Scandale après l’annulation d’une pièce sur des témoignages de Breaking the Silence
67 célébrités critiquent le théâtre de Beer Sheva pour l’annulation du spectacle sur des témoignages de soldates de Tsahal ayant servi en Cisjordanie
Des dizaines de personnalités de la scène culturelle israélienne ont signé une lettre publiée mercredi, demandant au ministre de la Culture Chili Tropper d’intervenir suite à l’annulation, le mois dernier, de la représentation d’une comédie musicale mettant en scène les témoignages de soldates de Tsahal qui ont fait leur service en Cisjordanie, témoignages recueillis par le groupe de gauche, Breaking the Silence.
Une autre lettre contenant un message similaire a été envoyée par une organisation faîtière de troupes de théâtre israéliennes, selon les informations de la Douzième chaîne.
La comédie musicale, intitulée « Basic Instinct« , met en scène trois actrices, vêtues de versions roses d’uniformes de l’armée israélienne, qui racontent les expériences de soldates qui ont fait leur service militaire en Cisjordanie.
Les récits ont été recueillis par Breaking the Silence, une organisation de gauche qui recueille et partage les témoignages d’anciens soldats israéliens ayant servi en Cisjordanie sur les violations présumées des droits de l’homme à l’encontre de Palestiniens.
La comédie musicale est jouée à travers Israël depuis 2019 sans incident, et devait débuter au Fringe Theater de Beer Sheva le 16 juin, mais elle a été annulée le matin même.
Le théâtre a déclaré qu’il avait abandonné la représentation parce qu’il n’avait vendu que trois billets, rapporte le site d’information Ynet.
La lettre, signée par 67 personnalités du monde de la culture, dont le chanteur Aviv Geffen et l’auteur Etgar Keret, accuse le théâtre d’avoir annulé le spectacle suite à des pressions politiques émanant de « forces de droite radicale » qui auraient été exercées à la fois sur la salle de spectacle et sur le maire de Beer Sheva, Ruvik Danilovich.
L’organisation d’extrême droite B’Tsalmo s’est attribué le mérite de l’annulation de la pièce.
« Parfois, il faut savoir résister aux intimidations et aux tentatives de vous faire taire », peut-on lire dans la lettre. « C’est une occasion extrêmement importante de se battre pour le principe de la liberté d’expression ».
Dans une correspondance entre Yael Tal, l’une des créatrices de la pièce, et le directeur du Fringe Theater, jointe à la pétition, le théâtre avait indiqué avoir annulé la représentation parce que dû aux protestations « cela ne vaut tout simplement pas la peine pour nous » de monter le spectacle, rapporte la Douzième chaîne.
« Nous sommes désolés que diverses organisations et facteurs politiques aient transformé le théâtre en un champ de bataille », peut-on encore lire dans la lettre.
Le ministre de la Culture, Chili Tropper, a répondu qu’il n’interviendrait pas dans cette affaire car, bien qu’il respecte la liberté d’expression, « je ne pense pas que l’on veuille vivre dans un pays où le ministre de la Culture s’ingère dans certaines représentations ».
« Aujourd’hui c’est moi, demain ce sera quelqu’un d’autre avec des opinions différentes qui sera assis à ma place », a déclaré Tropper.
La députée du Likud Miri Regev, son prédécesseur au poste de ministre de la Culture, n’avait pas hésité à intervenir dans des affaires similaires, défendant une loi sur la loyauté culturelle qui lui aurait permis de retenir les fonds publics pour les organisations culturelles « qui agissent contre les principes de l’État. »