Refonte judiciaire : Herzog s’en prend aux réservistes qui refuseraient de servir
Lors d'une cérémonie, le président a exhorté les militaires à se tenir en dehors du débat politique et il a mis en garde contre toute compromission de la sécurité du pays
Le président Isaac Herzog a réprimandé les réservistes de Tsahal qui ont refusé ou menacé de refuser de faire leur devoir en signe de protestation contre le plan de réforme radicale du système judiciaire israélien. Il a exhorté les soldats, dans leur ensemble, à ne pas s’impliquer dans ce débat de manière à pouvoir se consacrer à leur mission de sécurité et de défense.
Cela fait presque six mois que les manifestants se rassemblent, toutes les semaines, pour exprimer leur opposition déterminée au programme de refonte du système israélien de la justice, qui a été temporairement gelé depuis la fin du mois de mars pour permettre des négociations de compromis entre la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu et l’opposition. Ces pourparlers sont organisés sous les auspices du bureau de Herzog.
Parmi les protestataires, des réservistes de l’armée – notamment des pilotes de l’armée de l’air qui sont généralement chargés d’importantes opérations militaires et des soldats actuellement en service. Ils ont organisé leur propre mouvement de protestation, ces derniers mois, et ils ont pris part aux rassemblements massifs qui sont organisés le samedi soir, sous l’impulsion du groupe Frères d’armes.
Prenant la parole, lundi, lors d’une cérémonie organisée pour rendre hommage aux unités de réserve, Herzog a souligné que si tous les Israéliens étaient en droit d’exprimer leur opinion, ils devaient laisser leurs convictions politiques de côté au moment où ils passaient l’uniforme.
« En tant que citoyens, les réservistes ont absolument le droit d’avoir une opinion, quelle qu’elle soit, et de manifester comme tous les citoyens en ont le droit dans le cadre d’une démocratie saine », a-t-il dit. « En tant que réservistes portant l’uniforme, le refus est inenvisageable. La sécurité d’Israël ne doit pas être mise en danger parce qu’elle fait partie de notre âme. »
Herzog a déploré « les clivages et les controverses » actuelles qui « occupent une place importante dans pratiquement tous les domaines. Dans ces journées difficiles où nos ennemis ne gardent pas le silence… vous nous rappelez encore et encore que nous n’avons qu’un seul pays, que nous n’avons qu’une seule armée qui doit rester au-dessus de toutes les controverses politiques ».
« Notre rôle, en tant que dirigeants, est de vous protéger de toutes les accusations malveillantes et nous continuerons à le faire avec joie, avec amour », a-t-il poursuivi, faisant apparemment référence aux propos durs qui ont pu être tenus par les membres de la coalition au sujet des réservistes qui ont choisi de protester de cette manière.
Le mouvement de protestation des réservistes s’était durci à un tel point que le ministre de la Défense Yoav Gallant avait appelé, au mois de mars, à mettre un terme à la campagne législative lancée par la coalition de Netanyahu à la Knesset dans le cadre de l’initiative de réforme du système judiciaire – ce qui lui avait valu d’être limogé par le Premier ministre qui devait ultérieurement le conserver à ses fonctions. Dans son discours public, Gallant avait déclaré que les inquiétudes au sein de l’armée et l’opposition au plan des soldats de refonte portaient atteinte à la force de Tsahal, mettant en conséquence en danger la sécurité de l’État.
De plus, le New York Times avait cité des responsables non-identifiés qui avaient indiqué que le chef d’état-major Herzi Halevi avait averti les leaders de la coalition que les militaires étaient susceptibles de réduire l’ampleur de certaines opérations en raison du refus de se présenter d’un grand nombre de réservistes.
Netanyahu avait finalement ordonné le gel temporaire du projet de refonte du système judiciaire pour permettre des négociations visant à trouver un compromis avec l’opposition.
Des discussions qui n’ont pas encore débouché sur des avancées et la coalition est actuellement soumise à des pressions intérieures la sommant de reprendre le programme de réforme là où il avait été abandonné, en adoptant une législation qui placerait sous le contrôle des politiques la nomination de presque tous les juges en Israël et qui réduirait l’indépendance de la Haute-cour de justice.
Les factions de l’opposition qui prennent part aux pourparlers ont, de la même manière, été appelées à s’en retirer par d’autres partis issus de ses rangs qui accusent le gouvernement de mauvaise foi.
Lundi, le chef d’Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, dont la formation n’a pas pris part aux négociations, a prédit qu’un accord pourrait émerger à la fin de la semaine mais il a juré de s’y opposer car, selon lui, il s’apparentera à une capitulation de l’opposition.
Les spéculations portant sur un possible accord se sont récemment renforcées, au vu de la querelle entourant le sujet de la commission qui est chargée de nommer les juges à leur poste au sein de l’État juif. Des changements intervenant dans la composition du panel entrent dans le cadre du plan de refonte du système israélien de la justice et les partis de l’opposition considèrent qu’il est crucial d’empêcher le gouvernement de prendre le contrôle de la Commission.
Alors que le gouvernement estime que le projet de réforme est déterminant pour freiner ce qu’il considère comme un système judiciaire qui a outrepassé son autorité, les critiques déclarent qu’il ôtera à la Haute-cour sa capacité à servir de contre-pouvoir face au parlement, portant ainsi gravement atteinte à la démocratie israélienne.