Selon l’envoyé américain, Tsahal a commencé à évacuer la deuxième ville du sud-Liban
Hochstein a admis que le cessez-le-feu ne se déroulait pas comme prévu, mais qu’il était en bonne voie, et que l’armée libanaise prenait le relais de l'armée israélienne pour empêcher le retour du Hezbollah
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
L’envoyé américain Amos Hochstein, en visite au Liban, a annoncé que les forces israéliennes avaient commencé lundi leur retrait de la ville frontalière de Naqoura, à l’extrême sud du pays, plus d’un mois après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu entre l’armée israélienne et le Hezbollah.
Il s’agit, depuis le 27 novembre, du deuxième retrait israélien dans le sud du Liban alors que les casques bleus de l’ONU et le Premier ministre libanais Najib Mikati ont demandé fin décembre à l’armée israélienne d’accélérer son retrait.
« L’armée israélienne a commencé son retrait de Naqoura (…) et a regagné Israël, au sud de la Ligne bleue, aujourd’hui », a déclaré Hochstein en référence à la frontière délimitée par l’ONU entre les deux pays.
« Ces retraits se poursuivront jusqu’à ce que toutes les forces israéliennes quittent totalement le Liban, et pendant que l’armée libanaise continue de se déployer vers le sud, jusqu’à la Ligne bleue », a-t-il ajouté après sa rencontre avec le président du Parlement, Nabih Berri, un allié du Hezbollah.
« Je n’ai aucune raison de ne pas penser que toutes les parties, toutes les parties, demeureront engagées dans l’application de l’accord » de trêve, a-t-il dit après sa rencontre avec Mikati à Beyrouth, et suite aux accusations d’Israël et du Hezbollah selon lesquelles chaque partie violait l’accord.
« En bonne voie »
Selon les termes du cessez-le-feu que Hochstein a aidé à négocier, l’armée libanaise doit se déployer aux côtés des casques bleus onusiens dans le sud, pendant que l’armée israélienne se retire sur une période de 60 jours.
Le Hezbollah doit retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 kilomètres de la frontière, et démanteler toute infrastructure militaire restante dans le sud.
L’armée libanaise a indiqué lundi que « des unités de l’armée avaient pris position autour de la localité de Naqoura (…) et on commencé à se déployer en coordination avec la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) », dont le QG se trouve à Naqoura.
Un déploiement « en parallèle avec le retrait de l’ennemi israélien », selon l’armée libanaise, coïncidant avec « une réunion du comité des cinq » chargé de superviser le cessez-le-feu, à laquelle a participé Amos Hochstein.
Des unités spécialisées vont surveiller Naqoura pour éliminer les munitions intactes, ajoute le communiqué de l’armée, qui conseille par ailleurs « de ne pas s’approcher de la zone ».
Un comité composé de représentants israélien, libanais, français et américain, ainsi que d’un délégué de la Finul, est chargé de surveiller l’application du cessez-le-feu et les violations potentielles.
تمركزت وحدات الجيش حول بلدة الناقورة – صور وبدأت الانتشار فيها بالتنسيق مع قوة الأمم المتحدة المؤقتة في لبنان – اليونيفيل، وبالتزامن مع انعقاد اجتماع اللجنة الخماسية للإشراف على اتفاق وقف إطلاق النار (Mechanism) في رأس الناقورة في حضور كبير مستشاري الرئيس الأميركي جو بايدن، السيد… pic.twitter.com/aHiBO73EGo
— الجيش اللبناني (@LebarmyOfficial) January 6, 2025
Hochstein a indiqué qu’il avait coprésidé lundi la troisième réunion de ce comité aux côtés du général américain Jasper Jeffers, ajoutant que « le mécanisme fonctionne bien ».
Bien que la mise en œuvre du cessez-le-feu n’ait pas progressé « aussi rapidement que certains l’auraient souhaité (…), ce que j’ai entendu aujourd’hui à Naqoura me donne l’espoir que nous sommes sur la bonne voie », a-t-il poursuivi.
Le porte-parole de l’armée israélienne, le Lt. Col. Nadav Shoshani, a déclaré que le retrait d’Israël des villes libanaises avait été plus lent que prévu en raison du manque d’effectifs de l’armée libanaise pour prendre le contrôle.
« Consensus politique »
Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a accusé dimanche le Hezbollah de ne pas se retirer « au-delà du fleuve Litani » et de ne pas respecter d’autres termes du cessez-le-feu, après que le groupe terroriste pro-iranien a accusé Israël de violations.
Le 11 décembre, l’armée libanaise avait annoncé son déploiement autour de la ville frontalière de Khiam en coordination avec la Finul, également après le retrait des troupes israéliennes de la région.
L’armée américaine avait précisé qu’il s’agissait du premier retrait des forces israéliennes suivi d’un déploiement de l’armée libanaise dans le cadre du cessez-le-feu.
A l’occasion de sa première visite au Liban depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu le 27 novembre, Hochstein a également appelé à un « consensus politique » pour l’élection d’un président de la République prévue jeudi, après deux ans d’impasse en raison de profondes divisions entre le Hezbollah et ses adversaires.
« Le Liban traverse une période critique (…) non seulement pour mettre en œuvre cet accord, mais aussi pour parvenir à un consensus politique et se concentrer sur le Liban au service de son peuple », a-t-il déclaré.
« C’est une occasion (…) de se concentrer véritablement sur la reconstruction de l’économie », la mise en œuvre « des réformes qui permettront d’attirer les investissements et de ramener le pays sur la voie de la croissance », a-t-il dit.
L’armée libanaise a précisé que Amos Hochstein et Jasper Jeffers avaient rencontré le commandant de l’armée, le général Joseph Aoun, cité parmi les candidats potentiels à la présidence, pour discuter du cessez-le-feu.
Le nom d’Aoun circule comme possible candidat à la présidence.
Lundi toujours, Avigdor Liberman, chef du parti d’opposition Yisrael Beytenu, s’est rendu à Metula, ville frontalière du nord d’Israël, où il a demandé l’établissement d’une zone tampon dans le sud-Liban, assurant que « toute autre mesure est un pansement sur une jambe de bois ».
L’accord de cessez-le-feu mis en œuvre par Israël au Liban « met en danger la vie des habitants du nord », a déclaré Liberman, en ajoutant que « l’armée libanaise n’a aucun contrôle sur la zone située entre le fleuve Litani et la frontière israélienne et n’a aucune intention de désarmer le Hezbollah. »
« En pratique, le Hezbollah est en train de se renforcer, de remettre ses hommes au niveau de la ligne de contact, de fabriquer des missiles depuis le Liban et de faire de la contrebande d’armes », a-t-il poursuivi, ajoutant que seule une zone de sécurité pourrait « empêcher les tirs antichars et la construction de tunnels ».
« Le Hezbollah va continuer de se renforcer et les Israéliens de vivre sous la menace constante. Il s’agit maintenant d’agir, le temps n’est plus à la parole », a ajouté Liberman.
Katz a déclaré dimanche qu’Israël serait « obligé de prendre des mesures » si le Hezbollah ne se retirait pas du sud-Liban comme le prévoit l’accord de cessez-le-feu.
Dimanche, un membre des autorités israéliennes a fait savoir au Times of Israel que le pays pourrait se maintenir au Liban à l’issue de la première tranche de 60 jours du cessez-le-feu initial dans le but de forcer l’armée libanaise à s’acquitter de ses obligations avant la fin de la période butoir. Israël préférerait, et de loin, que l’armée libanaise se déploie dans le sud-Liban et s’assure que le Hezbollah se retire complètement de la zone, a-t-il précisé.
L’armée israélienne a par ailleurs poursuivi ses frappes contre les hommes armés et infrastructures du Hezbollah dans le sud-Liban, qu’elle refuse de considérer comme des violations de l’accord, dans la mesure où, selon elle, ses frappes viennent en riposte aux violations du Hezbollah.
Samedi, le nouveau chef du Hezbollah, Naim Qassem, a prononcé un discours pour dire à propos des agissements israéliens que sa « patience avait des limites », et ce indépendamment des 60 jours laissés par l’accord de trêve de novembre dernier pour finaliser le retrait.
La guerre au Liban a éclaté le 8 octobre 2023 lorsque le Hezbollah, en-dehors de toute provocation, a commencé à tirer sur Israël presque chaque jour, au lendemain du pogrom commis par le Hamas – autre groupe terroriste soutenu par l’Iran – qui fait 1 200 morts et 251 otages et déclenché la guerre à Gaza.
En septembre 2024, Israël a intensifié sa campagne contre l’organisation terroriste, dont elle a tué un grand nombre des dirigeants et éliminé une grande partie des capacités, afin de mettre fin aux tirs de roquettes persistants qui ont forcé au départ 60 000 Israéliens installés dans le nord d’Israël.