Quand Londres refusait d’indemniser un héros de « La grande évasion »
Le ministère des Affaires étrangères a estimé que Bertram "Jimmy" James n'a pas subi de traitement "inhumain et dégradant"
Un des héros de « La grande évasion », épisode épique de la Seconde Guerre mondiale, s’était vu, dans un premier temps, refuser une compensation par le gouvernement britannique au motif qu’il n’avait pas assez souffert, révèle jeudi un document déclassifié des archives nationales.
Le lieutenant britannique Bertram « Jimmy » James faisait partie du groupe de prisonniers qui avait tenté de s’évader, le 24 mars 1944, du camp Stalag Luft III de Sagan, dans l’actuelle Pologne, en empruntant des tunnels, une opération immortalisée par le film « La Grande Evasion » (1963) avec Steve McQueen.
Au total, 76 prisonniers avaient pu sortir, mais 73 d’entre eux avaient été recapturés, dont le lieutenant James, et 50 fusillés sur ordre d’Hitler.
Bertram James avait lui été transféré au camp de concentration de Sachsenhausen, au nord de Berlin. « On m’a mis à l’isolement pendant cinq mois, de même que quatre autres officiers britanniques », raconte-t-il dans un document rendu public par les archives nationales.
« Durant tout ce temps, j’étais sous la menace d’être exécuté ce qui, peut-on dire, est pour le moins perturbant », ajoute-t-il.
Une vingtaine d’années après sa libération, le lieutenant James adresse au gouvernement britannique une demande d’indemnité, mais se voit adresser une fin de non-recevoir.
« Votre dossier a été étudié très attentivement mais j’ai le regret de vous annoncer que votre demande ne peut pas être validée », lui répond en août 1965 le ministère des Affaires étrangères.
Raison invoquée : le militaire n’a pas subi le traitement « inhumain et dégradant d’un véritable camp de concentration ».
« Déçu », l’officier prend alors la plume pour relater, dans une réponse détaillée au gouvernement, comment il a été interrogé et torturé au cours de sa détention.
Mais las, l’administration reste inflexible et souligne à nouveau que sa détention n’a « en rien été comparable » à celles des prisonniers des camps de la mort.
Il faudra attendre qu’une enquête parlementaire décide en 1968 d’indemniser les survivants de Sachsenhausen pour qu’il reçoive finalement 1 192 livres, soit l’équivalent de 18 500 livres (environ 23 400 euros) aujourd’hui.
L’histoire du lieutenant James fait partie des centaines de dossiers d’indemnisation déposés par les victimes des persécutions nazies et leurs familles rendus publiques par les archives nationales, qui doit encore en déclassifier plus de 3 000 d’ici le printemps 2017.
Après la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement britannique avait accepté 1 015 demandes de compensation sur les quelque 4 000 formulées au total.