Saisine de la Cour suprême sur la loi sur le Hametz dans les hôpitaux
Selon un groupe favorable à la liberté religieuse, la loi permettant aux hôpitaux de bannir les produits levés pour Pessah ne devrait pas l'emporter sur les droits des patients
Ce mardi, une organisation dédiée à la liberté religieuse a déposé un recours devant la Cour suprême à l’encontre d’une nouvelle loi permettant aux hôpitaux d’interdire les produits au levain pendant Pessah, quelques jours après la confiscation de biscuits non casher pour Pessah à une femme enceinte, par un gardien d’hôpital.
Dimanche dernier, un gardien de l’hôpital Laniado de Netanya a en effet confisqué une collation à une femme, à quelques jours de Pessah, au moment même où des centres hospitaliers se préparent à appliquer la « loi hametz », adoptée sur proposition du gouvernement par la Knesset, la semaine dernière.
Cette loi interdit le hametz (nourriture levée) dans les hôpitaux pendant la semaine de Pessah, au cours de laquelle les Juifs pratiquants s’abstiennent de consommer ces produits, et laisse aux directeurs d’hôpitaux le soin « d’informer comme ils le jugent opportun les visiteurs et le personnel », soit par affichage de la règle sur le site Internet de l’établissement, soit par des panneaux à l’entrée.
En revanche, elle ne permet pas explicitement aux gardes de fouiller les sacs des patients ou des visiteurs pour s’assurer du respect de la règle.
Selon les médias israéliens, le recours déposé par l’organisation Israel Hofshit-Be Free Israel demande à la Cour Suprême d’intervenir sans délai et d’interdire les fouilles à l’entrée des hôpitaux, afin que patients et visiteurs ne se voient pas refuser l’accès aux centres hospitaliers.
L’organisation a déclaré que la loi hametz ne remplaçait pas les lois antérieures régissant les droits des patients et « n’autorisait ni la fouille des sacs des personnes se rendant à l’hôpital ni l’interdiction d’accès à l’établissement », comme l’exprime le recours.
« C’est une violation du droit de propriété et de la liberté de circulation… L’État ne devrait pas interférer dans les habitudes d’une personne et il ne donne pas à un individu le droit d’imposer ses croyances religieuses aux autres », ont écrit les avocats du mouvement, selon la Douzième chaine.
Le directeur de Be Free Israel, Uri Keidar, a déclaré par communiqué : « Nous ne devons pas tolérer que l’hôpital Laniado ignore ouvertement la loi et porte atteinte à ses patients ».
Le recours a été déposé contre l’hôpital Laniado, le ministre de la Santé par intérim Yoav Ben-Tzur, du parti Haredi Shas, et le ministère de la Santé.
Ben-Tzur a été nommé ministre de la Santé en remplacement du chef du parti Shas, Aryeh Deri, démis de ses fonctions suite à une décision de la Cour suprême ayant statué qu’il ne pouvait pas être ministre en raison de ses condamnations pénales et de la promesse faite, l’an dernier, de se retirer de la vie politique dans le cadre d’un plaider coupable.
Plusieurs grands hôpitaux ont déclaré leur intention d’apposer des panneaux dans leurs locaux, mais sans procéder à des fouilles.
Certains ont fait savoir qu’ils mettraient en place des espaces ou casiers pour ceux qui souhaiteraient y stocker du hametz.
Cette année, Pessah commence dans la soirée du mercredi 5 avril.
Selon la Douzième chaine, dimanche dernier, un employé posté à l’entrée de l’hôpital Laniado, un hôpital religieux de Netanya, a empêché une femme présentant une grossesse à risque de pénétrer dans l’établissement avec un paquet de gaufrettes qui n’étaient pas casher pour Pessah.
La femme a été contrainte de laisser les gaufrettes à l’extérieur du bâtiment.
Fondé en 1976 par le rabbin Yekutiel Yehuda Halberstam, cet hôpital appartient au mouvement hassidique de Sanz, mais il perçoit toutefois des fonds publics.
Le mari de la femme enceinte, dont le nom n’a pas été révélé, a déclaré à la Douzième chaine qu’une tente avait été installée à l’entrée de l’hôpital, à l’intérieur de laquelle patients et visiteurs doivent consigner toute nourriture non casher pour Pessah, qu’ils pourront récupérer plus tard en échange de la contremarque qui leur est remise.
« Ils lui ont dit : ‘Tu as de la nourriture non casher pour Pessah. Laisse-la dehors, nous allons te donner un ticket.’ Elle présente une grossesse à risque : cela n’a aucun sens qu’elle suive un traitement d’urgence sans nourriture pour l’aider à tenir le coup pendant la journée », a-t-il ajouté, expliquant que sa femme devait se rendre à l’hôpital toutes les deux semaines, tout le temps de sa grossesse.
La nouvelle loi sur le hametz a été présentée par le parti ultra-orthodoxe Yahadout HaTorah, indigné par une précédente décision de la Cour Suprême, en 2020, empêchant les hôpitaux de fouiller les sacs pour vérifier la présence de hametz, suite à des recours dénonçant des fouilles invasives et intrusives sur le plan religieux.
La Cour suprême avait étendu le périmètre d’application de sa décision aux bases militaires en 2022.
La lutte pour le hametz au sein des hôpitaux est devenue le symbole de la lutte des Juifs laïcs comme religieux pour fixer la place de la religion au sein de l’État juif, et des projets du gouvernement Netanyahu, le plus religieux de toute l’histoire d’Israël.
La question s’était embrasée en avril dernier, lorsque la lutte contre le hametz et ses liens avec les valeurs religieuses de l’État avaient provoqué le départ d’un membre de la coalition, précurseur de la chute du gouvernement, trois mois plus tard.