Un tribunal reconnait toutes les conversions au judaïsme en Israël, une première
Une nouvelle décision établit que le fait de devenir juif même en dehors des auspices du rabbinat d'Etat donne droit à être inscrit comme tel à l'état civil
Dans une décision révolutionnaire, un tribunal a statué jeudi qu’une personne qui s’est convertie en Israël en dehors des auspices du rabbinat de l’Etat peut être reconnue comme juive.
La femme mentionnée dans le jugement était l’une des centaines de femmes qui se sont converties au judaïsme par l’intermédiaire de l’organisation Giyur Kahalacha, qui fonctionne indépendamment du grand rabbinat. Jusqu’à l’ouverture de cette organisation, le rabbinat était le seul organe autorisé à effectuer des conversions en Israël et seuls ses convertis étaient considérés juifs par la loi.
Le juge Aaron Farkash du tribunal du district de Jérusalem a écrit dans sa décision : « Étant donné que la personne s’est convertie, elle devrait être inscrite comme juive dans les registres de l’état civil. »
Le rabbin Seth Farber, directeur de l’organisation ITIM, qui a intenté l’action en justice, s’est félicité de cette décision, affirmant qu’elle « non seulement donne une légitimité et un statut aux tribunaux Giyur Kahalacha mais ouvre aussi la porte aux milliers de jeunes familles qui souhaitent rejoindre pleinement le peuple juif et exercer leurs droits en Israël comme les autres Juifs ».
Il a indiqué que, bien que le tribunal privé soit orthodoxe, il n’insistait pas pour que les convertis s’engagent à respecter pleinement la loi juive.
« La décision de la Cour ouvre la voie à des milliers de personnes qui réclament que la reconnaissance de l’État s’applique à Giyur Kahalacha, » a ajouté Farber.
La décision ne concerne que le statut juridique de la femme. La conversion ne signifie pas nécessairement qu’elle serait reconnue aux fins du statut juif par le rabbinat, qui supervise tous les événements du cycle de vie, dont le mariage, le divorce et les enterrements.
La décision de jeudi fait suite à une décision de la Cour suprême de mars 2016 selon laquelle les non-Israéliens convertis en Israël par des tribunaux rabbiniques orthodoxes privés en dehors du grand rabbinat israélien pouvaient demander la citoyenneté israélienne.
Dans la décision de la présidente de l’époque, Miriam Naor, elle écrivait que, du moins à des fins civiles laïques, le grand rabbinat d’Israël ne peut être le seul organisme de conversion reconnu.
Cependant, immédiatement après cette décision historique, les partis orthodoxes de la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu ont entamé de nouvelles tentatives pour légiférer et de réglementer de la conversion sous les seules auspices de l’État. Le Premier ministre a nommé l’ancien ministre de la Justice Moshe Nissim à la tête d’une commission chargée de faire des recommandations sur la question, mais après des mois de retard, la commission a été gelée.
Fin août, en raison des longs retards du comité, le bureau du procureur de l’État a déclaré qu’il n’avait aucune objection à la décision du tribunal sur la question de savoir si les convertis pouvaient être inscrits comme juifs.
Les tribunaux rabbiniques de Giyur Kahalacha, qui suivent les préceptes de la loi juive, ont été fondés par Farber avec de nombreux grands noms de l’orthodoxie moderne – les rabbins Shlomo Riskin, Nachum Rabinovitch de Maale Adumim, Haim Amsalem, Reem HaCohen, David Stav, chef du mouvement rabbinique Tzohar et le professeur Benjamin Ish-Shalom, fondateur du programme de conversion Nativ de l’armée israélienne, qui accueille chaque année quelque 850 personnes converties.
La députée Aliza Lavie (Yesh Atid) a salué cette décision.
« Cette décision était le résultat inévitable d’une réalité de longue date dans laquelle l’État avait complètement abandonné le système des conversions sans apporter aucune solution », a-t-elle dit dans un communiqué.
Mme Lavie a expliqué que des centaines de milliers de personnes vivant en Israël ont des origines juives et sont liées au judaïsme, mais que leur statut de juif n’est pas reconnu par l’État.
« Ce n’est pas seulement une question de loi religieuse », a-t-elle ajouté. « Il s’agit d’une question sociale nationale de la plus haute importance, qui a un impact sur l’identité et l’avenir de notre société et définit qui nous sommes. »