Tel Gezer: les amateurs d’archéologie invités à sauver le site, une brique à la fois
Les passionnés et les curieux d'archéologie peuvent contribuer aux travaux de conservation de l'IAA tous les jeudis de juillet et fabriquer des briques comme il y a 3 500 ans
- Des bénévoles fabriquent des briques à partir de moules dans le cadre des travaux de conservation à Tel Gezer, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Fouad Abutahá, conservateur principal à l'IAA et responsable des travaux de conservation à Tel Gezer, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Albert Twizer, un programmeur informatique à la retraite, aujourd’hui un bénévole régulier sur les fouilles de l'IAA, est photographié ici en train de fabriquer des briques pour Tel Gezer, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Gili Shtern, le coordinateur de la communauté pour la région centrale de l'IAA, explique quelles parties de la porte cananéenne de Tel Gezer seront étayées avec des briques modernes le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Une vue de la porte de Salomon et de la zone de la ville avec des habitations de quatre pièces à Tel Gezer le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Un conservateur de l'IAA place une brique pour protéger la porte de Canaan à Tel Gezer, à ce qui était autrefois une entrée majeure de la ville fortifiée, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Un conservateur de l'IAA met la touche finale à un mur qui renforce l'ouverture de la porte cananéenne et était autrefois une entrée majeure de la ville fortifiée, de Tel Gezer, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
- Le duo père et fils Yonatan (à droite) et Lahav Drori de Tel Aviv fabriquent des briques à partir de moules à Tel Gezer, le 6 juillet 2023. (Crédit : Melanie Lidman/Times of Israel)
La ville fortifiée de Tel Gezer, mentionnée dans la Bible comme une ancienne cité royale cananéenne, a résisté pendant 3 500 ans, avec ses murs de pierre massifs, ses boutiques et ses maisons enfouies sous des siècles de terre.
Pourtant, depuis leur découverte par les archéologues il y a plus de 100 ans, les murs s’effritent lentement dû à l’érosion, aux dégâts causés par les animaux, au vandalisme et au feu de brousse qui a ravagé la région l’année dernière, brûlant des centaines d’hectares et affaiblissant une partie du fragile mortier qui maintient les murs en place.
Le public a désormais une occasion unique, chaque jeudi du mois de juillet, de contribuer à la consolidation des anciennes fortifications en aidant à fabriquer quelque 1 200 briques faites à la main qui protégeront le site de toute nouvelle détérioration.
« Je veux établir un contact entre le public et ces sites pour éviter qu’il ne grimpe dessus et ne les détruise à l’avenir, et pour lui donner le sentiment que ces sites lui appartiennent », explique Fouad Abutahá, conservateur principal à l’Autorité israélienne des Antiquités (IAA) et responsable des travaux de conservation à Tel Gezer.
« Ces antiquités appartiennent à l’histoire, aux personnes qui ont vécu sur cette terre et qui l’ont travaillée », a déclaré Abutahá, qui travaille pour l’IAA depuis 35 ans et qui a géré des projets de conservation sur des sites archéologiques à travers tout le pays. « Nous apprenons de leurs techniques de construction, nous apprenons de leurs modes de vie, et nous apprenons notre histoire ».
Les briques, qui soutiennent les zones fissurées et menacées d’effondrement, imitent le type de briques utilisées pour la construction originale il y a quelque 3 500 ans. Chaque brique est fabriquée à la main à partir d’un mélange de sable, de pierres, de foin et de chaux, serré dans des cadres carrés et mis à sécher pendant la nuit.
La chaux est un ajout récent qui permet aux briques de prendre et de durcir au soleil sans devoir être cuites dans un four. Une bétonnière apporte une touche d’efficacité moderne, mais le reste du processus est très proche de celui utilisé lors de la construction originale.

Le premier jeudi de la mise en œuvre du projet, un petit groupe de passionnés d’archéologie, dont un groupe de retraités qui sont des bénévoles réguliers, a aidé à fabriquer quelques douzaines de briques qui seront utilisées pour les travaux de conservation.
« J’aime faire des fouilles. Après avoir passé ma carrière entière dans un bureau, j’aime le travail physique », a expliqué Albert Twizer, un programmeur informatique à la retraite de Mazkeret Batya qui a participé à près d’une dizaine de fouilles dans le centre d’Israël. « Cette fois-ci, c’était vraiment différent, car il ne s’agissait pas seulement de faire des fouilles, mais aussi d’apprendre la façon dont ils construisaient les choses. C’était un travail ardu, mais ces murs ont 3 500 ans, et peut-être que nos briques tiendront aussi longtemps ».

« À peine retraité, je savais déjà que j’allais faire ça », a déclaré Arye Maller, de Rehovot, qui a participé à de très nombreuses fouilles en tant que bénévole. « J’ai toujours voulu faire de l’archéologie, et c’est ma chance ».
Le roi de Gezer
La région aujourd’hui connue sous le nom de Tel Gezer a été colonisée à l’époque chalcolithique, vers le 4e siècle avant notre ère, et a été habitée jusqu’à l’époque romaine, au 1er siècle de notre ère. La ville était l’une des plus grandes et des principales implantations de la région, en raison de sa situation stratégique entre les cours d’eau Ayalon et Sorek et sur une route côtière très fréquentée par les commerçants, les guerriers et les voyageurs.
Le site est mentionné à plusieurs reprises dans la Bible. Le roi de Gezer est cité parmi 30 autres rois vaincus par les Israélites (Josué 12:7, 12), et après la destruction de la ville par les Égyptiens, elle a été donnée en dot au roi Salomon lors de son mariage avec la fille du pharaon (1 Rois 9:15 17).

Le site présente des colonnes monumentales provenant de l’un des plus grands temples cananéens d’Israël et une porte imposante, appelée « la Porte de Salomon », qui est presque identique aux portes des sites de Hazor et de Megiddo.

L’aventurier et chercheur français Charles Clermont-Ganneau a été le premier à suggérer en 1870 que le site, appelé localement Tel es Jazer, était le Gezer de la Bible. En 1874, il a découvert les deux premières des 12 bornes connues sur lesquelles on peut lire « Région de Gezer » en hébreu et en grec. C’est le premier site biblique en Israël à avoir été identifié par une inscription écrite, ce qui reste extrêmement rare. Beit Shean, Arad et Hazor sont les seuls autres sites à avoir été identifiés par des inscriptions trouvées in situ.
Entre 1903 et 1909, R. A. Stewart Macalister a fouillé le site pour le compte du Palestine Exploration Fund. Des fouilles ont également été organisées dans la région en 1914, 1924 et 1934. L’Université de Harvard et le Hebrew Union College ont effectué les dernières grandes fouilles entre 1964 et 1974.
Un Tel carbonisé
L’été dernier, un feu de broussailles a embrasé les environs de Tel Gezer, transformant le parc national en un flanc de colline carbonisé. Le feu a principalement brûlé les mauvaises herbes saisonnières, les découvertes archéologiques n’ont pas subi trop de dommages, mais il a affaibli le mortier fragile de certains des murs de fortification les plus exposés. Selon l’équipe d’éducation communautaire de l’IAA, l’impact le plus important de l’incendie sur les villes entourant le parc a été la terre noire brûlée, qui leur a servi d’avertissement que le site archéologique nécessitait de l’attention.

« Après l’incendie, la communauté locale a décidé d’adopter ce site », explique Gili Shtern, coordinateur communautaire pour la région centrale de l’IAA. « C’est un parc national, mais comme il n’est pas clôturé, il est en fait un peu négligé ».
De nombreux parcs nationaux où d’importantes découvertes archéologiques ont été faites, comme Caesarea ou Masada, ont un droit d’entrée, ce qui génère un flux de revenus qui contribue à l’entretien et au développement du site, a expliqué M. Shtern.
D’autre part, à travers tout le pays, les communautés ont la possibilité d’adopter des sites archéologiques situés dans leur région, et d’ainsi contribuer à l’entretien des sentiers, au désherbage, à la participation aux fouilles ou à l’organisation d’événements et d’activités sur le site qui permettent d’en connaître l’histoire et l’utilisation.

« Je pense que la plupart des gens ne sont pas conscients des sites archéologiques qui se trouvent près de chez eux », a déclaré Shtern. « Une fois qu’une communauté prend ses responsabilités, elle est en mesure de les protéger et de les mettre en valeur. Cela permet également de protéger ces zones contre le vandalisme ».
En apprenant l’histoire de leur région, les gens se sentent plus proches de leur communauté et fiers des découvertes faites sur le pas de leur porte, ajoute Shtern.
Il y a environ 35 000 sites archéologiques connus en Israël ; l’IAA n’a pas les moyens de les entretenir tous ; elle compte donc sur l’aide des communautés locales, explique Shtern. C’est ainsi que les habitants de Shoham, dans le centre du pays, ont aidé à préserver une mosaïque florale vieille de 1 800 ans de la végétation envahissante sur une aire de repos pour voyageurs, en mars dernier, lors de la Journée des bonnes actions.
L’année dernière, des élèves de Troisième du conseil régional de Gezer ont visité le site pour participer aux efforts de conservation, qui comprenaient la collecte de sable et d’autres matériaux locaux pour préparer le mélange pour les briques et la fabrication de quelques briques elles-mêmes.

« Les écoles sont vraiment le meilleur moyen de lancer ces initiatives, car elles les intègrent dans leur programme d’études », a déclaré Shtern.
Mais il espère aussi que davantage de personnes participeront aux journées de fabrication de briques organisées le jeudi à Gezer pendant l’été.
Abutahá et son équipe de conservateurs professionnels ont une grande expérience de la fabrication de ces briques. Son équipe avait déjà fabriqué quelque 12 000 briques à la main dans le cadre de travaux de conservation effectués dans la ville biblique de Lachish.
Ce projet, plus modeste en raison de contraintes budgétaires, se concentrera sur la porte cananéenne, l’une des principales entrées de la cité antique.
« Ce travail aide le site à survivre et permet aux gens d’imaginer comment c’était ici. Nous laissons certaines des parties originales et certaines des nouvelles briques aideront les gens à comprendre à quoi ressemblait le site lorsqu’il a été construit », a déclaré Abutahá.
Il a ajouté qu’il comptait sur le public pour fabriquer une petite partie des 1 200 briques dont il a besoin. Selon lui, l’important n’est pas tant la quantité totale de travail des bénévoles que le lien qu’ils établissent avec le site lorsqu’ils savent que leur travail contribue à le protéger pour les générations futures.
« Ils peuvent graver leur nom sur les briques et, dans le futur, ils pourraient revenir et trouver leur brique et constater leur contribution à la préservation du site », a-t-il déclaré.
« Chaque fois que quelqu’un touche ces sites ou effectue un travail physique ici, il se connecte à l’endroit », a expliqué Shtern. « Ils assimilent eux-mêmes les connaissances historiques et, en posant des questions aux chercheurs, ils ajoutent de nouvelles couches à ce qui est su…. ». Chaque fois que quelqu’un touche de près à un site archéologique, cela a un impact ».
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