avec le FMI porte sur une aide de trois milliards de dollars, échelonnée sur quatre ans mais conditionnée à la mise en œuvre des réformes.
Depuis 2019, le Liban est plongé dans une profonde crise économique imputée par une grande partie de la population à la mauvaise gestion, la corruption, la négligence et l’inertie d’une classe dirigeante en place depuis des décennies.

La monnaie a perdu plus de 98 % de sa valeur par rapport au dollar sur le marché parallèle, tandis que des restrictions bancaires draconiennes empêchent les épargnants d’avoir librement accès à leur argent.
M. Chami a indiqué que le plan de relance pourrait garantir la restitution des dépôts « aux petits déposants ayant jusqu’à 100 000 dollars ».
Au-delà de cette somme, les avoirs seront « placés dans un fonds de recouvrement des dépôts, qui seront reversés avec le temps. Il est impossible de récupérer les avoirs d’un seul coup », a-t-il dit.