Pourquoi le tueur de Pittsburgh n’est pas poursuivi pour terrorisme
Robert Bowers devra répondre de 29 chefs d'inculpation mais il ne présente pas de liens avec un groupe terroriste identifié comme tel par le département d'Etat
Eric Cortellessa couvre la politique américaine pour le Times of Israël

WASHINGTON, DC — Selon l’ADL (Anti-Defamation League), Robert Bowers aura commis ce qui est très probablement l’attaque antisémite la plus meurtrière de l’histoire américaine lorsqu’il a ouvert le feu à l’intérieur d’une synagogue de Pittsburgh, dans la matinée de samedi, tuant 11 personnes et blessant six personnes dont quatre agents de police.
Les comptes de Bowers sur les réseaux sociaux étaient remplis de posts de haine anti-juive et de théories du complot. Il a crié : « Tous les Juifs doivent mourir ! » lorsqu’il s’est retrouvé face aux policiers après avoir perpétré le massacre.
Cette fusillade survenue à la synagogue Tree of Life a été un acte de violence antisémite politique sans précédent sur le sol américain.
Mais il ne s’agit pas d’un acte de terrorisme intérieur, selon le gouvernement américain.
Samedi après-midi, les procureurs fédéraux ont annoncé que Bowers devrait répondre de 29 chefs d’accusation – 11 pour avoir utilisé une arme à feu dans le but de commettre un meurtre et plusieurs autres pour crimes de haine, notamment pour obstruction de l’exercice des croyances religieuses entraînant la mort et pour obstruction de l’exercice des croyances religieuses ayant entraîné des blessures physiques chez un agent de la sécurité publique.

Mais la raison pour laquelle il ne devra pas répondre de terrorisme intérieur est simple – aucune charge de ce type n’existe actuellement.
« Il n’y a pas de crime fédéral appelé terrorisme intérieur », a expliqué dimanche la porte-parole du département de la Justice Sarah Isgur Flores au Times of Israel.
Alors que le Patriot Act américain, adopté en 2001 par l’administration de George W. Bush suite aux attentats du 11 septembre, comprend une définition de travail du « terrorisme intérieur », aucun crime n’a été jamais créé pour correspondre à cette désignation.
La loi décrit le terrorisme intérieur comme la tentative « d’intimider ou de forcer une population civile, d’influencer la politique d’un gouvernement par l’intimidation ou la coercition, ou d’affecter la conduite d’un gouvernement par une destruction, un assassinat ou un enlèvement de masse ».
La charge liée au terrorisme la plus commune devant les tribunaux américains est le « soutien matériel » apporté à l’une des organisations terroristes qui ont été définies comme telles par le département d’Etat. Il y a eu environ 300 poursuites de ce type de 2001 à 2011 qui ont entraîné des inculpations, en liaison avec le terrorisme jihadiste ou la sécurité nationale, selon le Centre de droit et de sécurité.
Tandis que les motivations de Bowers semblent clairement établies et prouvées par les contenus de ses comptes sur les réseaux sociaux comme par les paroles qu’il a lui-même prononcées sur les lieux du massacre, il a agi seul et non au nom d’un quelconque groupe terroriste.
Il y a eu d’autres tragédies récentes au cours desquelles un homme armé, seul, a tué des civils innocents, notamment dans des lieux de culte. Les auteurs de ces tueries n’ont pas eu à répondre de terrorisme.
Alex Fields est soupçonné d’avoir projeté sa voiture dans une foule lors d’un rassemblement nationaliste blanc à Charlottesville, en Virginie, l’année dernière, tuant une contre-manifestante. Fields doit répondre de plusieurs chefs d’inculpation pour meurtre devant l’Etat de Virginie.
Dylann Roof, pour sa part, a été condamné pour des crimes d’état et fédéraux, notamment pour crimes de haine, après avoir tué neuf Afro-américains à Charleston, dans une église de Caroline du sud au cours de l’été 2015. Il a écopé de la peine capitale.
Ni Field ni Roof n’ont été inculpés pour des charges liées au terrorisme.