Terrorisme – cessez de le condamner, faites lui la guerre
Après Orlando, nous pouvons passer les prochaines semaines à évacuer nos peurs et nos frustrations. Ou nous pouvons contrecarrer sérieusement l’extrémisme d’un culte mortel
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Je n’ai pas de remède miracle pour empêcher le terrorisme, mais en pleine inquiétude et dénigrement après le massacre d’Orlando dimanche, ce qui est frappant, et inoubliable, c’est l’absence de tentative stratégique, internationale et coordonnée, ne serait-ce que pour essayer.
Nous pouvons tous passer les prochains jours et les prochaines semaines à argumenter pour savoir si le président américain Barack Obama aurait dû qualifier la tuerie d’attentat islamiste, ou si cela aurait été un jugement précipité ; et, si cela compte, si le maire de Tel Aviv Ron Huldai a eu raison d’invoquer l’occupation quand il parlait de l’attaque terroriste de mercredi au marché Sarona, ou si c’est prendre le risque d’offrir une légitimité insoutenable aux meurtres de quatre Israéliens innocents. Nous pouvons nous exercer, dominer les ondes, et dépenser des fortunes à lutter et déterminer des élections sur ce que les gens disent à propos du terrorisme. Mais ne serait-il pas plus intelligent, et mieux pour nos projets de rester en vie, si nous passions à des pensées plus sérieuses, et à un budget, pour cette activité pratique : faire cesser le culte de la mort des extrémistes ?
Spécifiquement, cela signifie accorder beaucoup plus d’importance à chacun de ces trois domaines cruciaux : se défendre plus efficacement contre les tueurs ; lutter contre eux quand c’est nécessaire et faisable ; et empêcher la création des nouvelles vagues.
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Israël, bien que manifestement imparfait, a beaucoup à apprendre au monde sur la manière de se défendre contre le terrorisme. L’attentat de Sarona a amèrement souligné que nous ne l’avons pas encore complètement arrêté, mais nous avons amélioré au fur et à mesure les techniques rendant plus difficiles pour les tueurs d’accomplir leurs objectifs.
La construction de la barrière de sécurité en Cisjordanie, un travail de renseignements incessant, des opérations militaires pour arrêter les terroristes potentiels et ceux qui les arment et les inspirent, la coopération sécuritaire avec l’Autorité palestinienne, le déploiement de gardes de sécurité partout où l’on se rassemble en grands nombres : tout cela et d’autres mesures ont petit à petit vaincu la Deuxième intifada au début du siècle, quand nos bus, nos centres commerciaux et nos restaurants explosaient toutes les semaines, et empêché une résurgence à une échelle similaire depuis.
A nouveau, nous sommes absolument imparfaits : de meilleurs renseignements, plus de gardes de sécurité à Sarona, et une barrière de sécurité terminée auraient probablement permis d’éviter l’attentat de mercredi dernier. Il est plus que scandaleux que, après plus de dix ans, que la barrière de sécurité de Cisjordanie ne soit toujours pas terminée, et que deux terroristes palestiniens aient ainsi pu entrer en Israël par l’un de ses trous.
Mais Israël a appris, dans le sang, beaucoup de choses sur comment garder les terroristes au large, et quand les politiciens de tout le monde occidental hurlaient, après les attentats terroristes de novembre à Paris, qu’ils ne pouvaient tout simplement pas déployer des gardes de sécurité dans toutes les salles de concert, tous les stades de football, tous les restaurants, etc., nous, Israéliens, avons pensé ‘En fait, si, vous pouvez’. Et tragiquement, vous pourriez avoir même à le faire.
Devenir sérieux sur les actions défensives, allouer les ressources nécessaires, et vous élevez évidemment vos perspectives de contrecarrer les tueurs. En lisant qu’Omar Mateen, le tueur d’Orlando, avait été interrogé deux fois par le FBI mais avait ensuite disparu des radars quand ces interrogatoires s’étaient révélés peu concluants, je me suis rappelé de ce que m’avait dit en février Malcolm Hoenlein, dirigeant historique de la Conférence des présidents de la communauté juive américaine.
Le directeur d’une « importante agence de sécurité » française lui avait dit que les renseignements français surveillaient les tueurs de Charlie Hebdo jusqu’au vendredi précédant l’attentat, mais les agents avaient ensuite été redéployés vers ce qui avait été jugé comme une affaire plus pressante, et les frères Saïd et Chérif Kouachi n’étaient plus suivis quand, le 7 janvier, ils sont entrés dans les bureaux de Paris du magazine satyrique et abattu 11 personnes.
Si la France avait alloué plus de ressources à ses agences de sécurité, elle aurait pu empêcher cet attentat, et les massacres qui ont suivi dix mois plus tard. Si les agences de sécurité américaines débordées étaient similairement renforcées, peut-être le prochain Omar Mateen ne pourra-t-il pas échapper aux autorités et revenir, avec des conséquences effroyables.
Quand il s’agit de passer à l’offensive, à nouveau, Israël a plus d’expérience que nous l’aurions souhaité, et la plupart du monde s’est montrée peu disposée à en apprendre. C’est le très pro-israélien George W. Bush, et pas Barack Obama, qui a demandé à Israël de sortir de Cisjordanie, et de le faire immédiatement, quand le Premier ministre Ariel Sharon préparait l’opération Rempart en 2002 pour détruire les réseaux terroristes du Hamas et du Fatah qui fabriquaient des bombes et entraînaient et déployaient des terroristes kamikazes.
« J’espère qu’il y aura un retrait immédiat », avait déclaré Bush en ce mois d’avril, après un mois de mars sanglant et atroce, pendant lequel plus de 100 civils israéliens avaient été tués dans des attentats terroristes qui avaient culminé avec le massacre de Pessah à Netanya. Si Sharon avait écouté Bush, qu’il n’y ait aucun doute, les attentats suicides auraient continué. Si Israël avait depuis cessé ses incursions dans les villes palestiniennes, le pays serait à présent au milieu d’une autre véritable intifada, plutôt que dans ce qui est pour nos standards une guerre terroriste de « faible niveau ».
Pour savoir quand une position plus pro-active peut être appropriée, il me semble que ne pas soutenir les efforts des Iraniens qui résistent à leur régime, faire de son mieux pour ignorer la guerre civile en Syrie pendant des années, et regarder à présent inutilement et de loin les tentatives du président égyptien pour marginaliser l’extrémisme islamique ne sont pas les approches les plus intelligentes.
Pas quand Téhéran est le premier état du monde dans le soutien du terrorisme, pas quand la guerre civile syrienne a entraîné un vaste flot de réfugiés avec on ne sait combien de tueurs cachés parmi eux, et pas quand l’Egypte pourrait si facilement tomber à nouveau entre les mains des Frères musulmans. L’Occident ne peut pas se permettre d’essayer de se désengager du Moyen Orient. Ses extrémistes mordent en retour. Parfois, l’ennemi doit être attaqué à la source, prudemment, de sang-froid, mais néanmoins attaqué.
Où sont les efforts internationaux concertés pour bannir, ne pas financer et marginaliser les dirigeants et enseignants extrémistes du monde, en utilisant chaque once de pouvoir diplomatique et économique qui peut être rassemblée ?
Finalement, et c’est le plus important, les directions de ces pays qui se réjouissent du cadeau d’être en vie doivent concentrer leur attention stratégique, et leurs ressources, pour combattre l’extrémisme à ses racines, où les tueurs de demain sont imprégnés de haine, et acquièrent les compétences et les moyens pour rendre cette haine fatale.
Nous pourrions entendre dans les prochains jours, comme nous l’avons entendu après les attentats précédents, comment le tueur d’Orlando s’était radicalisé. Quel dirigeant spirituel il écoutait. Quels sites internet il fréquentait. Où il a rassemblé des informations pratiques pour se préparer à commettre ce crime dévastateur.
Les dirigeants politiques, les dirigeants spirituels, les médias et les réseaux sociaux, les infrastructures pédagogiques qui élèvent les tueurs de demain continuent de répandre leur poison avec une impunité quasi-totale. Une partie de cette diffusion de haine peut être attaquée par le monde libre dans le monde libre.
Où sont, par exemple, les partenariats puissants entre politiciens, juristes, agences de renseignements et plateformes internet pour lutter contre la dissémination de l’expertise meurtrière en ligne ? Et où sont les efforts internationaux concertés pour bannir, ne pas financer et marginaliser les dirigeants et enseignants extrémistes du monde, en utilisant chaque once de pouvoir diplomatique et économique qui peut être rassemblée ?
Maintenant, un nombre incalculable de tueurs potentiels testent leur capacités, cherchent leur cible, se préparent à frapper. Encore pire, un nombre incalculable de recrues potentielles de ces cultes mortels sont au fur et à mesure recherchées pour les suivre. La condamnation perçante et méprisante peut permettre d’évacuer la peur et la frustration. Mais il ne va pas gagner la guerre contre le terrorisme.
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David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel