Pour l’ex-chef du Shin Bet, le refus des réservistes de servir est justifié
Nadav Argaman a déclaré dans une interview à la radio de l'armée que le chef d’état-major de l’armée et l'actuel chef du Shin Bet devraient dire à Netanyahu : "ça suffit"

L’ancien chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet a offert son soutien jeudi aux réservistes de l’armée qui menacent de ne plus se présenter au travail pour protester contre les projets du gouvernement visant à restreindre le pouvoir judiciaire, affirmant que la législation entraînerait un changement de régime qui annulerait l’engagement des réservistes.
Nadav Argaman, qui a dirigé le Shin Bet jusqu’en 2021, s’est exprimé à la radio de l’armée quelques heures après que la commission de la Constitution, du Droit et de la Justice de la Knesset a approuvé, en vue de sa lecture finale au Parlement la semaine prochaine, un élément clé de la refonte : une clause controversée qui retire aux tribunaux la possibilité d’annuler des décisions gouvernementales et ministérielles en les qualifiant de « déraisonnables ».
« Il s’agit d’un coup d’État. Nous avons tous servi sous des gouvernements différents… et reçu des ordres différents ; nous avons cru davantage en certains et moins en d’autres ; cela n’a pas d’importance. La réalité est différente, le changement de régime est une nouvelle réalité », a-t-il déclaré.
« Toute législation qui ne fait pas l’objet d’un large consensus conduira l’État d’Israël au chaos », a averti Argaman.
« Si la loi est adoptée, nous serons un pays différent. Nous serons au bord de la guerre civile. »
Outre les manifestations publiques de masse organisées depuis six mois contre la réforme du système judiciaire, des centaines de réservistes militaires ont annoncé qu’ils ne se porteraient plus volontaires pour exercer leurs fonctions spécialisées – parmi lesquels des pilotes de l’armée de l’air – si le projet de loi dit du « caractère raisonnable » est adopté. La plupart des Israéliens qui effectuent leur service militaire national obligatoire sont ensuite tenus de participer au service annuel de réserve, mais ceux qui ont servi dans des unités spéciales sont censés se porter volontaires pour continuer à exercer les mêmes fonctions lorsqu’ils sont dans la réserve, un engagement qu’ils prennent généralement de leur propre chef.
« Si cette terrible et horrible loi est adoptée, nous serons un pays différent et nous ne serons donc pas tenus de respecter le ‘contrat’ qu’ils ont signé avec nous », a déclaré Argaman. « Par conséquent, il convient de mettre fin au volontariat. »
Argaman a été nommé à la tête du Shin Bet par le Premier ministre Benjamin Netanyahu en 2016 et a dirigé l’agence pendant cinq ans.
Il a blâmé Netanyahu pour la situation et a déclaré que « placer la responsabilité sur ces volontaires, pilotes, unités spéciales – c’est une totale erreur. »
« Je me suis porté volontaire pour un État juif et démocratique, pas pour servir un dictateur ni une dictature », a-t-il déclaré, parlant de son propre long service dans l’establishment de la Sécurité. « J’enverrais également une telle lettre dès que la clause de ‘raisonnabilité’ serait passée. »

Argaman a admis qu’il craignait que le refus de se présenter au service de réserve puisse être utilisé par d’autres groupes à l’avenir pour faire pression sur le gouvernement, mais il a déclaré que la situation actuelle justifiait cette mesure à cause de ce que la coalition est en train de faire.
Il a déclaré que le chef d’état-major de Tsahal, le général Herzi Halevi, et le chef du Shin Bet, Ronen Bar, devraient dire à Netanyahu : « Ça suffit ».
En mars, Argaman avait déclaré qu’il craignait que la mise en œuvre des projets de réforme judiciaire ne provoque « l’effondrement de l’intérieur » des agences de sécurité du pays.

Les deuxième et troisième lectures du projet de loi sur le « caractère raisonnable », un amendement à la Loi fondamentale : Le pouvoir judiciaire, commencera dimanche au plénum de la Knesset, et le projet de loi devrait être approuvé et promulgué lundi ou mardi.
Le projet de loi interdirait à la Cour suprême et aux juridictions inférieures d’utiliser la norme du « caractère raisonnable » pour contrôler les décisions prises par le gouvernement et les ministres.
Les partisans du projet de loi affirment que l’interdiction d’utiliser la doctrine est nécessaire pour mettre fin à l’ingérence judiciaire dans les décisions du gouvernement, en faisant valoir que cela revient à ce que des juges non élus substituent leur propre jugement à celui des représentants élus.
Les opposants affirment cependant que cette interdiction affaiblira la capacité de la Cour à examiner les décisions qui portent atteinte aux droits civils et à protéger les hauts fonctionnaires qui occupent des postes sensibles, tels que le procureur général, et le chef de la police entre autres, contre les licenciements fondés sur des motifs inappropriés.