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Opinion

Pas de tremblement, de colère ou de KO dans une soirée relativement bonne pour Trump

Un avis depuis Jérusalem au lendemain du premier face-à-face présidentiel

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Les candidats à la présidentielle américaine Donald Trump et Hillary Clinton pendant le premier débat de la campagne, à New York, le 26 septembre 2016. (Crédit : capture d'écran YouTube/RBC NETWORK BROADCASTING)
Les candidats à la présidentielle américaine Donald Trump et Hillary Clinton pendant le premier débat de la campagne, à New York, le 26 septembre 2016. (Crédit : capture d'écran YouTube/RBC NETWORK BROADCASTING)

Cela pouvait bien être du prime-time pour la télévision américaine, mais le premier débat présidentiel entre Hillary Clinton et Donald Trump a eu lieu à une heure impossible en Israël, commençant à 4h00 du matin. Et pour ceux qui sont restés réveiller ou se sont levés, il n’y a pas eu la moindre référence pour nous pour éveiller nos esprits fatigués avant l’aube : aucune mention directe à Israël, et simplement une mention faite par Trump de notre Premier ministre.

Les sujets qui inquiètent profondément Israël ont cependant été abordés, comme l’accord nucléaire iranien et le combat contre le terrorisme.

Voici quatre leçons venues de Jérusalem au lendemain du débat.

Israël : non mentionné

Un débat de 90 minutes et le mot « Israël » n’a pas été prononcé ?! Avec notre destin si profondément entremêlé avec celui du monde libre et de l’Amérique comme chef, devrions-nous en être malheureux ? Je ne le pense vraiment pas.

Israël a tout intérêt à ne pas être utilisé à l’excès comme football politique dans cette campagne présidentielle spectaculairement rancunière. Nous sommes situés sur la ligne de front géographique et pratique de la bataille contre l’extrémisme islamique qui célèbre la mort et menace l’ensemble du monde libre. Nous sommes la seule démocratie de la région (mais nous serions ravis que d’autres nous rejoignent.) Nous voulons, nous avons besoin, et nous sentons que nous méritons le soutien de tout le spectre politique américain.

Si ces deux candidats qui débattent sans fin n’ont rien trouvé de convaincant sur Israël pour être en désaccord, c’est pour le mieux. Rien à dire ici. Avançons.

L’Iran : contesté

Au contraire, l’Iran, et l’accord nucléaire avec les ayatollahs qui a été encouragé, signé et exécuté par l’administration du président américain Barack Obama, a largement été abordé. Et je supposerai que les sympathies de la plupart des Israéliens regardant le débat sont allées du côté de Trump.

La façon dont Clinton l’a décrit, « j’ai passé un an et demi à rassembler une coalition incluant la Russie et la Chine pour imposer les sanctions les plus sévères à l’Iran. Et nous les avons menés à la table des négociations. Et mon successeur, John Kerry, et le président Obama ont obtenu un accord qui place un couvercle sur le programme nucléaire de l’Iran sans tirer un seul coup de feu. C’est la diplomatie. C’est la construction de coalition. C’est travailler avec les autres nations. »

Elle a par la suite ajouté qu’il n’y a « aucun doute que nous avons d’autres problèmes avec l’Iran. Mais personnellement, je préfère traiter les autres problèmes en ayant mis un couvercle sur le programme nucléaire plutôt que de continuer à y faire face. »

C’est le candidat parvenu qui peut se permettre de se sentir plus heureux

Trump n’a pas été impressionné. « … Vous avez commencé l’accord iranien », a-t-il amèrement rappelé à sa rivale. « C’est une autre beauté, où vous avez un pays qui était prêt à tomber. Je veux dire, ils allaient si mal. Ils étouffaient sous les sanctions. Et maintenant ils vont vraiment être probablement une puissance majeure à un moment très proche, de la façon dont cela se déroule. »

Il est revenu peu après à son thème. « C’est l’un des pires accords jamais signés par n’importe quel pays dans l’Histoire. L’accord avec l’Iran entraînera des problèmes nucléaires. Tout ce qu’ils ont à faire, c’est s’assoir pendant dix ans, et ils n’ont pas grand-chose de plus à faire… Et ils vont finir par avoir du nucléaire. J’ai rencontré Bibi Netanyahu la dernière fois. Croyez-moi, il n’est pas un campeur heureux. »

Depuis ces rivages, l’accord iranien semble aux yeux de trop de personnes comme un accord faible, quand un meilleur aurait pu être négocié. Le groupe P5+1 a été mis en place pour démanteler le programme nucléaire voyou de l’Iran et imposer les sanctions qui ont forcé le régime à revenir à la table des négociations, mais a terminé avec un accord qui laisse intacte une partie du programme, ne gèle pas tous ses éléments, et permet à l’Iran d’obtenir un arsenal nucléaire potentiellement rapidement même s’il honore les termes de l’accord, quand les différents clauses parviendront à expiration ces prochaines années.

Ajoutant l’insulte à la blessure, l’administration Obama avait dit à Israël de cesser de critiquer l’accord avant sa signature parce que nos dirigeants ne savaient à l’évidence pas de quoi ils parlaient, puis a affirmé qu’aucun autre meilleur accord n’aurait pu être atteint, et qu’aucun accord n’aurait satisfait Israël, et plus récemment, le président lui-même a affirmé que « la communauté militaire et sécuritaire israélienne » reconnait à présent que l’accord change les règles du jeu positivement.

Netanyahu, « pas un campeur heureux » ? J’imagine que le Premier ministre a hoché la tête et soupiré en privé à la déclaration de Trump.

Le premier ministre Benjamin Netanyahu (à gauche) et le président américain Barack Obama au Lotte New York Palace Hotel, le 21 septembre 2016. (Crédit : Drew Angerer/Getty Images/AFP)
Le premier ministre Benjamin Netanyahu (à gauche) et le président américain Barack Obama au Lotte New York Palace Hotel, le 21 septembre 2016. (Crédit : Drew Angerer/Getty Images/AFP)

Intérêt

Avant le combat, le premier face-à-face était vendu par les médias américains comme un genre d’équivalent politique à la Thrilla in Manilla [le dernier combat entre Mohamed Ali et Joe Frazier pour le championnat du monde de boxe]. La chaîne britannique Sky News a parlé d’un débat qui pourrait « changer le monde », – rien de moins.

Mais si 100 millions d’Américains ont vraiment allumé leurs télévisions pour ses esquives d’ouverture et ses crochets, je me demande combien d’entre eux regardait encore au moment du dernier round.

Il n’y a pas eu de KO. Pas de crochets rhétoriques étourdissants. Revenue de sa pneumonie, Clinton n’a fait beaucoup plus que s’éclaircir la voix, sans parler de tremblement, d’effondrement ou de toux. Trump n’est pas devenu fou.

Nixon – Kennedy, ce n’était pas ça. Ni, si cela compte, pour invoquer un débat israélien définissant une élection, comme l’a été Peres – Netanyahu. Il y a 20 ans, en mai 1996, trois jours avant qu’Israël ne vote pour élire un successeur à Yitzhak Rabin, assassiné, un favori très réticent, Shimon Peres, n’a consenti qu’à un seul débat télévisé contre le jeune chef de l’opposition Benjamin Netanyahu. Peres était réticent parce qu’il avait tout à perdre : il était le vétéran politique, le candidat du système qui avait payé sa dette ; il avait l’expérience et la sagesse présumée, et il affrontait un candidat imprévisible, agile et télégénique.

Le moment crucial a eu lieu à la fin du débat, quand le modérateur, Dan Margalit, a invité chacun des candidats à poser à l’autre une seule question. Netanyahu, comme il l’avait fait pendant tout l’affrontement télévisuel, et en fait pendant toute une campagne électorale marquée par des attentats suicides du Hamas, a attaqué Peres pour son incapacité évidente à rectifier la situation sécuritaire « qui empire », ce à quoi Peres a rétorqué que son rival tirait un capital politique cynique des peurs de la population. Mais quand le moment est venu pour Peres de poser sa question à Netanyahu, il a refusé de lui demander quoi que ce soit, pensant évidemment signaler que Netanyahu était un amateur qui n’apporterait rien qui aurait une réelle valeur. Ce qui est passé, c’est cependant le sentiment que Peres ne pouvait concevoir aucune question à laquelle Netanyahu ne trouverait pas de réponse efficace.

Quelques jours après, Peres a perdu l’élection contre Netanyahu de moins d’un point, de 29 457 votes, pour être précis. Le débat télévisé a certainement été un facteur.

Clinton connaissait manifestement mieux que Peres les dangers de sous-estimer un opposant implacable et aiguisé. Elle s’est, a-t-elle noté, « préparée à être présidente. » Et elle s’était préparée rigoureusement pour ce débat, sachant que la télévision était le territoire de Trump.

Aucun des candidats n’a quitté la salle en se sentant battu. Mais aucun ne pouvait revendiquer une victoire décisive de manière crédible non plus.

Et pourtant

Et pourtant, même si Trump était dans son habitat télévisuel naturel mais n’a pas réussi à porter un coup définitif, même si Clinton a semblé compétente, confiante et relativement assurée, je pense plutôt que c’est le candidat parvenu qui peut se permettre de se sentir plus heureux après le premier de ces trois débats.

Il était là, l’outsider autodidacte, le candidat ostensiblement anti-système, le concurrent bien côté à qui personne ne donnait la moindre chance de remporter la nomination républicaine, finalement à égalité avec l’initiée de longue date, se balançant et piquant, esquivant et plongeant. Sur l’écran divisé, simplement parce qu’il est plus grand, c’était même Clinton qui levait les yeux vers lui de temps en temps : un plan de rêve.

A-t-il semblé désespérément pas à la hauteur contre cette dirigeante politique massivement expérimentée ? Non. A-t-il donné à ses électeurs probables une raison puissante d’y repenser, de se retirer ? Je ne pense pas. Et a-t-il nui à ses chances parmi les indécis ? Je ne le pense pas non plus. Sa campagne a été jonchée de propositions politiques superficielles et de certains discours séduisants et vicieux ; il s’en est tenu éloigné lundi soir.

Le charme de Trump repose, en partie, sur le fait qu’il est effronté, et controversé, et parle avec ses tripes. Ce charme atteint ses limites puisqu’il peut aussi être irresponsable, excessif, dangereux.

Hillary Clinton a-t-elle persuadé les Américains lundi soir que l’on ne pouvait pas faire confiance à Donald Trump pour la direction et la défense du pays ? Je ne crois pas. Et elle pourrait avoir à le faire, si elle veut l’empêcher de remporter la présidence.

Les candidats à la présidentielle américaine Donald Trump et Hillary Clinton quittent la scène après le premier débat de la campagne, à New York, le 26 septembre 2016. (Crédit : AFP/ Timothy A. Clary)
Les candidats à la présidentielle américaine Donald Trump et Hillary Clinton quittent la scène après le premier débat de la campagne, à New York, le 26 septembre 2016. (Crédit : AFP/ Timothy A. Clary)

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