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Réforme judiciaire: Herzog exhorte les négociateurs à progresser dans les débats

"C'est le moment où tout va se jouer", dit le président ; le débat devrait s'animer au mois de juin après l'adoption du budget de l'État

Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Le président Isaac Herzog lors d'une cérémonie de Yom HaAtzmaout à la résidence du président de Jérusalem, le 26 avril 2023. (Crédit :  Yonatan Sindel/Flash90)
Le président Isaac Herzog lors d'une cérémonie de Yom HaAtzmaout à la résidence du président de Jérusalem, le 26 avril 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Les négociateurs qui œuvrent actuellement à trouver un consensus transpartisan sur la réforme du système de la justice en Israël ont eu une surprise mardi, avec l’interruption des discussions à huis-clos qui sont actuellement en cours entre la coalition et l’opposition à la résidence officielle du président de la part du chef de l’État lui-même. Isaac Herzog, qui s’abstient de s’impliquer lui-même dans les pourparlers amorcés il y a six semaines, a souligné l’importance de progresser dans les débats.

« C’est le moment où tout va se jouer », a dit le président aux délégués de l’opposition et de la coalition rassemblés dans la pièce, selon son bureau.

Malgré presque deux mois de discussions en cours entre les représentants des différentes parties en lice, aucun progrès tangible n’a été enregistré, selon des sources proches des négociations.

Depuis que le ministre de la Justice, Yariv Levin, a annoncé son plan, au mois de janvier, visant à affaiblir le contrôle jusque-là exercé par les juges de la branche législative et de la branche de l’exécutif, le projet de réforme du système israélien de la justice est devenu la cible numéro un, mise en cause aux niveaux politique, économique et social. Le Premier ministre a mis en pause l’avancée des projets de loi devant le parlement à la fin du mois de mars dans un contexte de révolte sociétale pour accorder du temps à d’éventuelles négociations.

Les délégués de l’opposition et de la coalition qui prennent part aux pourparlers ont évoqué les principaux aspects du plan de refonte radical du système judiciaire israélien – le placement sous le contrôle politique ou de la coalition de la nomination des magistrats au sein de l’État juif ; la mise en place d’un mécanisme qui permet à la Knesset d’interdire le réexamen judiciaire des projets de loi adoptés par le Parlement, avec une limitation de la capacité de la Haute-cour à se prononcer sur les législations ou sur les décisions gouvernementales ; l’incapacité, pour les juges, de réexaminer les nominations des ministres et des restrictions appliquées à l’autorité des conseillers juridiques dans les ministères.

La priorité actuelle, pour Levin, est la prise de contrôle du processus de désignation des magistrats dans le pays – une désignation qui s’effectue actuellement par le biais d’une commission qui a établi un équilibre entre les votes des politiques et des professionnels s’agissant de nommer un juge à la Haute-cour. Les partis de l’opposition, de leur côté, estiment qu’une « politisation du système judiciaire » est une ligne rouge.

Le chef du parti d’unité nationale MK Benny Gantz s’exprime lors d’une réunion de faction du parti d’unité nationale à la Knesset, le 1er mai 2023. (Crédit : Yonatan SIndel/Flash90)

La Knesset devrait, le mois prochain, élire deux députés qui siègeront à la commission de sélection des juges, un panel qui ne s’est pas réuni depuis que le gouvernement de Netanyahu a pris le pouvoir, au mois de décembre. Lundi, le secrétaire de cabinet Yossi Fuchs — qui est également membre de l’équipe de négociation envoyée à la résidence du président par la coalition – a émis une menace en disant que la coalition pourrait décider d’envoyer deux de ses législateurs siéger au sein de la commission plutôt qu’un représentant sorti de ses rangs et un représentant de l’opposition, comme c’est le cas habituellement.

Des sources proches du dossier ont indiqué qu’un refus de nommer les personnalités appelées à intégrer le panel – ou celui d’élire un député de l’opposition – pourrait être un signe d’absence de volonté de trouver un compromis, menaçant les négociations.

La coalition est focalisée sur la nécessité, pour elle, de gagner en influence sur les nominations judiciaires, tandis que l’opposition est bien déterminée à déjouer toute initiative susceptible de renforcer le pouvoir des politiques sur les magistrats en exercice. Alors que le puzzle du projet de réforme judiciaire devrait être vendu sous la forme d’une enveloppe complète, négociée, les positionnements rigides adoptés par les deux parties ont entamé l’optimisme de certaines personnalités impliquées.

Et les pressions se renforcent aussi hors de l’enceinte de la résidence du président.

Lundi, l’un des artisans de la refonte judiciaire du gouvernement, le député de Hatzionout HaDatit Simcha Rothman, a fait savoir que le gouvernement pourrait faire avancer unilatéralement des changements très bientôt, sans donner davantage de détail. Le ministre de la Justice Yariv Levin aurait de son côté demandé que la prise de contrôle gouvernementale des nominations judiciaires soit approuvée d’ici la fin de la session estivale à la Knesset – fin juillet – menaçant de présenter sa démission le cas échéant.

Des manifestants contre les projets de réforme judiciaire du gouvernement, à Tel Aviv, le 13 mai 2023. (Crédit : Avshalom Sassoni/Flash90)

Ce bouleversement du système israélien de la justice devrait revenir en première ligne sur le front politique une fois que le budget de l’État sera approuvé, à la fin du mois de mai.

S’exprimant au Parlement, lundi, les chefs de l’opposition Yair Lapid et Benny Gantz ont dit tous les deux être désireux de continuer les négociations, soulignant malgré tout la nécessité de progresser dans les pourparlers et laissant entendre qu’ils pourraient les quitter en l’absence d’avancées.

Tandis qu’aucune des deux parties n’a décidé d’une échéance, les pressions politiques devraient se renforcer deux deux côtés si aucun accord ne devait être trouvé d’ici la fin de la saison estivale. Netanyahu est d’ores et déjà sommé par certains, au sein de la coalition, de procéder à une réforme de l’équilibre établi entre le système judiciaire et le système politique, ses partenaires d’extrême-droite et de droite dure étant parfaitement conscients que la coalition actuelle représente une opportunité unique de faire approuver des changements qu’ils désiraient depuis longtemps.

Le président Isaac Herzog, à droite, accordant au leader du Likud, le député Benjamin Netanyahu, le mandat de former un nouveau gouvernement, à la résidence présidentielle, à Jérusalem, le 13 novembre 2022. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

Il y a aussi des pressions au sein de l’opposition en faveur de l’abandon des négociations, et la faction Yisrael Beytenu appelé Lapid et Gantz à renoncer aux pourparlers et à ne pas apporter une légitimité à la coalition dans sa marche vers la refonte du système judiciaire. Certains groupes organisateurs du mouvement de protestation qui balaie le pays depuis 19 semaines pour dénoncer le plan de réforme ont également fait part de leur méfiance face aux pourparlers.

Amplifiant cette épreuve politique, le ministère des Finances a réduit ses prévisions de croissance économique pour 2023 et 2024 dans la journée de mardi, citant un ralentissement des revenus des impôts et une chute nette des investissements dans le secteur high-tech israélien au premier trimestre, cette année – expliquant que ces phénomènes avaient été entraînés par l’économie mondiale, dans un contexte de taux d’intérêt élevé et en partie également en raison de l’incertitude du marché face aux changements proposés dans le système israélien de la justice.

« Plus la réforme judiciaire est perçue par le marché comme portant atteinte à la force de l’indépendance des institutions de l’État, en particulier pour le système judiciaire et pour l’équilibre des pouvoirs entre les différentes autorités, ce qui renforce les inquiétudes, plus elle devrait nuire de manière significative à la croissance économique et aux activités économiques dans l’économie et en particulier, en ce qui concerne les investissements étrangers, » a écrit l’économiste en chef du ministère des Finances, Shira Greenberg, dans une note d’information macroéconomique.

Sharon Wrobel a contribué à cet article.

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