Pour les 80 ans de la libération, 80 survivants d’Auschwitz se confient en images
La Claims Conference a produit une série de témoignages vidéo pour permettre aux jeunes générations de les "entendre et de faire vivre leur histoire"

Zvi, le frère d’Aron Krell, survivant d’Auschwitz, est mort dans le ghetto de Lodz, en 1944, parmi les siens en disant : « S’il vous plaît, ne m’oubliez pas. »
Avant la Shoah, Zvi Krell était un joueur de football sec et nerveux. Lorsque les nazis ont confiné les Juifs de Lodz dans un ghetto, Zvi a rapidement succombé à la famine. Son frère Aron et le reste de la famille ont été déportés à Auschwitz.
« J’ai non seulement perdu Zvi, mais aussi mon frère Moshe et ma mère, Esther, dans la Shoah. J’ai survécu à cinq camps de concentration et ghettos, à commencer par Auschwitz », confie Aron Krell.
Quatre-vingts ans après la libération d’Auschwitz-Birkenau, le 27 janvier 1945, Krell est l’un des 80 survivants à témoigner en vidéo pour les besoins d’une campagne sur les réseaux sociaux produite par la Claims Conference. Les vidéos seront diffusées sur TikTok et Instagram pendant deux semaines jusqu’à la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de la Shoah, le 27 janvier.
Intitulée « I Survived Auschwitz: Remember This [NDLT : J’ai survécu à Auschwitz : souvenez-vous-en] », cette campagne est inspirée de la promesse de Krell d’honorer les dernières volontés de son frère, explique The Claims Conference.
« Je sais que la plupart des gens n’ont aucune idée de ce que j’ai vécu. Mais ils peuvent en revanche comprendre l’amour qui me lie à mon frère Zvi, la douleur insupportable que j’ai ressentie à sa mort et, souhaitons-le, l’importance de ne pas oublier la Shoah », poursuit Krell.
Selon la Claims Conference, cette année est sans doute la dernière qui permettra « de mener des campagnes avec le témoignage direct de survivants capables de dire les horreurs qu’ils ont subies ».
Auschwitz est depuis longtemps le symbole de la Shoah. Camp de la mort nazi avec le plus grand nombre de victimes, Auschwitz est également celui qui a permis à des médecins nazis de mener des expériences inhumaines sur les détenus.
Sur Facebook, le musée d’État d’Auschwitz-Birkenau dit attendre la venue de 50 survivants pour les commémorations de ce mois-ci. L’ex-camp de la mort est l’un des principaux lieux de pèlerinage et de tourisme de Pologne, qui a accueilli 1 670 000 personnes en 2023.

Les Allemands ont construit Birkenau à côté d’une caserne militaire polonaise préexistante, en périphérie de la ville d’Oswiecim – le nom polonais d’Auschwitz. Six chambres à gaz ont été construites à Birkenau. Quatre d’entre elles étaient équipées de crématoriums pour éliminer quotidiennement des milliers de cadavres.
Un million de Juifs venus de toute l’Europe ont été déportés à Birkenau et assassinés dans des chambres à gaz. Les nazis ont également assassiné 100 000 personnes appartenant à d’autres communautés – membres du clergé et intellectuels polonais, Roms et prisonniers de guerre soviétiques.
Au-delà du témoignage des survivants vivants, la campagne de sensibilisation de la Claims Conference diffusera par exemple des vidéos sur Elie Wiesel, Anne Frank et d’autres personnes emprisonnées à Auschwitz-Birkenau.

Dans leurs témoignages pour la campagne, les survivants de la Shoah répondent à la question : « Compte tenu de votre expérience de survivant d’Auschwitz, quelle est la chose – une personne, un moment ou une expérience – dont vous voulez que les gens se souviennent pour les générations à venir ? »
« Les horreurs qui se sont produites à Auschwitz, aucun être humain ne devrait jamais les subir, pas plus qu’il ne devrait les oublier », explique Gideon Taylor, président de la Claims Conference.
« Bien qu’il soit difficile de s’imaginer dans un camp de concentration, nous voulons tous que l’on se rappelle les êtres chers que nous avons perdus, les expériences qui nous ont façonnés et les moments qui ont été importants pour nous. Il est essentiel que nous éduquions les générations futures sur Auschwitz », ajoute Taylor.
« Conduire son enfant à la mort »
Situé à proximité des principales lignes de chemin de fer, Birkenau – bosquet de bouleaux, en allemand – était un camp de la mort qui sélectionnait les personnes en bonne santé destinées à mourir par le travail forcé. Les enfants, personnes âgées et personnes inaptes au travail devaient prendre des douches après un processus de « sélection » qui se tenait à côté des wagons couverts dans lesquels ils arrivaient.

Entouré d’usines essentielles à l’effort de guerre de l’Allemagne, Auschwitz-Birkenau était la plus grande bourse de travail forcé de toute l’Europe. Pour les Juifs sélectionnés pour le travail, le fait de travailler dans une usine à l’intérieur de la « zone d’intérêt » d’Auschwitz était une occasion de faire de la contrebande mais aussi de communiquer et, potentiellement, de se révolter contre les SS.
Judith Hervé-Elkán, 98 ans, a survécu à Auschwitz et fait partie de la campagne sur Auschwitz de la Claims Conference. Son souvenir le plus difficile concerne les enfants conduits à Auschwitz, tous destinés à la mort.
« La mère mourant avec son enfant dans les bras, conduisant son enfant à la mort, est, pour moi, la plus terrible des images que je vois encore aujourd’hui. Tant de mères, ne sachant pas ce qui les attendait, n’ont pas lâché leurs enfants, leurs bébés, leurs petits. Qu’y a-t-il de plus terrible au monde que de mener son propre enfant à la mort », confie Hervé-Elkán.

L’une des lignes directrices des témoignages des survivants est la compulsion à se souvenir de ce qui s’est passé. Ce sentiment est exprimé par Jona Laks, jumeau qui a survécu aux expériences du tristement célèbre médecin SS Josef Mengele.
« Je me souviens de ce jour-là, au moment même où nous avons été laissés seuls dans la marche de la mort, j’ai juré que je consacrerais toute mon énergie, tout mon temps, absolument tout, à raconter, documenter, transmettre et dire ce qui s’est passé. Parce qu’il est impossible qu’une période aussi sombre disparaisse de la conscience des gens et ne reste pas dans l’Histoire », conclut M. Laks.
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