Syrie : Washington et Moscou font pression pour sauver la trêve
Une série d'attentats de l'Etat islamique ont fait plus de 150 morts dans deux fiefs du régime ; cessation des hostilités du 27 février violée à plusieurs reprises
Américains et Russes cherchaient mardi à sauver une trêve déjà très fragile entre régime et rebelles en Syrie, au lendemain d’une série d’attentats du groupe Etat islamique qui ont fait plus de 150 morts dans deux fiefs du président Assad.
La cessation des hostilités instaurée le 27 février par les Etats-Unis et la Russie — parrains de l’opposition et du régime — a été violée à plusieurs reprises, notamment dans la métropole d’Alep (nord) et la Ghouta orientale à l’est de Damas, où l’armée mène une offensive depuis une dizaine de jours.
Washington a exhorté la Russie à faire pression sur son allié de Damas pour qu’il cesse ses bombardements afin de donner une chance aux pourparlers de paix censés trouver une issue au conflit qui ravage la Syrie ayant fait plus de 270 000 morts en cinq ans.
Mais les Américains pressent également les groupes rebelles de ne pas rompre la trêve après leur menace de riposter partout en Syrie si le régime ne cessait pas ses bombardements contre la ville de Daraya et la Ghouta. Leur ultimatum de 48 heures lancé dimanche devrait expirer mardi soir.
Pour sa part, la Russie a appelé à un cessez-le-feu de 72 heures à partir de jeudi à Daraya et dans la Ghouta.
Daraya, qui se trouve à 10 km au sud-ouest de Damas, est l’une des localités assiégées depuis le plus longtemps. Le régime tente en vain depuis fin 2012 de la reprendre aux rebelles.
Les Etats-Unis et la Russie sont les parrains du processus diplomatique dit de Vienne, du Groupe international de soutien à la Syrie (GISS) qui s’est encore réuni la semaine dernière dans la capitale autrichienne, mais sans faire d’avancées notables.
La Russie a proposé la semaine dernière aux Etats-Unis de mener des frappes communes contre les groupes djihadistes en Syrie, une proposition immédiatement rejetée par Washington.
Les groupes djihadistes, comme le groupe Etat islamique (EI) et la branche syrienne d’Al-Qaïda (le Front Al-Nosra) sont exclus de la trêve.
Plus de 150 morts
Sur la côte syrienne, l’EI a frappé lundi les deux villes de Tartous et de Jablé avec une série d’attentats inédits dans cette région qui ont fait au moins 154 morts, selon un nouveau bilan établi mardi par l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Ce bilan pourrait encore s’alourdir car un certain nombre des quelque 300 blessés se trouvaient dans un état critique », a averti Rami Abdel Rahmane, le directeur de l’OSDH, selon qui les victimes sont en quasi-totalité des civils, dont des enfants, des médecins et des étudiants.
Les attentats ont été menés par des kamikazes ou en utilisant des voitures piégées dans ces deux villes habitées en grande partie d’alaouites, la communauté minoritaire à laquelle appartient le chef de l’État Bachar al-Assad. Elles avaient jusqu’à présent été relativement épargnées par la guerre qui ravage la Syrie depuis cinq ans.
L’EI a affirmé avoir agi en riposte aux bombardements du régime et de son allié russe en Syrie et a mis en garde contre de « pires » représailles.
Tartous et Jablé accueillent respectivement la base et l’aéroport militaires du contingent russe soutenant les forces gouvernementales et menant des frappes contre les groupes rebelles et jihadistes.
Le régime syrien a pour sa part fait endosser la responsabilité des attentats à l’Arabie saoudite, la Turquie et le Qatar, ses adversaires régionaux depuis le début de la révolte en 2011.
« Ces attentats terroristes représentent une escalade dangereuse de la part des régimes de la haine et de l’extrémisme de Ryad, Ankara et Doha et ce dans le but (…) de faire échouer (…) l’accord de cessez-le-feu » en Syrie, a-t-il accusé dans des lettres adressées au secrétaire-général de l’ONU Ban Ki-moon et au Conseil de sécurité des Nations unies.
L’ensemble de la communauté internationale s’est indignée de ces attentats, les Etats-Unis condamnant des « attaques horribles » et Paris les qualifiant d' »odieux ».
L’EI fait face à une pression croissante en Syrie et en Irak, où il a perdu du terrain ces derniers mois et où les forces gouvernementales ont lancé lundi une offensive pour chasser les jihadistes de la ville de Fallouja, à l’ouest de Bagdad.