S’adressant devant le Congrès, Netanyahu n’a jamais évoqué son véritable but
Le Premier ministre croit toujours en un accord de normalisation avec Ryad, et a donc cherché à prouver au prince héritier que seul Israël pouvait rallier Démocrates et Républicains
WASHINGTON – Au cœur d’une lutte électorale américaine de plus en plus amère – et tout à fait fascinante – le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réuni des centaines de législateurs démocrates et républicains pour un discours prononcé mercredi lors d’une session conjointe spéciale du Congrès.
À première vue, le Premier ministre, observateur aguerri de la politique américaine, a semblé faire un effort conscient pour offrir à chacun des deux partis suffisamment de garanties pour qu’ils aient le sentiment que leur soutien a été apprécié et que l’autre camp n’a pas bénéficié d’un quelconque avantage.
Netanyahu a remercié le président Joe Biden à quatre reprises : pour ses « efforts inlassables » en vue de libérer les otages du groupe terroriste palestinien du Hamas, pour sa visite après le pogrom du 7 octobre, pour son amitié d’un demi-siècle en tant que « fier sioniste irlando-américain » et pour avoir réuni une coalition afin de déjouer l’attaque de drones et de missiles lancée par l’Iran contre Israël le 14 avril.
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Netanyahu a cherché à présenter l’armée israélienne qui combat le Hamas à Gaza comme une force diverse, multi-religieuse et multi-ethnique à laquelle les Démocrates pourraient plus facilement s’identifier. Il était accompagné du lieutenant Avichaïl Reuven, un Israélien éthiopien qui a couru 13 kilomètres pour rejoindre la lutte contre le Hamas le 7 octobre, et l’a présenté au cours de son discours. Le Premier ministre a également rendu hommage au sergent-chef Ashraf al-Bahiri, un soldat bédouin qui a combattu les terroristes du Hamas dans sa base et dans le kibboutz Beeri.
Netanyahu n’a pas tari d’éloges non plus sur Donald Trump, l’ancien président qui concourt pour revenir dans le bureau Ovale. Il l’a remercié d’avoir négocié les Accords d’Abraham, d’avoir reconnu la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan, d’avoir affronté l’Iran, d’avoir reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y avoir déplacé l’ambassade américaine.
Et dans un autre clin d’œil adressé aux Républicains, il a loué les membres de l’Université de Caroline du Nord qui ont protégé un drapeau américain contre des manifestants anti-Israël, et a ridiculisé les manifestants en les qualifiant de laquais de Téhéran ignorants.
Netanyahu a également cherché à présenter le combat d’Israël contre les ennemis soutenus par l’Iran comme étant avant tout celui de l’Amérique.
« Maintenant, demandez-vous », a déclaré Netanyahu, « quel pays se tient en définitive sur le chemin des plans maniaques de l’Iran visant à imposer l’islam radical au monde ? La réponse est claire : c’est l’Amérique, gardienne de la civilisation occidentale et première puissance mondiale. C’est pourquoi l’Iran considère l’Amérique comme son plus grand ennemi ».
« Le régime iranien combat l’Amérique depuis son arrivée au pouvoir », a-t-il affirmé.
Si l’audience ne doit retenir qu’une chose, a déclaré Netanyahu, c’est que « nos ennemis sont vos ennemis, notre combat est votre combat, et notre victoire sera votre victoire ».
Il a cherché à établir un lien entre l’attaque japonaise de Pearl Harbor, les attentats d’Al-Qaïda du 11 septembre et l’assaut du Hamas le 7 octobre, les qualifiant de jours « qui resteront à jamais dans l’infamie ».
Après l’attaque surprise de décembre 1941, les États-Unis se sont lancés dans une campagne de quatre ans visant à bombarder le Japon pour qu’il se rende sans condition, avant d’imposer une transformation radicale des mœurs et de la culture de la société. À la suite des détournements d’avions par Al-Qaïda en 2001, l’Amérique a renversé les régimes de deux pays et leur a imposé de nouvelles constitutions.
Si le 7 octobre est à mettre sur le même plan que les pires attaques surprises contre les États-Unis, alors la réponse d’Israël peut être comparable, a subtilement affirmé Netanyahu.
La véritable audience de Netanyahu
Si, en apparence, le discours de Netanyahu s’est appuyé sur l’histoire et les valeurs américaines ainsi que sur le soutien de ses derniers présidents, son véritable but n’a même pas été mentionnée.
Bien que la voie à suivre ait été brouillée par les massacres du Hamas, Netanyahu estime qu’un accord de normalisation avec l’Arabie saoudite est tout à fait réalisable.
Les Saoudiens ont insisté sur le fait que tout processus de normalisation doit inclure une voie vers un État palestinien, mais Netanyahu est convaincu que le prince héritier Mohammed ben Salmane, connu sous le nom de MBS, sait que son intérêt principal – affronter son ennemi juré, l’Iran – dépendait d’un partenariat de défense avec Israël et les États-Unis.
« Je suis le seul à pouvoir réunir les deux parties pour plaider en faveur de l’engagement des États-Unis dans une campagne renouvelée contre l’Iran et ses mandataires », a affirmé Netanyahu, et seul Israël combat ouvertement les forces de Téhéran dans toute la région.
Alors que MBS a été déçu tout au long de la dernière décennie par les administrations démocrates et républicaines pour leur manque de volonté d’attaquer l’Iran directement après que les mandataires de Téhéran ont attaqué l’Arabie saoudite, Netanyahu a poussé dans son discours « une alliance de sécurité au Moyen-Orient » avec les États-Unis qui garantirait l’implication américaine face à une future agression iranienne.
Une telle idée ne manquera pas d’être accueillie favorablement à Ryad.
Et non seulement Netanyahu a voulu montrer à MBS qu’il était toujours prêt à faire la lumière sur les effets délétères de l’Iran dans la région, mais il a également souligné la vigueur avec laquelle Israël repousse la menace iranienne : « Lorsque nous combattons le Hamas, nous combattons l’Iran. Lorsque nous combattons le [groupe terroriste chiite libanais du] Hezbollah, nous combattons l’Iran. Lorsque nous combattons les Houthis, nous combattons l’Iran. »
Tout cela ne manquera pas de faire le bonheur de Ryad. Mais cela ne garantit pas l’accord rêvé de Netanyahu.
Lorsqu’il regagnera Israël dimanche, Netanyahu sera soumis à une pression intense pour faire aboutir un accord qui ramènerait les otages tout en continuant à anéantir le Hamas. S’il y parvient, il aura montré aux Saoudiens qu’Israël est un partenaire utile et fiable, capable de détruire ses ennemis, tout en gardant les États-Unis à bord.
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