Pour les juifs parisiens, célébrer Hanoukka est un miracle
Malgré l’état d’urgence en place en France, la fête des lumières a été célébrée publiquement dans la Ville Lumière
PARIS – Alors que la communauté juive parisienne organisait son 27e allumage annuel d’une ménorah pour Hanoukka au pied de la Tour Eiffel, des officiers de police lourdement armés se mêlaient aux parents venus avec des poussettes et aux curieux et spectateurs de dimanche soir.
A la suite des attaques du 13 novembre qui ont paralysé Paris, les autorités françaises ont déclaré l’état d’urgence, qui en théorie implique une interdiction des rassemblements publics. Appelez ça un miracle de Hanoukka, mais malgré l’état d’urgence, la fête des lumières est arrivée dans la Ville Lumière.
« Nous sommes très heureux que la police ait pris en considération la possibilité de le faire et nous ait donné la permission, » a déclaré le rabbin Mendel Azimov, président du Chabad de Paris.
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Selon Azimov, les fonctionnaires ont demandé à la communauté de reporter l’allumage public de la ménorah jusqu’à la fin de cette semaine de COP21, les négociations climatiques des Nations unies qui ont lieu en ce moment au Bourget, en banlieue parisienne.
Mardi, à la suite d’une réunion avec le Service de la Protection de la Communauté Juive, la communauté juive locale a reçu le feu vert pour procéder [à l’allumage public]. Le nombre total d’allumages publics dans Paris a cependant été réduit de 30 à 11.
Sous un ciel nocturne clair et frais, avec le symbole iconique de Paris scintillant en fond, le grand rabbin de France Haim Korsia, le président du consistoire central israélite de France Joël Mergui et Azimov ont allumé la première bougie. L’évènement a été retransmis en direct à Jérusalem et New York.
La sécurité a été relevée, notamment la zone la plus proche de la ménorah a été fermée, alors que les années précédentes la foule pouvait évoluer librement sur le Champ de Mars, le parc qui mène jusqu’à la Tour Eiffel. Néanmoins, une foule de 1 500 personnes s’entassait dans la zone de vision et le parking proche était une mer de mini vans à ménorah électrique accrochée au toit.
Les inquiétudes sécuritaires n’ont pas dissuadé la parisienne Kathy Coen, qui dit venir chaque année.
« Je n’ai pas peur, c’est la preuve que le peuple juif est vivant, a-t-elle dit. Bien sûr Hanoukah est plus symbolique cette année, il faut donner plus de lumière. »
Citant à la fois les attentats du 13 novembre et les attaques de janvier à Charlie Hebdo et dans un supermarché cacher, le député franco-israélien Meyer Habib a déclaré à la foule, « nous avons vécu une année sombre. Mais la lumière du peuple juif, de génération en génération, doit être montrée au monde. »
Pour Haim Tibi, un autre habitué, l’évènement montre l’unité.
« Les juifs sont en solidarité avec la France pour continuer nos traditions », dit Tibi.
La ménorah portait de chaque côté un drapeau français – une personne dans la foule brandissait aussi vivement le drapeau tricolore, frappé du mot mashia’h (messie) – pendant qu’un groupe hassidique chantait des nigunim au son de « La Marseillaise » l’hymne national français.
La foule a même eu une visite surprise d’Arnold Schwarzenegger, l’acteur et ancien gouverneur de Californie, qui était en ville pour les négociations climatiques de la COP21. Il a vaillamment dansé sur la musique simcha avec une troupe de rabbins Loubavitch au pied de la scène.
L’évènement de dimanche à la Tour Eiffel était juste l’ouverture pour « Qu’il y ait de la lumière : un concert d’unité », qui aura lieu mercredi à la grande synagogue de Paris. Organisée par Nachum Segal, présentateur d’un programme radio populaire aux Etats-Unis, « JM in the AM », des familles des victimes de l’attentat à l’HyperCacher de Paris réciteront le Kaddish des endeuillés avant l’allumage de la ménorah.
« Les communautés juives en France et ailleurs dans le monde doivent savoir que leurs frères et sœurs du monde entier tiennent profondément à eux et qu’ils se tiennent à leurs côtés, a déclaré Segal au Times of Israel. Quand les juifs affrontent des situations difficiles n’importe où, le cœur juif collectif souffre. »
Le cœur du Paris juif, pendant ce temps, bat dans le quartier du Marais, particulièrement le long de sa rue commerçante, la rue des Rosiers. La charmante rue pavée compte de plus en plus de boutiques de mode et d’établissements de traiteurs. Pour ceux qui cherchent la culture juive, des livres juifs, et particulièrement de la nourriture juive, il s’agit du premier arrêt à Paris.
A la boulangerie de Florence Kahn, une ménorah est allumée à la fenêtre et des ponchkes (beignets) illuminent le présentoir rempli de hallah, pâtisseries, gâteaux, et autres délices ashkénazes qu’elle sert depuis 28 ans.
Depuis les attaques de janvier, la présence policière s’est accrue rue des Rosiers.
« On est toujours exposé, mais maintenant on sait qu’il n’y a pas que nous », dit-elle.
Kahn, comme beaucoup de juifs français, désavoue la théorie selon laquelle le Bataclan, le site des pires attaques de novembre, a été ciblé parce qu’il accueille parfois des évènements juifs. « Si on avait voulu attaquer la communauté juive, on ne serait pas allé à un concert de rock métal », dit-elle.
Plus bas dans la rue des Rosiers, les décorations de Hanoukka font signe depuis la fenêtre de Chez Hannah, un restaurant sépharade servant de savoureuses assiettes de falafel, schawarma et aubergines. Guy Abergel, d’origine marocaine, et sa femme israélienne ont tenu le restaurant pendant 25 ans. Il ne s’inquiète pas des risques pour la communauté juive.
« Paris s’est décoré pour le Noël, c’est normal que nous fassions la même chose pour Hanoukka, dit-il. Il faut vivre. Nous ne sommes pas anxieux, il faut faire plus attention ».
De retour à la Tour Eiffel, le rabbin Azimov est confiant que ce Hanoukka a une symbolique exceptionnelle pour les juifs parisiens.
« Les gens vont sentir quelque chose de différent et d’encourageant, dit-il. Tout le message de Hanoukka est que vous transformez les ténèbres en lumière ».
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