Rencontre Mogherini-Zarif à Vienne pour « finaliser » l’accord nucléaire
"Aujourd'hui, c'est un bon jour pour le peuple iranien et les sanctions seront levées", a déclaré Zarif ; Inquiétude d'Israël et des Saoudiens

La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a annoncé samedi sur Twitter qu’elle rencontrait samedi matin à Vienne le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, « pour finaliser le travail » en vue d’une mise en oeuvre de l’accord nucléaire, qui prévoit une levée des sanctions internationales contre l’Iran.
La haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, qui a présidé les négociations ayant abouti en juillet à la signature d’un accord historique entre les grandes puissances et l’Iran sur son programme nucléaire controversé, a publié deux photos de son entrevue avec M. Zarif sur le réseau social.
Le secrétaire d’Etat américain John Kerry est également attendu à Vienne samedi pour y finaliser la mise en oeuvre de ce texte qui prévoit la levée des lourdes sanctions internationales frappant Téhéran depuis une décennie.
A son arrivée dans la capitale autrichienne samedi matin, M. Zarif a estimé que les sanctions seraient levées le jour même. « Aujourd’hui, c’est un bon jour pour le peuple iranien et les sanctions seront levées », a-t-il déclaré à l’agence officielle Isna.
Outre M. Kerry et Mme Mogherini, M. Zarif doit rencontrer samedi le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Yukiya Amano, qui doit formellement attester que Téhéran a bien rempli ses engagements préalables à l’entrée en vigueur de l’accord.
L’AIEA doit pour cela attester que Téhéran a réduit comme convenu le nombre de ses centrifugeuses permettant d’enrichir de l’uranium, et envoyé à l’étranger la quasi totalité de son stock d’uranium faiblement enrichi.
En outre, les inspecteurs de l’agence doivent certifier que l’Iran a bien, comme il l’affirme, retiré le coeur du réacteur à eau lourde situé sur son site d’Arak et bétonné une partie de l’installation, de façon à ne plus pouvoir y fabriquer de plutonium de qualité militaire.
Cet accord, conclu le 14 juillet 2015 et destiné à mettre fin à plus de 13 ans de tensions dans ce dossier, est destiné à garantir la nature strictement pacifique du programme nucléaire iranien, via une réduction des capacités atomiques de Téhéran et des inspections renforcées.
En échange, l’UE, les Etats-Unis et l’ONU se sont engagées à lever de façon contrôlée et réversible les sanctions qui brident l’économie de ce pays de 77 millions d’habitants aux riches ressources pétrolières et gazières.
Les milieux économiques se tiennent prêts depuis plusieurs mois à revenir dans ce pays qui dispose des quatrièmes réserves de brut au monde, et des deuxièmes de gaz. L’Iran, un pays de l’Opep, pourra notamment exporter à nouveau librement son pétrole.
Dans ce contexte, le brut est passé sous les 30 dollars le baril vendredi, les marchés anticipant un prochain afflux de pétrole iranien sur un marché déjà en surabondance d’offre.
La levée de l’intégralité des sanctions sera échelonnée sur dix ans, et durant 15 ans les mesures pourront être automatiquement rétablies en cas de manquements de l’Iran. Les embargos de l’ONU sur les armes conventionnelles et sur les missiles balistiques sont maintenus jusqu’en 2020 et 2023 respectivement.
« Après l’entrée en application de l’accord nucléaire, le terrain est propice pour une plus grande coopération au niveau régional pour lutter contre le danger essentiel qui menace notre région, c’est-à-dire le terrorisme et l’extrémisme », a-t-il ajouté, en référence notamment à la montée en puissance dans la région des groupes jihadistes comme le groupe Etat islamique (EI).
« Nous y sommes prêts et nous espérons que les autres pays voisins et la communauté internationale sont prêts également », a-t-il ajouté.
Inquiétude d’Israël et des Saoudiens
L’accord de Vienne est aussi considéré comme l’amorce d’une réconciliation entre Washington et Téhéran, plus de 35 ans après la rupture de leurs relations diplomatiques.
Ce possible rapprochement américano-iranien met en rage les alliés traditionnels de l’Amérique dans la région – Arabie saoudite et Israël en tête – qui redoutent l’influence de la puissance chiite.
Jeudi, lors d’une rencontre à Londres, M. Kerry a tenu à rassurer son homologue saoudien Adel al-Jubeir, en soulignant que « l’amitié entre les Etats-Unis et le royaume d’Arabie saoudite (demeurait la) clé de voûte » de la politique des deux pays au Moyen-Orient.
La République islamique d’Iran a toujours nié avoir voulu se doter de l’arme atomique, tout en revendiquant son droit à exploiter une filière nucléaire complète.
L’AIEA a cependant établi en décembre que Téhéran avait bel et bien mené jusqu’en 2009 des recherches pour avoir la bombe. Washington a fait valoir que ce constat ne devait pas empêcher d’ « aller de l’avant » dans ce dossier.