Sur CBS, Netanyahu dit qu’une partie de la réforme judiciaire ne sera pas adoptée
Dans un entretien accordé à la chaîne américaine, le Premier ministre a estimé que ni les juges, ni le Parlement ne devraient pouvoir avoir le contrôle l'un sur l'autre

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré dimanche devant les caméras d’une chaine américaine de télévision qu’une « révision généralisée » des décisions prises par la Cour suprême « ne sera pas mise en place » dans le cadre de son projet de réforme radical du système de la justice en Israël.
S’exprimant sur CBS News, Netanyahu a précisé qu’il « n’accepte pas l’idée d’une capacité généralisée qui serait octroyée au parlement et qui lui permettrait de passer outre les décisions prises par la Cour suprême tout comme nous n’acceptons pas l’idée que la Cour puisse invalider des décisions prises par le parlement. Ces deux extrêmes viennent entraver l’équilibre entre les trois branches du gouvernement ».
Netanyahu a ajouté qu’il y avait « un large consensus en Israël » sur la nécessité de « réaménager » le système judiciaire dans le pays même s’il y a « des différences spectaculaires » parmi les Israéliens s’agissant des moyens qui doivent être employés pour le faire.
« Le fait qu’il y ait des manifestations est un signe de bonne santé de notre démocratie. Je crois que personne ne doit douter du fait qu’Israël est et restera une démocratie vibrante. Turbulente et vibrante », a ajouté le Premier ministre.
Netanyahu a aussi admis qu’il « y a des personnalités, du même bord politique que moi, qui pensent que la proposition originale ne sera pas retenue » alors que les discussions de compromis entre représentants de l’opposition et de la coalition sont encore en cours à la résidence du président, à Jérusalem.
Pendant l’interview, une vidéo de l’appel lancé au Premier ministre israélien par le président américain Joe Biden, le mois dernier – des images où il demandait à Netanyahu d’abandonner le projet de réforme du système judiciaire très controversé actuel, qui accorderait à une coalition au pouvoir le contrôle presque complet des nominations des juges dans le pays et qui restreindrait de manière radicale les possibilités de réexamen judiciaire de la Haute-cour – a été présentée au Premier ministre.
Netanyahu a répondu qu’il « appréciait à sa juste valeur » l’alliance d’Israël avec les États-Unis ainsi que son amitié personnelle avec Biden, insistant sur le fait que « rien ne pourra se mettre au travers de cela ».
« C’est une affaire intérieure que nous devons résoudre et nous tentons de le faire en recherchant le consensus. Alors même que nous sommes en train de parler, à cet instant, il y a des équipes de mon propre parti, le Likud, et de la coalition qui parlent avec des équipes de l’opposition à la résidence du président. C’est la cinquième ou la sixième fois qu’ils se retrouvent pour chercher un compromis – ce qui, je pense, est la marque de la démocratie. Il ne faut pas détourner le regard face à un problème, il faut essayer de le résoudre », a commenté Netanyahu.
Le bureau du président Isaac Herzog a fait savoir, dimanche, que les pourparlers progressaient malgré les sujets « complexes et fondamentaux » qui se trouvent au cœur des discussions.
« Il est important de remarquer que le débat se déroule dans une atmosphère extrêmement sérieuse et positive, avec l’engagement profond de toutes les parties d’enfin parvenir à des accords », a continué le communiqué.
Les pourparlers devraient être suspendus à l’occasion de Yom HaZikaron, le journée en hommage aux soldats tués sur le front et aux victimes du terrorisme – qui commence lundi soir et qui durera toute la journée de mardi – et de Yom HaAtzmaout, qui débutera mardi dans la soirée et durera toute la journée de mercredi. Les négociations devraient reprendre jeudi.
« Tous les participants ont exprimé leur espoir que Yom HaZikaron puisse se dérouler dans un climat de respect mutuel dans tous les secteurs de la population et ils souhaitent aux citoyens d’Israël une belle journée de l’Indépendance », a poursuivi le bureau de Herzog.
La procureure-générale Gali Baharav-Miara a averti que le projet de réforme judiciaire avancé par le gouvernement, s’il était approuvé sous sa forme actuelle, accorderait au gouvernement un pouvoir quasiment illimité sans fournir aucune protection institutionnelle aux droits individuels. Le plan de refonte du système de la justice a entraîné une large opposition dans le pays, et des personnalités des milieux juridiques, sécuritaires, économiques et autres ont tous estimé qu’il portera atteinte à la démocratie en supprimant l’équilibre des pouvoirs, et qu’il nuira en cela à la sécurité et à l’économie de l’État hébreu.
Les partisans des réformes, de leur côté, déclarent qu’elles permettront de rétablir l’équilibre entre les branches de gouvernance en réduisant l’autorité d’une Cour qui serait, à leurs yeux, excessivement activiste. Netanyahu avait mis en pause le plan, le mois dernier, face à un mouvement de protestation qui ne cessait de prendre de l’ampleur et pour « permettre le dialogue » mais il a affirmé que le projet de refonte sera adopté « d’une manière ou d’une autre » lors de la session estivale de la Knesset, qui est actuellement en congé.

Dans son interview sur CBS, Netanyahu a aussi été interrogé sur l’impact des membres extrémistes de son gouvernement actuel sur les relations internationales du pays – une problématique que le Premier ministre a écartée d’un revers de la main.
Il a laissé entendre que si les détails de l’initiative restaient pour le moment confidentiels, Israël œuvrait à élargir son cercle d’amitié avec les États arabes. « Vous allez être surpris – et vous allez l’être plus tôt que vous pouvez le penser », a-t-il déclaré.
Netanyahu a ouvertement fait part de son désir de conclure un accord de paix avec l’Arabie saoudite même si, ces dernières semaines, Ryad semble avoir renforcé ses relations avec l’Autorité palestinienne (AP) et que le royaume a même accueilli une délégation du Hamas, la semaine dernière.
Israeli Prime Minister Benjamin @netanyahu doesn't say if he will appoint far-right politician May Golan to be counsel-general in New York, but says anyone he nominates "will abide stringently" by the "mainstream positions" that he's "advocated." pic.twitter.com/b1qoBgLzyd
— Face The Nation (@FaceTheNation) April 23, 2023
Le Premier ministre a également été interrogé sur les informations qui avaient laissé entendre qu’il s’apprêtait à nommer une députée controversée du Likud, May Golan, au poste de consule-générale israélienne à New York. Si Netanyahu a affirmé de manière répétée que Golan n’avait pas été nommée par ses soins, il s’est refusé à exclure cette possibilité de manière explicite.
Les informations portant sur la potentielle nomination de Golan avaient suscité l’inquiétude des leaders israéliens et américains qui craignaient que la députée ne soit pas la bienvenue aux yeux des groupes juifs mainstream de New York en raison de propos incendiaires qu’elle avait pu tenir dans le passé.
Toutefois, les médias ont annoncé, dimanche matin, que la candidature de Golan était dorénavant exclue.
« Celui que je nommerai, qui qu’il soit, devra se soumettre aux positionnements que je prône », a conclu Netanyahu sur cette question.
Israeli Prime Minister @netanyahu says he plans to meet with Florida Gov. Ron DeSantis next week when he visits Israel: "It's my job."
"I'm not avoiding the question," he tells @margbrennan. "I'd meet with every American representative, governor, senator, members of Congress." pic.twitter.com/i3u8pLlftC
— Face The Nation (@FaceTheNation) April 23, 2023
Le Premier ministre a fait savoir qu’il rencontrerait Ron DeSantis, le gouverneur de Floride qui doit se rendre en Israël pendant la semaine, tout en soulignant que cet entretien ne devait pas être considéré comme une reconnaissance particulière de cette personnalité populaire au sein du parti républicain et qui devrait annoncer sa candidature à la Maison Blanche.
« Bien sûr que je vais rencontrer DeSantis. Je rencontre tout le monde, républicains et démocrates », a-t-il noté. « C’est mon travail et je pense que c’est important en matière de soutien bipartisan aux États-Unis ».
Un sondage réalisé récemment par l’institut Gallup a été présenté à Netanyahu, révélant que pour la première fois, les démocrates étaient plus enclins à sympathiser avec les Palestiniens qu’avec les Israéliens.
« Je pense que nous devons travailler plus dur pour parvenir à persuader nos collègues démocrates – ou certains, parmi ces collègues démocrates, qui oublient peut-être qu’Israël est une démocratie solitaire au Moyen-Orient – que l’Amérique n’a pas de meilleur ami ni de meilleur allié qu’Israël », a-t-il indiqué.
Selon Netanyahu, ce déclin de la sympathie éprouvée par les démocrates pour Israël a commencé avant l’arrivée au pouvoir de son gouvernement et il peut s’expliquer, selon lui, par « la diabolisation » de l’État juif dans les médias qui, a-t-il ajouté, soulignent les « dégâts collatéraux » subis par les Palestiniens lorsqu’Israël tente de se défendre face au terrorisme.
« Je vais faire tout ce qu’il faudra pour dire la vérité au sujet d’Israël – dire que c’est une démocratie vibrante, que c’est le seul pays au Moyen-Orient qui offre des droits civils complets aux citoyens, que l’Amérique n’a pas de meilleur allié, que la coopération en matière de renseignement, de cybersécurité et de défense avec les États-Unis a sauvé d’innombrables vies israéliennes et américaines », a affirmé le Premier ministre.