Timerman avait admis en 2012 que l’Iran avait fait explosé le centre juif AMIA
Dans un enregistrement, l'ancien chef de la diplomatie argentine a déclaré qu' 'ils ont planté la bombe'
BUENOS AIRES – L’ancien ministre des Affaires étrangères de l’Argentine a révélé dans des conversations téléphoniques enregistrées secrètement que l’Iran était responsable de l’attentat du centre juif de l’AMIA à Buenos Aires en 1994, alors qu’il était en train de négocier avec Téhéran.
Hector Timerman, qui est Juif, est l’un des interlocuteurs de ces conversations qui ont été diffusées vendredi par la station de radio argentine Mitre.
Dans ces enregistrements qui ont fuité des conversations avec les dirigeants de la communauté juive argentine, Timerman défend les efforts déployés par le gouvernement du président de l’époque Cristina Fernandez de Kirchner, affirmant que le seul but est de résoudre l’affaire de l’AMIA.
Timerman a justifié les négociations avec l’Iran pour enquêter conjointement sur l’attaque, en disant qu’ « il y a dix-huit ans, ils ont planté la bombe ».
L’explosion de la bombe a fait 85 morts et des centaines de blessés.
Ces conversations ont eu lieu en 2012, lorsque l’AMIA a critiqué les négociations avec l’Iran. Dans le premier enregistrement, Timerman parle avec Guillermo Borger, le président de l’organisation de la communauté juive AMIA.
Timerman lui dit : « je vous appelle parce que ça me fait mal. Ca me fait mal en tant que Juif d’entendre les critiques de l’AMIA. Et il me semble que le meilleur choix est de ne rien faire et si nous [le gouvernement] ne faisons rien, l’AMIA serait heureux. Mais je le fais pour l’AMIA ».
Le ministre des Affaires étrangères a également déclaré que le procureur Alberto Nisman en charge de l’affaire sur l’AMIA lui a dit dans une conversation privée qu’il était en faveur des négociations mais après que l’Iran et l’Argentine ont signé le protocole d’accord pour étudier conjointement l’attentat, Nisman a contesté l’accord, demandant à un juge fédéral de le déclarer inconstitutionnel.
Dans le deuxième enregistrement, le vice-président de l’AMIA, Jose Scaliter, s’est également joint à la conversation :
Borger : « Nous ne considérons pas l’Iran comme [un partenaire de négociation] valide ».
Timerman : « Et avec qui vous voulez que je négocie, en Suisse ? »
Borger : « je vais juste dire que l’Iran ment, n’est pas crédible et nie l’Holocauste ».
Timerman : « Mais nous n’avons pas quelqu’un d’autre pour négocier. […] Eh bien, dites-moi avec qui vous voulez que je négocie ? ».
Plus tard, Borger lui dit : « j’espère que vous pouvez négocier avec un autre … »
Timerman : « S’il y avait quelqu’un d’autre, ils [les Iraniens] n’auraient pas posé la bombe. Donc, nous sommes de retour à la case départ. Avez-vous quelqu’un d’autre pour moi avec qui je peux négocier ? ».
Scaliter : « Nous n’avons pas à vous dire avec qui vous devez négocier ».
Timerman : « Non, vous me dites avec qui je ne peux pas négocier ».
Scaliter : « Oui ».
Timerman : « Ah, vous êtes intelligent ».
Un peu plus tard au fil de la conversation, Borger a déclaré que le procureur spécial de l’AMIA, Alberto Nisman, « a mené une enquête sérieuse et importante et a affirmé que l’Iran l’a fait ».
Timerman : « Et ? »
Borger : « … Je vais donc lui faire confiance s’ils sont présentés à la justice ».
Timerman : « Alors, comment voulez-vous me les amener [les fugitifs iraniens en Argentine] ? Vous ne savez jamais ce qui doit être fait ».
Nisman a été retrouvé mort dans son appartement de Buenos Aires le 18 janvier. La cause de sa mort doit être encore déterminée.
L’enregistrement a été diffusé par Radio Mitre dans un programme appelé « La Noticia Deseada », ou « les nouvelles souhaitées », vendredi, lorsque l’invité, le journaliste, Daniel Santoro, a fourni les enregistrements qu’il a utilisés dans son livre, « Nisman debe morir » [« Nisman doit mourir »].
En 2015, Timerman a démissionné de l’AMIA, en la qualifiant de « démission indéclinable » en raison des « actions d’obstruction » que l’institution avait menées contre l’accord avec l’Iran pour enquêter sur l’attaque.
Bien que l’Argentine a accusé le gouvernement iranien d’avoir ordonné le bombardement et le groupe terroriste basé au Liban le Hezbollah de l’exécuter, aucune arrestation n’a été faite dans cette affaire. Six Iraniens sont sur la liste des personnes les plus recherchées de l’agence internationale de police Interpol depuis 2007 dans le cadre de l’attentat.
Le nouveau gouvernement de l’Argentine, la semaine dernière, a déclaré l’accord avec l’Iran pour enquêter conjointement sur l’attentat, nul et non avenu. Dans sa première semaine en fonction, le gouvernement du président Mauricio Macri a retiré l’appel déposé par le gouvernement précédent dirigé par Kirchner contre une décision de la Cour fédérale qui avait déclaré que l’accord de 2013 était inconstitutionnel.