Pourquoi la 10e visite de Biden en Israël doit aussi être la plus productive
Le président américain aura des choses à faire en Arabie saoudite. Mais rien n'est plus important que d’arrêter la marche de l’Iran vers l’arme nucléaire. Et le temps presse
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Le président américain Joe Biden s’est déjà rendu neuf fois en Israël. Comme il l’a rappelé à son arrivée ici, mercredi après-midi, il a rencontré tous les Premiers ministres israéliens depuis Golda Meir. C’est un sioniste. Il « comprend » Israël et ses défis, et apprécie ses réalisations.
Mais si l’on en croit les propos de plusieurs commentateurs et analystes israéliens à l’approche de la visite du président, l’étape israélienne du voyage de Biden au Moyen-Orient serait presque une visite “pour la forme”, une sorte d’ « escale » bien intentionnée, pour citer le Dr Yoel Guzansky, s’exprimant à l’antenne de la radio de l’armée, mardi soir.
« Soit dit en passant, ce n’est pas une visite en Israël », a affirmé Guzansky, chercheur en chef à l’Institut d’études de sécurité nationale de l’Université de Tel Aviv et ex-membre du Conseil de sécurité nationale d’Israël. Biden « vient s’entretenir avec de vieilles connaissances… et rappeler le caractère inaltérable de la relation. Mais le but véritable de ce déplacement au Moyen-Orient « est l’Arabie saoudite ».
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Suivant cette analyse, le président américain y évoquera des questions cardinales pour les intérêts de son pays et tentera de persuader les Saoudiens de relever la production de pétrole – pour saper les économies russe et iranienne et, plus important encore pour un président avec des élections partisanes en novembre, baisser les prix du gaz pour les citoyens américains.
J’espère – et je crois – que le président et son équipe voient les choses un peu différemment.
J’espère et je crois qu’ils considèrent les étapes israélienne et saoudienne de ce voyage comme intimement liées et tout aussi importantes l’une que l’autre, que ce soit pour eux ou les intérêts de leurs alliés dans la région, et en particulier de leur seul partenaire démocratique dans la zone. Parce que le temps presse pour empêcher l’Iran d’atteindre la capacité nucléaire militaire. Et l’administration Biden, après avoir tenté en vain de ramener l’Iran dans le cadre de l’accord de 2015, doit de toute urgence proposer un plan B.
Sans enfreindre les dispositions imparfaites de cet accord de 2015, l’Iran a accéléré le développement de ses missiles et amélioré ses centrifugeuses d’enrichissement d’uranium.
En outre, depuis le retrait unilatéral des Etats-Unis de cet accord, orchestré à l’époque par le président Trump, l’Iran en a ouvertement violé les conditions, que ce soit en installant et en exploitant des centrifugeuses plus perfectionnées, en enrichissant de l’uranium à des niveaux supérieurs ou en en stockant des quantités toujours plus importantes. Récemment, l’Iran a même retiré les caméras de surveillance placées par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur ses principaux sites nucléaires, et notamment l’installation d’enrichissement de Natanz.
Cette dernière mesure iranienne a amené le chef de l’AIEA, Rafael Grossi, à indiquer qu’à défaut d’obtenir le rétablissement de ces cameras d’ici trois à quatre semaines, l’AIEA ne serait plus en mesure de disposer d’«informations fiables » sur le programme iranien et qu’il ne serait pas difficile « d’imaginer ce qui se passe ».
Grossi a émis cet avertissement le 9 juin, il y a environ cinq semaines. S’agissant des progrès de l’Iran en matière d’armement, sa capacité à monter une ogive nucléaire sur un missile, à l’emporter et le faire exploser « avec succès » – eh bien, c’est déjà en grande partie « ce qui se passe ».
Compte tenu de l’obsession du régime iranien pour nuire, affaiblir et au final éliminer Israël, il faut s’attendre à ce que Biden fasse ici davantage que se rappeler au bon souvenir de ses amis ou signer des déclarations, mais que lui et ses interlocuteurs israéliens redoublent encore d’efforts conjoints pour contrecarrer les ambitions nucléaires de l’Iran.
Les Saoudiens partagent grandement l’inquiétude d’Israël au sujet des aspirations prédatrices des ayatollahs, d’où leur volonté de coopérer davantage, à la fois secrètement et ouvertement, avec Israël. Nombre d’intérêts américains se trouvent significativement menacés par un Iran enhardi, au seuil de la capacité nucléaire. Les États-Unis eux-mêmes pourraient être directement menacés, dans la mesure où Téhéran s’est lancé dans une course folle pour accroître la portée de ses missiles.
Les propos très brefs qu’a tenus Biden à son arrivée, sous le soleil, à l’aéroport Ben Gurion, ne font pas mention de l’Iran. Il a rappelé l’engagement inébranlable des États-Unis envers la sécurité d’Israël, et notamment leur partenariat en matière de systèmes de défense sophistiqués. Il a également rappelé de ne « jamais, jamais, jamais » oublier les leçons de la Shoah et de ne jamais permettre que cela recommence.
C’est vrai. Israël n’a pas rassemblé sur son sol, dans cet État aux dimensions modestes, des millions de Juifs – parmi lesquels des survivants d’un peuple décimé par la Shoah – pour faire de nouveau face à un autre régime génocidaire.
Une « escale » pour renouer avec de vieux amis, avant de se mettre vraiment au travail en Arabie Saoudite ? Je ne crois pas que ce soit ainsi que l’administration Biden considère la partie israélienne du voyage du président.
Au contraire, j’espère profondément que l’occasion d’une rencontre face à face de haut niveau sera l’aboutissement d’années de travail acharné pour parvenir à un plan B afin d’arrêter la marche de l’Iran vers la bombe, si et quand tous les efforts de dissuasion seront considérés comme infructueux. Comme le disait le défunt chef du Mossad, Meir Dagan, il convient d’arrêter l’Iran quand l’épée est sur notre gorge.
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David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel