Suisse : La CICAD déplore une nouvelle hausse de l’antisémitisme sur l’année
L’organisation a recensé 562 actes antisémites en Suisse romande en 2022, dont 23 ont été classés comme "sérieux" et trois comme "graves"
La Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD) a publié fin février son rapport annuel sur l’antisémitisme en Suisse romande.
L’organisation a ainsi recensé 562 actes antisémites en Suisse romande en 2022, soit une hausse dramatique de 240 % en un an. Parmi ces actes, 23 ont été classés comme « sérieux » (sept l’année passée) et trois ont été classés comme « graves » (cinq en 2021). 38 % de ces 562 actes relèvent de « l’antisémitisme traditionnel », et 38 % de théories du complot juif. La majorité des actes antisémites ont été commis sur Internet.
« De l’invasion russe de l’Ukraine aux élections présidentielles françaises, du conflit israélo-palestinien aux propos du chanteur américain Kanye ‘Ye’ West, l’année 2022 a été marquée par la multiplication d’incidents antisémites directement liés à l’actualité internationale », écrit la CICAD.
« Sur le plan local, certaines actualités ont entrainé des vagues de commentaires antisémites sur les réseaux, comme par exemple, la vidéo du média suisse Tataki (RTS) visant à déconstruire les préjugés sur la communauté juive, la sortie du dossier thématique sur l’antisémitisme par la Commission fédérale contre le racisme (CFR) ou encore les démêlés avec l’administration d’une fonctionnaire complotiste. »
« Un constat qui ne fait que confirmer ce que l’histoire enseigne : l’antisémitisme prospère dans les périodes de crise. Depuis la pandémie du COVID-19, cette ‘période de crise’ ne semble pas s’atténuer, au contraire, derrière les événements internationaux le complot juif n’est jamais très loin pour les antisémites. Après l’année 2021, durant laquelle les actes antisémites enregistrés ont augmenté partout à travers le monde, nous ne pouvons que reconnaître que l’antisémitisme perdure. »
Selon la CICAD, la hausse importante du nombre d’actes constatés s’explique par plusieurs facteurs :
– Élargissement des sources observées : Jusqu’en 2021, la veille en ligne se concentrait uniquement sur les réseaux dits « mainstream », soit Facebook, Instagram et Twitter. Les réseaux alternatifs étant utilisés de manière marginale par les Suisses, ceux-ci n’étaient pas exploités de manière plus large. Toutefois, cette situation a changé, notamment avec la pandémie du COVID-19, qui a vu les complotistes migrer sur les plateformes alternatives, telles que Telegram, VK ou encore Gab. Ces services de messagerie et réseaux sociaux n’effectuent que très peu, voire plus du tout, de monitoring. Par conséquent, les propos racistes, antisémites, LGBTQIAphobes sont tolérés et dans certains cas encouragés. En 2022, la CICAD a pris en compte ces réseaux, ce qui a, de facto, entraîné une hausse des cas recensés en ligne.
– Cas de négationnisme : De janvier à juillet, un Genevois a publié des propos négationnistes et antisémites presque chaque jour, sur son site ainsi que sur différents réseaux sociaux. Son activité s’est arrêtée en juillet, lorsqu’il a été inculpé pour discrimination raciale et a écopé de 180 jours de peine privative.
– Augmentation de l’antisémitisme : la CICAD a observé une augmentation de l’antisémitisme en ligne, avec 529 incidents enregistrés sur le net. Si les statistiques de l’association ne se concentraient que sur les mêmes sources que l’année précédente, la CICAD comptabiliserait 283 actes contre 165 en 2021, soit une hausse de 70 %. Néanmoins, les actes sérieux sont également en augmentation, avec un accroissement des cas de vandalisme et des courriels antisémites.
Les trois actes graves constatés en Suisse romande en 2022 sont les suivants :
– « Heil Hitler » devant une synagogue genevoise : monsieur X et quelques amis sortaient de la synagogue Hekhal Haness à Genève, lorsqu’ils ont été interpellés par un individu en voiture qui leur hurlait « Heil Hitler ».
– Une élève juive lausannoise harcelée par un camarade de classe : dans un gymnase lausannois, une élève a subi à plusieurs reprises les « Heil Hitler » de l’un de ses camarades. Ces incidents se sont passés en cours et les professeurs présents n’ont pas réagi.
– Souillure d’une synagogue à Genève : en pleine nuit, un individu accompagné de plusieurs amis s’est soulagé sur une synagogue à Genève.