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Inside Story

Ramadan : les US craignent que Ben Gvir attise les tensions sur le mont du Temple

Réclamant une trêve pour le début du mois sacré musulman, l'administration craint qu'une visite du ministre d'extrême-droite, en cette période délicate, ne dégénère en conflit plus large à Jérusalem

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir visitant le mont du Temple le jour de Tisha BeAv, le 27 juillet 2023. (Crédit : Administration du mont du Temple)
Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir visitant le mont du Temple le jour de Tisha BeAv, le 27 juillet 2023. (Crédit : Administration du mont du Temple)

L’administration Biden est très inquiète à l’idée que le ministre de la Sécurité nationale d’extrême-droite, Itamar Ben-Gvir, ne tente d’attiser les tensions sur le mont du Temple pendant le Ramadan, le mois prochain – Washington craint ainsi que la question particulièrement sensible de Jérusalem ne soit traînée de force dans le conflit actuel au Moyen-Orient, un conflit que les États-Unis tentent de contenir, ont expliqué un responsable américain et un responsable israélien au Times of Israel, mardi.

Les États-Unis redoutent une nouvelle visite de Ben Gvir sur le mont du Temple pendant le mois du Ramadan qui commencera, cette année, aux alentours du 10 mars, ont confié les deux hommes qui se sont exprimés sous couvert d’anonymat.

Le député provocateur s’est rendu sur le site à trois reprises depuis qu’il a été nommé ministre, au mois de décembre 2022. A chacune de ces occasions, il s’est s’attiré les foudres des alliés d’Israël dans le monde entier qui considèrent qu’une telle initiative prise par un politicien connu pour appeler au renversement du statu-quo fragile mis en place sur le mont du Temple s’apparente à une provocation.

Selon ce statu quo – un arrangement qui prévaut depuis des décennies et qui a été mis en vigueur en coopération avec la Jordanie – les Juifs et les autres non-musulmans sont autorisés à entrer sur le mont du Temple à des horaires précis et il leur est interdit d’y prier.

Ces dernières années, un nombre record de Juifs issus du mouvement nationaliste religieux s’y sont rendus et un grand nombre y prié, la police détournant le regard face à cette violation claire du statu-quo. Ce qui a entraîné la colère des Palestiniens et des musulmans, plus largement, qui considèrent que ces efforts entrent dans le cadre d’un projet plus large qui a pour objectif de réduire leur présence dans le complexe, qui est le lieu le plus saint du Judaïsme (il accueillait, dans le passé, les deux Temples bibliques) et le troisième sanctuaire le plus sacré de l’Islam.

Des inquiétudes qui grimpent en flèche, chaque année, pendant le mois de jeûne islamique, lorsque les visiteurs musulmans sont bien plus nombreux sur le mont – avec parmi eux certains individus connus pour leurs affrontements avec la police.

Les préoccupations sont encore plus profondes, cette année, en raison de la guerre qui oppose actuellement Israël et le Hamas dans la bande de Gaza – une guerre qui avait été déclenchée par l’assaut meurtrier commis par le groupe terroriste sur le sol israélien, le 7 octobre, qui avait fait 1 200 morts. Les hommes armés avaient aussi kidnappé 253 personnes, prises en otage au sein de l’enclave côtière. Le Hamas avait nommé son attaque « l’Opération al-Aqsa », ce qui est le nom de la mosquée qui se dresse sur le mont du Temple, et les groupes terroristes soutenus par l’Iran qui ont été amenés à rejoindre le conflit, dans d’autres pays, font aussi référence à Jérusalem dans les messages qu’ils transmettent.

Ministre en charge de la police, Ben Gvir assume un rôle déterminant dans le maintien de l’ordre sur le site et Washington s’inquiète – comme c’est le cas également de l’establishment sécuritaire israélien – que des directives venues du sommet de la hiérarchie ne donnent pour instruction aux agents de réprimer trop fortement les agitateurs ou d’entrer dans la mosquée Al-Aqsa pour étouffer des violences. Ce qui viendrait immanquablement attiser les tensions, embrasant Jérusalem, la Cisjordanie et même au-delà, a confié l’officiel israélien.

Des enfants se tiennent au sommet d’une petite colline près de tentes dans un abri de fortune pour les Palestiniens qui ont fui à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 30 janvier 2024, dans le cadre du conflit entre Israël et le Hamas. (Crédit : Mahmoud Hams / AFP)

Au cours des trois dernières années, les responsables de l’administration Biden ont tiré la sonnette d’alarme avant le Ramadan, exhortant Jérusalem à prendre des initiatives pour calmer les crispations par crainte d’une explosion dans la ville, comme cela avait été le cas, au mois de mai 2021, quand les tirs de roquette du Hamas visant Jérusalem avaient été à l’origine du dernier conflit qui avait opposé Israël au groupe terroriste au pouvoir à Gaza.

Les officiels américains avaient salué le gouvernement de Netanyahu, l’année dernière, quand le Premier ministre avait dénoncé l’appel lancé par Ben Gvir qui demandait alors que les visiteurs juifs puissent se rendre sur le mont du Temple pendant les dix derniers jours du Ramadan – ce qui aurait été une violation de la politique mise en œuvre par Israël depuis longtemps.

Les préoccupations avaient été d’autant plus fortes, ces dernières années, que Ramadan chevauchait la fête de Pessah, qui est une période où le nombre de visiteurs juifs augmente traditionnellement sur le mont du Temple. Cette année, Pessah aura lieu plusieurs semaines après la fin du mois sacré musulman.

Ben Gvir était allé sur le mont du Temple pour la dernière fois au mois de juillet dernier, pendant la fête de Tisha BeAv – Bahreïn avait alors décidé de reporter le voyage que devait faire à Manama Eli Cohen, qui était, à l’époque, le ministre des Affaires étrangères.

L’ultra-nationaliste avait aussi cherché à se rendre sur le site pendant la saison des Grandes fêtes juives, à l’automne dernier, mais le chef du Shin Bet, Ronen Bar, l’avait apparemment dissuadé de le faire.

Ben Gvir s’est engagé à continuer à aller sur le mont du Temple et il a appelé de plus en plus fort le gouvernement à adopter une approche moins conciliante pendant la guerre – ce qui a permis au parti d’extrême-droite qu’il dirige, Otzma Yehudit, de grimper dans de nombreux sondages.

Des policiers arrêtant un Palestinien dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa à la suite des affrontements qui ont éclaté pendant le ramadan, à Jérusalem, le 5 avril 2023. (Crédit : Ahmad Gharabli/AFP)

De la même manière, les responsables américain et israélien qui se sont entretenus avec le Times of Israel ont dit penser qu’il sera plus difficile d’imposer le silence au ministre dans la période actuelle – faisant part de leur préoccupation à ce sujet.

Des appréhensions qui expliquent en partie pourquoi l’administration Biden voudrait pouvoir mettre en place une pause humanitaire prolongée dans les combats à Gaza avant le début du Ramadan, le mois prochain, a dit l’officiel américain.

« Si on ne met pas un couvercle sur la cocotte-minute d’ici là, alors la situation deviendra encore beaucoup plus dangereuse », a-t-il continué, ajoutant que Blinken était déterminé à aborder le sujet pendant ses rencontres à Tel Aviv, mercredi.

Le bureau de Ben Gvir a refusé notre demande de commentaire pour les besoins de cet article.

Au début de la semaine, des collègues du ministre de la Sécurité nationale ont tenté de limiter les dégâts en toute hâte après la publication d’une interview accordée par Ben Gvir au Wall Street Journal où il affirmait que la prise en charge de la guerre, par l’administration Biden, profitait au Hamas et qu’une seconde administration Trump aurait été préférable pour l’État juif dans le contexte actuel.

Le fils de Ben Gvir a ensuite comparé Biden à une personne souffrant d’Alzheimer sur les réseaux sociaux. Le ministre a présenté des excuses et ordonné que la publication soit supprimée.

Des manifestants brandissant des drapeaux du Hamas après la prière du vendredi du ramadan, dans l’enceinte de la mosquée Al Aqsa, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 22 avril 2022. (Crédit : Jamal Awad/Flash90)

Le leader de l’opposition, Yair Lapid, a averti lundi que si Ben Gvir devait être autorisé à déterminer la conduite de la police sur le mont du Temple et à Jérusalem pendant le Ramadan, la ville « s’embrasera ».

« Le pays n’est pas prêt pour ça. Aucune préparation n’a été faite. Il n’y a eu aucune discussion opérationnelle et politique au niveau approprié. Nous allons tout droit à la catastrophe, à une nouvelle catastrophe », a-t-il mis en garde.

« C’est ce que veut Ben Gvir mais ce n’est pas ce dont a besoin d’État d’Israël », a-t-il continué, appelant Netanyahu à restreindre l’autorité du ministre et à désigner une équipe qui serait chargée de superviser les préparations du pays en vue de cette période sensible.

« Nous n’avions pas besoin de l’interview parue dans le Wall Street Journal pour nous souvenir que Ben Gvir est un clown dangereux qui préfère allumer des incendies plutôt que les éteindre mais, pendant le Ramadan, un tel comportement pourrait entraîner une explosion susceptible de coûter des vies humaines », a dit Lapid.

Le ministre de la Défense, Yoav Gallant, a été interrogé lundi sur l’implication de Ben Gvir dans les arrangements pris dans le cadre des prières du Ramadan sur le mont du Temple. Il a répondu : « Je m’occupe des problèmes relatifs à l’establishment de la sécurité » et il a ajouté que le ministre d’extrême-droite n’était pas un décisionnaire déterminant s’agissant des questions sécuritaires.

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