Qui vend les meilleurs falafels de Paris ?
L'As du Falafel ou Mi-Va-Mi ? Bataille rangée entre les deux restaurants rivaux de la rue des Rosiers

PARIS (JTA) – Sur un trottoir bondé de la capitale française, Yomi Peretz échange des blagues et des tapes dans le dos avec les clients qui attendent sous la pluie, dans la queue longue de 20 mètres, de pouvoir entrer dans son magasin de fallafels.
Cette interaction amicale vient naturellement à Peretz, grand enthousiaste de boxe et de poker qui possède et dirige l’As du falafel, l’un des restaurants les plus connus de Paris. Mais travailler le public a aussi un but commercial.
« Je le fais pour garder le moral dans la queue », a déclaré Peretz un jeudi récent. « Ils peuvent attendre ici pour 20 à 30 minutes et s’ils perdent espoir, ils s’en vont. »
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Ouvert en 1979 par ses parents dans le vieux quartier juif du Marais, l’As du Falafel est une institution, distinguée par sa réputation internationale et son certificat de casheroute. C’est un incontournable du Marais, parce qu’il est cité dans les guides de voyages et a d’innombrables critiques dans les médias locaux et internationaux, y compris dans le New York Times, qui a écrit sur le restaurant de Peretz en 2006.
L’As est si plein qu’il y a deux queues : pour emporter, et pour s’asseoir.
Mais cette incontestable popularité ne suffit pas à Peretz. Ces dernières années, l’As a joué durement contre un concurrent plus petit, Mi-Va-Mi, de l’autre côté de la rue des Rosiers. Depuis son ouverture en 1998, Mi-Va-Mi s’est battu dans l’ombre de l’As. Sa propriétaire, Martine Ouaknine, a décidé d’ouvrir le Shabbat et a donc perdu son certificat de casheroute. Et Peretz a récemment acheté les murs de Mi-Va-Mi, et refuse de prolonger son bail après le mois de juillet. Ouaknine se bat contre son expulsion.
Mi-Va-Mi a porté l’affaire devant le tribunal administratif de Paris pour pouvoir rester, citant son historique de 18 ans à cette adresse, et les lois conçues pour protéger les commerces d’une prise de contrôle hostile.
« Ils ne se débarrasseront pas de nous si facilement », a déclaré Ouaknine, s’adressant à un visiteur de son restaurant à moitié vide en désignant la queue devant l’As du Falafel, de l’autre côté de la rue. « C’est une lutte, mais ce n’est pas pour les clients. Nous nous battons pour survivre, ils se battent pour se débarrasser de nous juste pour le plaisir. Nous ne sommes clairement pas une menace pour eux. »
L’examen de l’affaire est en cours.

Peretz a refusé de discuter des détails du combat de Mi-Va-Mi.
« Un concurrent en bas de la rue, vous pouvez vivre avec, a-t-il déclaré. Mais un concurrent juste devant vous, c’est ennuyeux. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’il n’y a pas de guerre. Nous sommes trop occupés à travailler ici. »
Peretz interrompt l’interview pour demander à deux jeunes filles marchant dans la rue si elles veulent déjeuner au restaurant. Quand elles répondent qu’elles ont déjà mangé, il leur assure que leurs silhouettes sont « assez splendides pour vous permettre un deuxième déjeuner », mais elles s’éloignent en riant.
« Je devrais porter un nez rouge de clown avec toutes les bêtises que je fais ici », remarque-t-il en souriant. Mais Peretz attribue la popularité de son restaurant non à son humour ou à ses relations publiques, mais à un « mélange secret d’épices, que nous achetons en Israël et mélangeons ici. »
Parmi les restaurants cashers du Marais, le succès de l’As est surprenant. Accueillant autrefois des milliers de juifs ashkénazes, le Marais, dans le 4e arrondissement, comptait à cette époque des dizaines de restaurants et de magasins cashers. Pendant les années 1970, la plupart des habitants et des commerces juifs sont partis, encaissant les prix en hausse de l’immobilier. Ils ont été remplacés par des magasins non cashers qui peuvent tirer un plus grand profit du flot constant de touristes, en partie parce qu’ils restent ouverts à Shabbat.
L’un des restaurants s’accrochant à peine est Pizza Kosher, possédé par Moshe Benjamin Engelberg, qui est majoritairement apprécié pour ses pizzas à pâte très fine. Comme beaucoup de vendeurs de nourriture juive dans le Marais, Engelberg a déclaré qu’il compte énormément sur les touristes israéliens et américains.
« Peu de juifs français vivent ici, a-t-il dit. Ce n’est pas comme quand j’étais jeune homme et qu’il y avait quatre restaurants cashers à chaque coin. »
Mais l’As du Falafel et Mi-Va-Mi ont leurs réguliers parisiens qui ne jurent que par eux. Un amoureux de l’As a déclaré qu’il y avait « plus d’atmosphère », et un partisan de Mi-Va-Mi que son falafel « est plus léger et plus moelleux que celui de l’As. »

Pendant le coup de feu du déjeuner, des placeurs rejoignent Peretz sur le trottoir et distribuent des numéros. Et les jours particulièrement bondés, ils prennent en avance le paiement des clients qui font toujours la queue. Seuls les personnes handicapées ou âgées sont autorisées à attendre à l’intérieur, à l’abri du soleil ou de la pluie, que leur numéro soit appelé.
Les murs du restaurant bondé portent les photos des célébrités venues à l’As. La liste comprend Lenny Kravitz, Benjamin Netanyahu, et Natalie Portman, ancienne habituée, qui vient toujours quand elle est à Paris avec Benjamin Millepied, son mari français.
A l’intérieur de l’As, on trouve 12 à 15 tables, si proches les unes des autres que les serveurs doivent lever les bras pour passer entre elles. L’addition arrive sans être demandée après 20 minutes. Et, de manière surprenante pour un restaurant français, on ne propose ni dessert ni café.
« Tout ce cirque est en fait assez agaçant », a déclaré Henry Sultan, juif parisien venu à l’As avec sa mère de 75 ans, Eugénie. « Mais ma mère dit que c’est le meilleur, et le plus propre parce qu’il est casher, donc on supporte. »
A Mi-Va-Mi, l’atmosphère est fondamentalement différente. Ouaknine, femme à la voix douce et légèrement introvertie, explique patiemment à un client pourquoi certains falafels sont verts à l’intérieur – la variété libanaise, la spécialité de Mi-Va-Mi – et pourquoi d’autres, comme les égyptiens, sont jaunes, comme à l’As.
« Le nôtre a une atmosphère familiale, et nous resterons ici tant qu’il y aura de la demande pour ça », a-t-elle souligné.
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