Tsahal annonce l’élimination du principal site de fabrication d’armes du Hamas à Gaza
Les combats se poursuivent dans le nord et le sud de Gaza, et l'ONU alerte sur la situation humanitaire désastreuse, accusant Israël d'enfreindre le droit international
L’armée israélienne a annoncé jeudi la complète démolition du plus important site de fabrication de roquettes et d’armes du Hamas, dans le centre de la bande de Gaza, ainsi que d’un vaste réseau de tunnels qui abritait certaines de ces installations.
Jeudi, l’armée avait fait savoir que ses soldats avaient atteint le point le plus méridional de l’offensive terrestre à Gaza et que les opérations dans le sud du territoire palestinien gagnaient en intensité.
Jeudi toujours, à l’ONU, un spécialiste de la question des droits de l’homme a accusé Israël d’infraction au droit international en raison de ses bombardements « incessants » sur Gaza.
Des parties de l’usine de fabrication d’armes avaient été montrées à plusieurs journalistes, notamment au Times of Israël, lors d’une visite pour la presse, ce mois-ci, sur la route Salah a-Din dans le secteur de Bureij.
L’armée israélienne a fait savoir que ses effectifs ont récemment découvert d’autres sites de fabrication, dans le secteur de Maghazi ainsi qu’entre Bureij et Nuseirat.
Selon l’armée israélienne, la 36e division, l’unité du génie de combat Yahalom et l’unité Shaldag de l’armée de l’air ont découvert et détruit des dizaines de tunnels du côté de la route Salah a-Din, dans le centre de Gaza, qui étaient reliés à des centaines de kilomètres de passages souterrains.
Une des entrées de tunnel était située au domicile d’un haut responsable du Hamas chargé de la manufacture de roquettes.
L’armée israélienne a expliqué que ces tunnels menaient à des sites souterrains utilisés par le Hamas pour fabriquer des roquettes et d’autres armes, ainsi qu’à des passages utilisés par le groupe terroriste pour acheminer des munitions partout dans Gaza.
Sur et sous terre, à Maghazi, Bureij et Nuseirat, l’armée israélienne a découvert des ateliers sidérurgiques, des usines chimiques et d’explosifs ainsi que des entrepôts de stockage de roquettes à longue portée.
The IDF says it has completed demolishing Hamas’s main rocket and weapon manufacturing industrial zone in the central Gaza Strip, along with a vast tunnel network beneath it that houses some of the facilities.
Parts of the facility were shown to reporters, including yours truly,… pic.twitter.com/KX8m5P3mFK
— Emanuel (Mannie) Fabian (@manniefabian) January 18, 2024
De son côté, Francesca Albanese, avocate italienne, rapporteuse spéciale de l’ONU sur les territoires palestiniens et farouche critique d’Israël, a déclaré lors d’une conférence de presse à Madrid qu’Israël « avait fait des choses particulièrement illégales, hautement illégales » pendant la guerre.
Israël a le droit à la légitime défense mais le droit international humanitaire doit être respecté « afin de protéger les personnes non impliquées dans les combats, à savoir les civils, les prisonniers de guerre, les malades et les blessés », a-t-elle ajouté.
Cela implique de faire le distinguo entre les combattants et les civils et de veiller à ce que les attaques militaires soient proportionnées afin d’éviter des dommages excessifs du côté civil, a ajouté M. Albanese.
« Au contraire, nous avons vu plus de 100 jours de bombardements incessants – les deux premières semaines, au rythme de 6 000 bombes par semaine, des bombes de 2 tonnes, dans des zones très peuplées », a-t-elle déclaré. « La plupart des hôpitaux ont cessé de fonctionner. Bon nombre d’entre eux, les plus importants, sont fermés, ont été bombardés ou pris en main par l’armée. Des gens meurent aujourd’hui, non seulement à cause des bombes, mais aussi parce qu’il n’y a pas suffisamment d’infrastructures de soins. »
Israël accuse le Hamas de se fondre dans la population civile de Gaza, qu’elle utilise comme bouclier humain, que ce soit en installant des bases terroristes sous les hôpitaux, en tirant des roquettes depuis des écoles et les abris, en creusant des entrées de tunnel sous des chambres d’enfants ou en stockant des armes dans et autour des écoles et des mosquées.
Les terroristes du Hamas qui ont été capturés ont confirmé certaines de ces accusations et précisé que le Hamas savait pertinemment qu’Israël ne tirerait pas sur les hôpitaux ou ce type d’installations.
Un professionnel de la santé qui a récemment quitté Gaza après avoir travaillé pendant des semaines dans des hôpitaux a dressé le tableau de médecins débordés tentant de sauver la vie de milliers de blessés au beau milieu d’hôpitaux à la dérive transformés en camps de réfugiés.
Sean Casey, de l’Organisation mondiale de la santé, qui a quitté Gaza après cinq semaines à la tête de l’acheminement de fournitures et du recrutement de personnels pour les 16 hôpitaux encore ouverts dans le territoire, a déclaré lors d’une conférence de presse de l’ONU avoir vu « la situation effroyable dans laquelle se trouvent les hôpitaux », avec un système de santé en déliquescence.
L’hôpital Al-Shifa, autrefois le plus grand hôpital de Gaza, avec ses 700 lits, ne traite plus que les victimes de traumatismes d’urgence et accueille des milliers de personnes déplacées, qui vivent aujourd’hui dans des blocs opératoires, des couloirs voire des escaliers, a-t-il expliqué.
« Il n’y a littéralement pas plus de cinq ou six médecins ou infirmières » pour des centaines de patients chaque jour, a précisé Casey, la plupart avec des blessures extrêmement graves, et « tellement de patients au sol qu’il est impossible d’avancer sans marcher sur les mains ou les pieds de quelqu’un ».
Suite aux attaques du Hamas dans le sud du pays, le 7 octobre dernier, Israël a fait savoir à plusieurs reprises que l’organisation terroriste islamique utilisait les hôpitaux de Gaza comme couverture pour ses activités militaires. Selon les autorités israéliennes, sous l’hôpital Al-Shifa, dans la ville de Gaza, le Hamas dissimulait des centres de commandement et des bunkers, que Tsahal a découverts fin novembre.
La victoire prendra du temps
A l’occasion d’une conférence de presse donnée à Tel Aviv jeudi, le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’est engagé à ce que la guerre contre le Hamas « se poursuive sur tous les fronts, elle se poursuivra sur tous les fronts, jusqu’à ce que tous les objectifs que nous nous sommes assignés aient été atteints ».
« La victoire prendra encore de longs mois », a-t-il poursuivi, « mais nous sommes bien déterminés à l’emporter ».
Il a balayé d’un revers de main la possibilité qu’Israël ne l’emporte pas, éventualité qu’il reproche aux médias israéliens d’agiter, à commencer « par les studios de télévision ». Son gouvernement, a-t-il promis, « ne fera aucun compromis : la victoire sur le Hamas sera totale ».
S’agissant de la question du contrôle de Gaza après-guerre, il a dit qu’il « serait heureux de trouver des Gazaouis » pour gérer les affaires civiles dans la bande de Gaza, et des États voisins désireux de contribuer à la reconstruction de Gaza, mais qu’il était peu probable que cela se produise tant que le Hamas ne sera pas vaincu, car ces personnes auraient peur de « prendre une balle dans la tête » de la main des hommes armés de l’organisation terroriste.
Dans la journée, l’armée israélienne a réfuté avoir bombardé un hôpital de campagne jordanien à Khan Younès, dans le sud de Gaza, là où ses propres soldats continuaient de combattre les membres du Hamas dans le secteur.
Mercredi, l’armée jordanienne a affirmé que son hôpital militaire de campagne avait été gravement endommagé par des bombardements israéliens tout proches, mais les images aériennes publiées par l’armée israélienne montrent que toutes les tentes sont intactes.
En réponse à une question sur ce point, le porte-parole de Tsahal a déclaré au Times of Israël que l’armée « n’avait pas attaqué l’hôpital jordanien de Khan Younès », mais que ses soldats avaient livré combat contre des membres du Hamas à proximité.
« Il se dit qu’un membre du personnel médical de l’hôpital a été blessé suite à ces échanges de tirs. Pour l’instant, il n’est pas possible de vérifier que cette blessure est imputable à des tirs des israéliens », a déclaré l’armée israélienne, ajoutant qu’avant de pénétrer dans cette zone, ses soldats avaient été informés de la proximité de l’hôpital, « endroit sensible qu’il était très important de ne pas le mettre en danger, lui ou ses occupants ».
L’armée israélienne a également souligné qu’« une coordination avait eu lieu entre les parties concernées » avant les opérations de l’armée près de l’hôpital, mercredi, à l’issue de laquelle le personnel de l’hôpital avait reçu pour consigne de se mettre à l’abri.
« L’hôpital n’est pas endommagé et continue de fonctionner et de prodiguer des soins à ceux qui en ont besoin », a déclaré l’armée israélienne.
Dans le sud de la bande de Gaza, le ministère de la Santé dirigé par le Hamas a déclaré que 16 personnes avaient été tuées par une frappe aérienne de Tsahal sur une maison de Rafah. L’armée israélienne ne s’est pas exprimée sur ce point.
Pour sa part, le Qatar a confirmé qu’une cargaison de médicaments, en partie destinée aux dizaines d’otages du Hamas atteints de maladies chroniques, était entrée dans la bande de Gaza.
« Ces dernières heures, des médicaments et d’autres fournitures sont entrés dans la bande de Gaza, en application de l’accord annoncé hier au profit des civils de l’enclave et des otages », a déclaré Majed Al Ansari, porte-parole du ministère des Affaires étrangères de Doha, sur X, anciennement Twitter, ajoutant que la médiation se poursuivait « aux niveaux politique et humanitaire ».
Un haut responsable du Hamas a déclaré que pour chaque boîte fournie aux otages, 1 000 boîtes de médicaments étaient envoyées aux Palestiniens.
L’accord permettant l’acheminement de médicaments à Gaza s’est fait dans le contexte d’une aggravation de la crise humanitaire dans l’enclave. Le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, a déclaré jeudi que le bilan humain dans la bande de Gaza s’établissait au bas mot à 24 620 personnes, mais ces chiffres sont impossibles à vérifier de manière indépendante et pourraient comprendre les civils et membres du Hamas tués à Gaza, notamment par des tirs ratés de roquettes terroristes.
L’armée israélienne affirme avoir tué plus de 9 000 membres à Gaza, sans oublier le millier de terroristes tués en territoire israélien le 7 octobre.
On ignore si les médicaments, qui devaient être transférés par la Croix-Rouge, ont effectivement été remis aux otages.
On estime à 132 le nombre des otages faits par le Hamas le 7 octobre dernier encore à Gaza – pas tous en vie – depuis la libération de 105 civils à la faveur d’une trêve d’une semaine fin novembre. Quatre otages avaient été libérés avant cette date, plus une, secourue par des soldats. Les corps de huit otages ont également été retrouvés et trois otages ont été tués par erreur par l’armée. Tsahal a d’ailleurs confirmé la mort de 27 otages toujours aux mains du Hamas, sur la foi de nouveaux renseignements collectés par les soldats déployés à Gaza. Une autre personne est portée disparue depuis le 7 octobre.
Les communautés israéliennes ont été ravagées par le Hamas le 7 octobre dernier, lorsque des terroristes ont pris d’assaut la frontière avant d’assassiner près de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et de faire 240 otages.
Israël s’est lancé dans une campagne aérienne et terrestre de grande envergure à Gaza afin d’en finir avec l’organisation terroriste. Cette opération dure depuis plus de 100 jours. Selon l’armée, les combats se sont intensifiés jeudi, lorsque les soldats de Tsahal se sont déployés dans Khan Younès et tué une quarantaine de membres du Hamas le même jour.
La brigade Givati a par ailleurs attaqué « l’avant-poste de Shuhada », principal bastion du bataillon Khan Younès Sud du Hamas qui accueille les bureaux du commandant du bataillon du Hamas, où elle a saisi de nombreuses armes et collecté des documents sources de renseignements.
Des combats de moindre importance se sont également poursuivis dans le nord de Gaza. L’armée affirme avoir tué plusieurs hommes armés lors de frappes de chars et d’avions dans des zones où elle dit avoir établi un « contrôle opérationnel ».