Sinéad O’Connor en 1997 : « Ben Gvir fait régner la terreur sur les enfants du monde »
La chanteuse irlandaise décédée mercredi avait écrit au militant d'extrême-droite, âgé de 21 ans à l'époque, après qu'il s'est attribué l'annulation de son concert à Jérusalem
« Dieu ne récompense pas ceux qui sèment la terreur sur les enfants du monde », avait écrit Sinéad O’Connor, l’icône irlandaise de la pop décédée mercredi, à Itamar Ben Gvir, après que le futur ministre de la Sécurité nationale se fut réjoui d’avoir forcé l’annulation de son concert à Jérusalem en 1997.
La lauréate des Grammy Awards devait se produire dans la capitale dans le cadre d’un festival intitulé « Sharing Jerusalem : Two Capitals for Two States » (« Partageons Jérusalem : Deux capitales pour deux États »), qui visait à promouvoir la paix dans la ville, mais elle a annulé sa prestation après avoir reçu des menaces de mort.
Lors d’une interview à la radio qui a suivi l’annulation, Ben Gvir, 21 ans, qui faisait alors partie d’un groupe se faisant appeler « Front idéologique sioniste », a déclaré que son organisation était responsable de l’annulation.
Ben Gvir, qui est aujourd’hui ministre de la Sécurité nationale, n’a pas nié qu’un membre de son organisation était responsable des menaces.
« Un chanteur qui prêche et appelle à diviser Jérusalem et qui propage la culture des Goyim [les non-Juifs] n’a pas sa place en Israël », a-t-il déclaré.
L’ancien Premier ministre Ehud Olmert, alors maire de Jérusalem, s’était également opposé au spectacle, affirmant qu’il s’agissait d’une « provocation » destinée à « diffuser de la propagande anti-Israël ».
La lettre d’O’Connor, publiée publiquement par l’Associated Press, Reuters et le Jerusalem Post, a été rédigée en réponse à l’interview de Ben Gvir. Dans cette lettre, O’Connor demande à Ben Gvir : « Comment la paix peut-elle régner n’importe où sur terre s’il n’y a pas de paix à Jérusalem ? »
Elle termine sa lettre en avertissant Ben Gvir que « Dieu ne récompense pas ceux qui sèment la terreur sur les enfants du monde. Vous n’avez donc réussi que l’échec de votre âme ».
O’Connor est décédée mercredi à l’âge de 56 ans, a annoncé sa famille. Son fils Shane s’était suicidé l’année dernière.
La talentueuse auteure-compositeure-interprète irlandaise est devenue une superstar au milieu de sa vingtaine et était connue autant pour ses luttes privées et ses actions provocatrices que pour sa musique féroce et expressive.
Critique à l’égard de l’Église catholique romaine bien avant que les allégations d’abus sexuels ne soient largement diffusées, O’Connor a fait les gros titres en octobre 1992 lorsqu’elle avait déchiré une photo du pape Jean-Paul II lors de son passage à l’émission « Saturday Night Live » de la chaîne NBC et avait dénoncé l’Église comme étant « l’ennemie ».
En 1995, elle aurait attaqué deux photographes près de l’église du Saint-Sépulcre à Jérusalem.
Elle avait annoncé en 2018 qu’elle s’était convertie à l’islam et qu’elle adopterait le nom de Shuhada’ Davitt, plus tard Shuhada Sadaqat – bien qu’elle ait continué à utiliser Sinéad O’Connor professionnellement.
Ben Gvir se décrit comme un disciple de feu le rabbin raciste Meïr Kahane, un ancien député dont le parti Kach a été interdit et déclaré groupe terroriste dans les années 1980 à la fois en Israël et aux États-Unis. Comme feu Kahane, Ben Gvir a été condamné dans le passé pour avoir soutenu une organisation terroriste, bien qu’il affirme s’être modéré ces dernières années.