Qatargate : Les suspects en détention sont Urich et Feldstein, deux collaborateurs de Netanyahu
Feldstein a déjà été mis en examen pour avoir divulgué des documents volés à des médias allemands ; Urich aurait fait un travail de relations publiques pour l'État du Golfe avant la Coupe du monde 2022

Les autorités israéliennes ont approuvé vendredi la diffusion des noms des deux suspects travaillant pour le Premier ministre Benjamin Netanyahu qui ont été placés en détention en vue d’un interrogatoire dans le cadre d’une enquête en cours menée par la police et par le Shin Bet sur les liens présumés qui uniraient le bureau du Premier ministre au Qatar.
Les suspects – qui ont été arrêtés sur la base de soupçons de contact avec un agent étranger et qui pourraient aussi être mis en cause pour fraude, blanchiment d’argent et corruption – sont Yonatan Urich et Eli Feldstein.
La levée de l’embargo placé sur leur identité intervient alors que Netanyahu cherche à limoger le chef du Shin Bet, Ronen Bar, qui a affirmé en retour que ce renvoi visait, en partie, à saper l’enquête lancée sur le scandale du « Qatargate ».
Des informations plus détaillées, concernant l’enquête, sont interdites à la publication suite à un embargo imposé par le tribunal et qui restera en vigueur jusqu’au 10 avril.
Les investigations avaient été lancées après qu’il a été révélé que Feldstein, ex-porte-parole de Netanyahu, travaillait pour le Qatar par l’intermédiaire d’une société internationale chargée par Doha d’alimenter les journalistes israéliens en articles favorables à cet État du Golfe, alors même qu’il était employé par le bureau du Premier ministre.
Mercredi, la chaîne publique Kan a diffusé des enregistrements de l’homme d’affaires israélien Gil Birger où ce dernier affirmait qu’il avait acheminé de l’argent qu’il avait remis à Feldstein, des fonds provenant d’un lobbyiste qatari.
Kan a noté dans son reportage que – pendant au moins une partie de la période passée par Feldstein auprès de Netanyahu – l’assistant n’avait pas reçu de salaire direct de la part du bureau du Premier ministre parce qu’il n’avait pas obtenu d’habilitation de sécurité.
Des sources proches de Birger et de sa société holding, qui se sont exprimées sous couvert d’anonymat auprès de la Treizième chaîne, ont affirmé que les paiements avaient été transférés à Feldstein sans que l’homme d’affaires ne sache que Feldstein travaillait au bureau du Premier ministre.

Dans l’enregistrement, Birger affirme également que le service rendu par Feldstein était en lien avec la question des otages. Le Qatar a joué un rôle de médiation déterminant entre Israël et le Hamas.
Selon la chaîne d’information N12, les avocats de Feldstein ont indiqué que l’argent que Feldstein avait reçu de Birger correspondait à des services qu’il avait fournis « pour le bureau du Premier ministre, et non pour le Qatar ». Ils ont affirmé que l’argent versé à leur client était une « solution temporaire et partielle apportée par des personnes du bureau du Premier ministre » à un « problème qui s’est posé concernant son salaire » – sans pour autant préciser quel était le problème qui avait nécessité le paiement du salaire de Feldstein par des sources extérieures au gouvernement.
Le reportage diffusé par N12 a également ajouté que les déclarations de l’équipe chargée de la défense de Feldstein laissaient entendre que l’idée de payer Feldstein par l’intermédiaire de la société de relations publiques financée par Doha avait été une idée d’Urich, et que leur client n’avait aucune connaissance des liens qui existaient entre cet argent et le Qatar. « En d’autres termes, les représentants de Feldstein rejettent aujourd’hui la responsabilité sur le bureau du Premier ministre et, selon cet argument, les Qataris, par l’intermédiaire du lobbyiste américain Jay Footlik, ont financé l’emploi d’un porte-parole militaire du Premier ministre israélien en temps de guerre ».
Réagissant à la mention de son nom, les avocats d’Urich ont nié son implication dans l’affaire et ils ont affirmé que leur client « n’a aucune idée de qui est Gil Birger ».
Feldstein a d’ores et déjà été mis en examen au mois de novembre pour atteinte à la sécurité nationale dans une affaire qui porte sur le vol de documents militaires classifiés – l’un d’entre eux avait ultérieurement fuité auprès du quotidien allemand Bild. Lui, Urich et un autre collaborateur de Netanyahu, Yisrael Einhorn, seraient les principaux suspects dans cette affaire de sécurité nationale. Tous nient avoir commis des actes répréhensibles, tout comme c’est le cas également du bureau de Netanyahu.
Le site d’information Walla a fait savoir mercredi que Feldstein avait discuté avec Netanyahu de la transmission du document militaire à Bild à au moins deux reprises.

Les procureurs accusent Feldstein d’avoir divulgué le document dans le but d’influencer l’opinion publique, qui s’était retournée contre Netanyahu après l’assassinat en captivité de six otages israéliens – Hersh Goldberg-Polin, Ori Danino, Eden Yerushalmi, Almog Sarusi, Alexander Lobanov et Carmel Gat – à la fin du mois d’août.
Au mois de novembre dernier, il avait été rapporté qu’Urich et Einhorn avaient effectué des travaux de relations publiques pour le Qatar en vue de la Coupe du monde de 2022 dans ce pays.
Fin février, la procureure-générale Gali Baharav-Miara a ordonné l’ouverture de l’enquête sur le « Qatargate », qui est menée par l’unité des crimes majeurs Lahav 433 de la police, en collaboration avec l’agence de sécurité du Shin Bet.
Lorsque Netanyahu a annoncé, le week-end dernier, son intention de limoger le chef du Shin Bet, Ronen Bar, l’opposition et les responsables de la société civile ont accusé le Premier ministre de prendre cette initiative dans l’objectif de faire échouer l’enquête. Netanyahu a répliqué en affirmant que les investigations avaient été lancées dans le but de protéger Bar.
Un reportage diffusé, au début du mois, par la Treizième chaîne a affirmé que des centaines de milliers de dollars avaient été acheminés depuis le Qatar à destination de divers collaborateurs de Netanyahu, par le biais de plusieurs intermédiaires. Les enquêteurs auraient été surpris par les sommes transférées.