Les Juifs de Rome aident les Israéliens bloqués par la guerre en Iran
Logement, nourriture, médecins - expatriés et institutions mettent tout à disposition des centaines de personnes bloquées dans la Ville éternelle

Aux premières heures du jour, vendredi dernier, lorsqu’Israël a fermé son espace aérien en prévision des représailles iraniennes à l’attaque préventive d’Israël contre le programme nucléaire de Téhéran, Nofar Kashi Moresco, qui vit à Rome, a su qu’il fallait faire quelque chose.
Originaire d’Israël, Kashi Moresco, 43 ans, vit dans la Ville éternelle depuis 15 ans : elle travaille dans le secteur du tourisme casher et s’est fait une notoriété sur les réseaux sociaux en publiant des informations en hébreu sur la cuisine italienne, les traditions juives et la vie quotidienne.
Depuis le pogrom commis en Israël par des milliers de terroristes du Hamas, le 7 octobre 2023, le pays est en guerre sur plusieurs fronts. Dès le début, Kashi Moresco s’est fixé pour objectif de mettre en place un réseau de bénévoles capables d’aider les Israéliens bloqués en Italie ou désireux de fuir la guerre.
Avec des centaines sinon des milliers d’Israéliens bloqués à Rome (sur les 150 000 bloqués un peu partout dans le monde) vendredi, l’expatriée a compris qu’il fallait réactiver ce réseau d’entraide.
« J’ai quelques chambres à louer, mais après le 7 octobre, avec quelques collègues, nous nous sommes mis en quête de logements gratuits à mettre à disposition de ceux qui en ont besoin », explique-t-elle au Times of Israel par téléphone.
« Nous avons rapidement créé un groupe WhatsApp pour aider les personnes ayant d’autres besoins urgents, comme par exemple trouver un médecin, des médicaments, etc. »

Dans les 48 heures qui ont suivi, le nombre de membres de ce groupe WhatsApp est passé de 200 à 1 000, à commencer par des personnes à la recherche d’un logement, de repas pour Shabbat ou d’autres prestations.
Pour Kashi Moresco, l’entraide est une mission collégiale qui implique de nombreuses organisations et institutions juives ou israéliennes de la ville – de la communauté juive aux restaurants casher ou à l’ambassade d’Israël en passant par les centres Habad – ces derniers étant gérés par le mouvement hassidique de renommée mondiale. Des dizaines de bénévoles se sont joints à cette initiative.
« Nous travaillons tous ensemble », explique Kashi Moresco, y compris avec les autorités italiennes et les forces de police.
Pour Shabbat, des dîners ont été organisés dans l’école communautaire et plusieurs synagogues ou centres.

« Nous avons accueilli pas moins de 300 personnes pour le dîner de Shabbat et 50 pour le déjeuner », annonce le rabbin Menachem Lazar, directeur de l’un des centres Habad à Rome. « C’était très beau, avec ces personnes de tous les horizons qui ont prié, mangé et passé du temps ensemble. C’était unique. »
Lazar indique au Times of Israel qu’il doit très prochainement s’entretenir avec des membres du réseau pour évoquer la manière d’aider encore plus.
« Jusqu’alors, nous avons fait en sorte de répondre aux urgences, mais il semble que cette situation soit appelée à durer », ajoute-t-il.
Beth Steinberg (sœur de la rédactrice culturelle du Times of Israël, Jessica Steinberg) est l’une des Israéliennes bloquées à Rome.
« La semaine dernière, je me trouvais aux États-Unis pour le travail », explique-t-elle au Times of Israel par téléphone. « Mon avion a quitté New York jeudi après-midi. À un moment, j’ai regardé l’écran et j’ai vu qu’il nous restait environ quatre heures de vol avant d’arriver à Tel Aviv. Mais soudain, le temps de vol restant est tombé à 45 minutes. J’ai pensé que c’était une erreur – c’est alors que le pilote a annoncé qu’Israël avait attaqué l’Iran et que nous étions détournés vers Rome. »
« Cela m’a surprise », poursuit-elle.
Après l’atterrissage, il a fallu attendre longtemps avant de pouvoir débarquer.
« Heureusement, je connaissais déjà Rome et j’ai pu me trouver un Airbnb, un endroit où aller », précise Steinberg.
Il se trouve que l’un de ses fils se trouvait lui aussi à l’étranger à ce moment-là.

« Natan était à Cologne, en Allemagne, pour assister à une conférence universitaire », explique Steinberg. « Le lendemain, il m’a rejointe à Rome. Au moins, nous vivons cette aventure inattendue ensemble. »
Steinberg est membre de l’un des groupes WhatsApp qui proposent de l’aide aux Israéliens en Italie mais c’est grâce à ses contacts personnels qu’elle a trouvé une solution de logement.
« Une amie d’amie – coincée, elle, à Jérusalem – cherchait quelqu’un pour sous-louer son appartement à Rome », poursuit-elle.
« Elle a été incroyablement gentille et nous a fait un tarif très préférentiel », ajoute-t-elle en précisant que sur Airbnb, il se loue près de 300 € la nuit.
Steinberg admet qu’il lui est difficile d’être loin de sa famille.

« J’ai un fils adulte handicapé et une belle-fille enceinte », précise-t-elle. « Ils ne dorment pas à cause des alertes constantes et des attaques de missiles. Je ne dors pas non plus – je n’arrête pas de regarder les nouvelles pour être au courant de ce qui se passe en Israël. »
« Je ne me plains pas – je n’ai pas à courir constamment pour me réfugier – mais c’est très difficile d’être loin », confie-t-elle.
Dans l’ensemble, Kashi Moresco trouve les gens beaucoup plus calmes qu’après le 7 octobre.
« Il y a moins de panique », conclut-elle. « Les gens semblent avoir compris que cela va prendre du temps mais qu’ils rentreront chez eux au final. Pour l’instant, il leur faut être patients. »