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Analyse

Pourquoi Poutine offre sa médiation dans le conflit entre Israël et l’Iran?

Selon un analyste, Moscou ne souhaite pas un changement de régime à Téhéran après avoir perdu son allié en Syrie, et ses liens étroits avec la République islamique ne font pas d'elle un médiateur neutre

Le président russe Vladimir Poutine (à droite) et le président iranien Masoud Pezeshkian assistant à une cérémonie de signature au Kremlin à Moscou, en Russie, le 17 janvier 2025. (Crédit : Evgenia Novozhenina/Pool Photo via AP)
Le président russe Vladimir Poutine (à droite) et le président iranien Masoud Pezeshkian assistant à une cérémonie de signature au Kremlin à Moscou, en Russie, le 17 janvier 2025. (Crédit : Evgenia Novozhenina/Pool Photo via AP)

En se proposant comme médiateur dans la confrontation militaire entre Israël et l’Iran, Vladimir Poutine entend faire revenir Moscou sur le devant de la scène internationale et préserver Téhéran, son principal allié au Moyen-Orient, même si leur proximité pourrait contrarier ce projet, soulignent des chercheurs.

Historiquement, la Russie entretient de bonnes relations avec Israël, où vit une importante communauté russophone. Mais l’invasion russe de l’Ukraine et la guerre menée par Israël à Gaza, critiquée par Moscou, ont fragilisé leurs liens.

Les autorités russes ont rapidement condamné les frappes israéliennes contre l’Iran vendredi, puis le président russe a proposé d’endosser le rôle d’intermédiaire.

Le Kremlin a dit néanmoins « constater » mardi une « réticence » d’Israël à accepter une médiation extérieure.

Pour Nicole Grajewski, du groupe de réflexion Carnegie, Moscou a « un intérêt à désamorcer la situation ».

« La Russie ne veut pas de changement de régime en Iran, surtout s’il aboutit à un gouvernement pro-occidental qui affaiblirait le partenaire régional le plus important de Moscou depuis la guerre en Ukraine », assure cette chercheuse.

Le président russe Vladimir Poutine (à droite) avec un bouquet de fleurs et le Premier ministre Benjamin Netanyahu au Kremlin, à Moscou, le 30 janvier 2020. (Crédit : Maxim Shemetov / Pool / AFP)

Depuis son attaque contre l’Ukraine en 2022, la Russie, marginalisée en Occident, s’est largement rapproché de Téhéran.

Kiev et ses alliés accusent l’Iran d’avoir avoir fourni des drones et des missiles de courte portée au Kremlin pour son offensive. Des accusations rejetées par les autorités iraniennes.

Sous sanctions occidentales, les deux pays ont signé en janvier un traité de partenariat stratégique global, visant à renforcer leurs liens, notamment une « coopération militaire », qui n’est toutefois pas un pacte de défense mutuelle comme celui liant Moscou à la Corée du Nord.

« Pas un médiateur objectif »

Au niveau régional notamment, la Russie a « tout intérêt » à proposer cette médiation, complète Tatiana Kastouéva-Jean, de l’Institut français des relations internationales (Ifri).

« Le changement du régime en Syrie lui a aussi fait perdre des points », assure cette chercheuse, le Kremlin ayant soutenu, comme l’Iran, l’ex-président syrien Bachar al-Assad, renversé en décembre.

Par le passé, la Russie était déjà « sortie de l’isolement international » provoqué par son annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée en 2014, « en se rendant incontournable dans la région », rappelle Mme Kastouéva-Jean.

Le Kremlin était notamment intervenu militairement en Syrie en 2015, sauvant alors le pouvoir de Bachar al-Assad en pleine guerre civile. La même année, il avait soutenu l’accord sur le nucléaire iranien, dénoncé par Washington en 2018.

Le président russe Vladimir Poutine (à droite) serrant la main de son homologue syrien Bashar el-Assad lors de leur rencontre au Kremlin, à Moscou, le 24 juillet 2024. (Crédit : Valery Sharifulin/Pool/AFP/File)

Mais cette alliance avec Téhéran pourrait aussi l’éliminer comme intermédiaire dans le conflit.

Pour l’analyste russe Konstantin Kalachev, une telle médiation « n’inspirerait pas la confiance en Europe, ni en Israël », Moscou étant « perçu comme l’allié de l’Iran ».

Cette proposition a en effet été accueillie froidement par l’Union européenne: « La Russie ne peut pas être un médiateur objectif », a affirmé lundi un porte-parole de la Commission européenne, Anouar El Anouni.

« Au Kremlin qui voudrait faire la paix au Proche-Orient: commencez par l’Ukraine », a raillé mardi le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot.

« ‘Séduire Trump' »

De l’autre côté de l’Atlantique, Donald Trump, qui a initié un rapprochement spectaculaire avec Vladimir Poutine depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, s’est, au contraire, dit « ouvert » à cette suggestion.

« La Russie cherche à ‘séduire’ Trump sur les sujets qui dépassent l’Ukraine », estime Tatiana Kastouéva-Jean.

Le président américain Donald Trump (à gauche) et le président russe Vladimir Poutine se serrant la main avant d’assister à une conférence de presse conjointe après une réunion, au palais présidentiel d’Helsinki, le 16 juillet 2018. (Crédit : Yuri Kadobno/AFP Photo)

Le président américain, qui avait promis de régler la guerre en Ukraine en « 24h », a semblé se mettre en retrait de ce conflit ces dernières semaines, à l’heure où les négociations entre Kiev et Moscou sont dans l’impasse.

Début juin, le chef d’Etat russe disait déjà à son homologue américain vouloir « contribuer à la résolution » du différend entre Washington et Téhéran sur le nucléaire iranien.

Ce dossier est au cœur de l’affrontement en cours, l’objectif affiché des frappes d’Israël, allié des Etats-Unis, étant d’empêcher l’Iran de se doter de la bombe atomique, ambition niée par Téhéran.

« En se positionnant en intermédiaire indispensable », Moscou pourrait, le cas échéant, utiliser ce statut « pour exiger un allégement des sanctions, une reconnaissance diplomatique de ses revendications territoriales ou encore faire accepter son comportement en Ukraine », analyse Nicole Grajewski.

Si Moscou endosse le rôle de médiateur, cela « légitimerait la Russie en tant que grande puissance indispensable à un moment où elle mène la plus grande guerre d’agression sur le sol européen depuis la Seconde Guerre mondiale », déplore Anna Borshchevskaya, du groupe de réflexion Washington Institute.

Pour le chercheur russe Konstantin Kalachev, cela serait une « mauvaise nouvelle » pour l’Ukraine et l’Europe, avec un « changement d’attention » de la communauté internationale.

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