Rivlin s’oppose à la vente de pièces issues du musée des Arts islamiques
Citant des pressions financières, ce musée de Jérusalem s'est tourné vers la maison de vente aux enchères Sotheby's pour vendre des pièces de sa collection - dont des montres
Le président Reuven Rivlin a appelé le pays, dimanche, à aider à empêcher la vente d’une partie de la riche collection du musée des Arts islamiques de Jérusalem quelques jours avant la mise aux enchères, au sein de la maison Sotheby’s à Londres, d’environ 200 objets précieux.
Le musée des Arts islamiques L.A. Mayer explique rencontrer des pressions financières – tout particulièrement dans le contexte de pandémie – qui l’obligent aujourd’hui à vendre ces objets sous peine de devoir définitivement fermer ses portes.
Rivlin a indiqué « suivre avec inquiétude le problème de la vente des collections du musée des Arts islamiques, avec notamment la mise aux enchères d’objets de plus grande valeur et signification que ne pourrait le laisser croire leur valeur monétaire ».
195 objets d’art islamique conservés par le musée et 60 horloges et montres de sa collection permanente devraient être présentés aux potentiels acquéreurs en date du 27 et 28 octobre, selon Sotheby’s.
La vente de ces œuvres – objets, manuscrits, couvertures et tapis – devrait, selon les estimations, rapporter un total allant de 4,13 millions de dollars à 6,1 millions de dollars au musée. Les montres, qui seront mises aux enchères au deuxième jour de la vente, atteindraient une valeur combinée allant de 2,2 millions à 3,4 millions de dollars.
Déplorant cette initiative, Rivlin a dit dans un communiqué que « nous devons trouver les moyens mis à disposition de l’Etat d’Israël, dans les sphères juridique et internationale, pour empêcher la vente de ce patrimoine culturel issu de la région toute entière ».
Rivlin a ajouté que le musée des Arts islamiques – qui se trouve au bas de la rue accueillant sa résidence officielle – ainsi que les autres musées de tout Israël « sont dépositaires du patrimoine spirituel et matériel énorme de l’Etat d’Israël et du Moyen-Orient, et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour le conserver sur le territoire israélien ».
La décision du musée de mettre ces artefacts aux enchères a entraîné la fureur des autorités archéologiques et culturelles au sein de l’Etat juif, mais aussi à l’international.
Nadim Sheiban, directeur du musée, avait confié au Times of Israël le mois dernier : « Nous avons regardé une pièce après l’autre et nous avons pris des décisions très dures… Nous ne voulions pas nuire au cœur et au prestige de ces collections. »
Sheiban, à la barre du musée qui avait été fondé par la philanthrope britannique Vera Salomons, il y a 40 ans, pour rapprocher les Juifs et les musulmans, avait expliqué avoir une première fois réfléchi à vendre certaines pièces de la collection du musée pendant la crise financière de 2017 qui avait réduit les avoirs de la fondation créée pour soutenir l’institution.
Cette décision de vendre, avait-il ajouté, s’est finalement imposée lors de l’épidémie de coronavirus.
« Nous avons craint devoir perdre le musée et de fermer définitivement ses portes », avait-il poursuivi. « Si nous n’avions pas agi maintenant, alors nous aurions dû fermer le musée d’ici cinq à sept ans. Et nous avons décidé d’agir sans attendre l’effondrement du musée. »
Ces œuvres d’art, avait souligné Sheiban, ne sont pas considérées comme un trésor national, la plus grande partie des pièces venant du monde entier et n’ayant pas été découvertes en Israël ou en Palestine. C’est cette distinction qui a permis au musée de vendre légalement certains de ces objets, l’Autorité des antiquités israélienne devant donner une autorisation si un artefact ancien devait quitter le pays.
La bienfaitrice du musée, Salomons, avait étudié les arts et l’architecture islamique, sujets qui la passionnaient. Elle avait réuni une collection de calligraphie islamique, de bijoux en filigrane, d’objets architecturaux, ajoutant par la suite un ensemble de montres de valeur qui avaient appartenu à son père, David Salomons, industriel britannique du début du 20e siècle et plus grand collectionneur mondial de montres suisses Breguet.
Environ 60 montres seront vendues lors de la deuxième journée de mise aux enchères. Il restera 160 montres de collection au musée, a précisé Sheiban.
Les plus beaux lots de cette vente de montres – trois montres à gousset Breguet – ont une provenance mythique, selon Sotheby’s. Ces trois objets présentent le génie mécanique et les inventions révolutionnaires de Breguet et incarnent le prestige d’une partie de sa clientèle – avec notamment une montre qui avait été fabriquée pour le futur roi George IV d’Angleterre (estimée entre 514 000 et 771 000 dollars) et une montre-thermomètre faite tout spécialement pour la princesse Caroline Murat, sœur de Napoléon Bonaparte (estimée entre 381 831 et 254 554 dollars).
Jessica Steinberg a contribué à cet article.