Qui est l’Israélienne qui a aidé à décrédibiliser les victimes de Weinstein ?
Dans un entretien accordé à la Douzième chaîne, Stella Penn Pechanac a déclaré qu'elle cherchait seulement à trouver la vérité quand elle travaillait pour Black Cube

L’agent, qui a trompé au moins une des accusatrices d’Harvey Weinstein afin d’étouffer les accusations d’agression sexuelle qui pèsent sur le producteur d’Hollywood maintenant tombé en disgrâce, s’est exprimée publiquement pour la première fois, affirmant qu’elle essayait seulement de découvrir la vérité.
Vendredi, la Douzième chaîne d’Israël a diffusé des extraits d’un entretien avec Stella Penn Pechanac, une ancienne employée de la société Black Cube, l’entreprise israélienne privée de renseignements que Weinstein a engagée pour étouffer des accusations selon lesquelles il aurait harcelé et agressé sexuellement des dizaines de femmes.
En 2017, le Daily Mail a identifié Pechanac comme la femme qui s’est présentée à l’une des principales accusatrices de Weinstein, l’actrice Rose McGowan, en utilisant le faux nom de Diana Filip, et en prétendant être une militante des droits des femmes travaillant pour une entreprise d’investissement basée à Londres.
Pechanac a rencontré McGowan à plusieurs reprises pour déterminer si l’actrice prévoyait de parler publiquement de ses accusations de viol contre Weinstein, et elle a même obtenu le manuscrit non publié des mémoires de l’actrice.
Dans l’interview, on a demandé à Pechanac si elle se sentait à l’aise de tromper une victime présumée d’une agression sexuelle au nom de son agresseur présumé.
« Je n’allais pas seulement la voir elle, je suis toujours très à l’aise quand j’entre en contact avec des gens afin d’essayer de découvrir la vérité, a-t-elle dit. Mon objectif est de découvrir si quelqu’un organisait une campagne négative contre Weinstein, et si c’était le cas, qui se cachait derrière ».

Elle avait aussi souligné qu’à l’époque beaucoup des accusations portées contre Weinstein n’étaient pas sorties.
« A l’époque, il n’était pas vraiment un monstre. Il n’était pas l’homme que l’on connaît maintenant », a-t-elle dit.
L’ancien Premier ministre Ehud Barak a reconnu avoir fait le lien entre Weinstein et Black Cube, même s’il a dit qu’il ne savait pas pourquoi Weinstein était intéressé par les services de l’entreprise.
« Quand un ancien Premier ministre vous met en contact avec un homme très puissant qui vous regarde dans les yeux et qui vous dit qu’il ‘n’y a rien dans ces accusations, on m’attaque et j’ai besoin de votre aide’ – alors je suis partie à la recherche de la vérité », a-t-elle dit.
Le New Yorker a révélé que Weinstein a employé Black Cube pour
1,3 million de dollars afin de mettre un terme à la publication d’accusations d’abus sexuels à son encontre.

L’article a expliqué que, sur une période d’un an, l’entreprise basée à Tel Aviv a travaillé pour Weinstein.
Des agents de Black Cube ont ciblé des dizaines d’individus pour collecter des données personnelles à leur sujet, y compris leurs passés sexuels, afin d’éviter qu’ils accusent publiquement Weinstein d’harcèlements ou d’agressions sexuelles.
Plus de 15 procès ont été déposés contre Weinstein pour des comportements inappropriés. Weinstein est aussi poursuivi de charges criminelles à New York pour viol et pour avoir imposé des rapports sexuels. Son procès devrait commencer en septembre.
Weinstein nie toutes accusations de rapport sexuel non consenti.
Selon des précédents articles, lors de sa rencontre avec McGowan, Pechanac a affirmé travailler pour une entreprise basée à Londres, Reuben Capital Partners. L’entreprise fictive se présentait comme « l’un des plus importants fournisseurs du Royaume-Uni de services de gestion d’investissement aux personnalités, fondations et organisations de charité aisées », selon une version cachée de son site internet qui n’est plus en ligne.
Le site maintenant disparu avait aussi une section dédiée aux « Femmes en Focus », une initiative ostensiblement dédiée à « combattre toutes les formes de discrimination contre les femmes sur le lieu de travail, mais aussi pour promouvoir l’inclusion des femmes dans les affaires – activement et à tous les niveaux ».

L’adresse présentée pour le siège de Ruben Capital Partners à Londres est un centre d’une entreprise de location de bureaux.
La seule référence à Pechanac en ligne est une courte biographie de son implication dans une initiative éducative pour trouver des emplois. Pechanac aurait immigré en Israël en 1994 depuis Sarajevo dans l’ex-Yougoslavie.
Elle a servi comme lieutenant dans l’armée de l’Air israélienne. Elle est diplômée du Centre interdisciplinaire Herzliya mais aussi de la prestigieuse école de comédie Nissan Nativ. Elle parle serbo-croate, hébreu, anglais et l’espagnol couramment. Elle habite actuellement à Jaffa avec son mari qu’elle a épousé en 2014.
Avant d’immigrer en Israël pendant la guerre de Bosnie, la famille de Pechanac s’est convertie au judaïsme. Pendant la Shoah, ses grands-parents ont caché des Juifs dans leur maison de Sarajevo, qui était située juste en face du quartier général de la gestapo de Yougoslavie.
Grâce à des contacts, les Pechanac ont fabriqué des documents d’identité chrétienne à des dizaines des Juifs qui ont fui en Italie ou en Palestine.
Son grand-père a été envoyé en prison pour cette activité, puis il est parti dans un camp de concentration où il a été tué. En 1985, le mémorial Yad Vashem de la Shoah a honoré les Pechanac comme étant des « Justes parmi la nation ».
Près d’une décennie plus tard, en plein conflit bosniaque, Israël a évacué les Pechanac dans le dernier convoi de Juifs sortis de la ville déchirée par la guerre.