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Un autre article sur l’antisémitisme accable le Labour

Un article du Sunday Times donne des informations détaillées sur de nombreuses affaires d'antisémitisme qui n'ont pas été sanctionnées

Jeremy Corbyn, chef du parti d'opposition britannique travailliste, quitte son domicile dans le nord de Londres le 4 avril 2019. (Photo par Tolga AKMEN / AFP)
Jeremy Corbyn, chef du parti d'opposition britannique travailliste, quitte son domicile dans le nord de Londres le 4 avril 2019. (Photo par Tolga AKMEN / AFP)

Le journal britannique The Sunday Times a déclaré avoir obtenu un disque dur contenant une base de données confidentielle, des emails fuités et des documents qui montrent que le parti – embourbé depuis longtemps dans une scandale public sur son incapacité apparente à se débarrasser de l’antisémitisme qui le gangrène – a traîné les pieds pour réagir aux plaintes.

Le bureau du chef du parti Jeremy Corbyn est intervenu dans au moins 101 plaintes, a annoncé l’article, même s’il avait auparavant rassuré l’élue juive Margaret Hodge que son équipe ne s’impliquerait « jamais » dans ces affaires.

En tout, sur les 863 plaintes effectuées au 8 mars 2019, 454 n’ont pas été tranchées. Pour 249 d’entre elles, le parti n’a même pas lancé d’enquête initiale.

Dans les cas où une décision finale a bien été prise, 191 membres n’ont été visés par aucune action, et 145 ont reçu un avertissement officiel – que le Sunday Times a qualifié de « tape sur le poignet » – et seulement 29 ont été exclus. D’autres ont quitté le parti de leur propre accord.

L’article donnait des détails sur des cas spécifiques sans nommer les personnes incriminées. Dans une affaire, un syndicaliste de Manchester a été autorisé à réintégrer le parti même s’il avait partagé des documents accusant les « Israéliens juifs » d’être responsable des attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

Des membres du parti qui ont tenu des propos antisémites comme « Heil Hitler », « J’emmerde les Juifs » et les « Juifs sont le problème » n’ont pas été exclus même si des plaintes ont été déposées contre eux il y a un an, précisait l’article.

Une conseillère régionale du Lancashire a été réintégrée après avoir critiqué les « médias juifs » et les « Rothschild ». Elle a expliqué qu’elle avait utilisé ces termes « comme une expression de description globale sans connotations racistes ».

Margaret Hodge prend la parole lors de la Conférence du Jewish Labour Movement à Londres, le 2 septembre 2018. (Dan Kitwood/Getty Images/via JTA)

Le mois dernier, expliquait l’article, Thomas Gardiner – un allié de Corbyn qui dirige le service juridique et de gouvernance du parti Travailliste – a bloqué des tentatives pour engager des poursuites contre un membre du parti qui s’est emporté contre les élues juives Margaret Hodge et Ruth Smeeth en les traitant de « duo de balais-à-chiotte qui remuent la merde, qui ont été achetées et qui sont payées par Israël » et de « saloperies débiles » qui devraient « aller se faire foutre et retourner dans leurs tous ».

Dans une autre affaire, un élu s’en est tiré avec un simple avertissement après avoir dit que le Conseil des juifs britanniques était des « salo*** » et que son commentaire n’était « pas antisémite, c’est anti salop***. Voir Israël ».

Un officiel du parti Travailliste a statué qu’un candidat aux municipales avait franchi la ligne après avoir accusé des élus juifs d’être des « infiltrés sionistes », mais il a ensuite changé d’avis et décidé que l’accusé ne serait pas suspendu ni visé par une procédure parce que « c’est un candidat ».

En réponse à l’article, Hodge a dit que « l’ampleur des insultes, la profondeur de la haine et le manque total d’action du parti Travailliste sont stupéfiants. Jeremy m’avait assuré qu’il n’intervenait pas dans ces plaintes. Cette enquête prouve que soit il me ment, soit son bureau lui ment ».

Le chef du Parti travailliste de l’opposition britannique Jeremy Corbyn, (à gauche), s’entretient avec le chef adjoint Tom Watson au début de la conférence annuelle du parti à Liverpool, en Angleterre, le 23 septembre 2018. (Stefan Rousseau/PA via AP)

« C’est un article très choquant et déprimant, a commenté Tom Watson, haut responsable du parti Travailliste. Des membres du parti Travailliste et de la communauté juive ne comprendront pas comment, des années après que les premières préoccupations sur l’antisémitisme ont été soulevées, nous n’avons toujours par pris ce problème à bras le corps ».

Pourtant, du côté des Travaillistes, on insiste pour dire que les chiffres présentés dans l’article n’étaient « pas exacts ».

« On a fait fuiter des passages d’emails de manière sélective afin de donner une fausse représentation du contenu global, a affirmé le parti. D’anciens membres de l’équipe ont demandé de l’aide au bureau central pour rattraper le retard accumulé dans certaines affaires. Cela a duré pendant quelques semaines alors qu’il n’y avait pas de secrétaire général, et ça s’est terminé avec l’arrivée de Jenni Formby [maintenant à ce rôle] ».

« Le parti Travailliste prend les plaintes d’antisémitisme extrêmement au sérieux et nous sommes engagés pour nous en débarrasser. Toutes les plaintes ont fait l’objet d’une enquête en conformité avec nos règles et nos procédures. Nous ne pouvons pas commenter des cas individuels », précisait le communiqué.

Des discours antisémites ont été observés au sein du parti Travailliste depuis 2015, quand Corbyn, un politicien d’extrême gauche, a été élu à la tête du parti. Le Conseil des Juifs britanniques a accusé Corbyn d’encourager les discours antisémites et parfois d’en faire lui-même. Il a nié ces accusations.

L’ancien maire de Londres, Ken Livingstone (AP Photo/Kirsty Wigglesworth)

L’ancien maire de Londres Ken Livingstone a récemment qualifié ces affirmations d’antisémitisme chez les Travaillistes de « mensonges et de diffamations » visant à faire tomber Corbyn et il a affirmé qu’il n’est « pas antisémite de détester les Juifs d’Israël ».

En mars, la police britannique a arrêté trois personnes près de Londres suspectées d’avoir incité à la haine dans les rangs du parti Travailliste. Ces arrestations étaient parmi les rares interventions de forces de l’ordre contre de individus suspectés de propager l’antisémitisme au sein du parti.

L’année dernière, Corbyn a été très vivement critiqué après avoir exprimé son soutien à une peinture murale antisémite en 2012 dans le quartier de East End de Londres.

La peinture murale, intitulée Liberté de l’Humanité, a été peinte sur une propriété non loin de Brick Lane par Kalen Ockerman, un artiste spécialisé dans les graffiti basé à Los Angeles. Elle représente un groupe d’hommes – qui ressemblent à des caricatures de banquiers et d’hommes d’affaires juifs – comptant leur argent sur un Monopoly qui tient en équilibre sur le dos de travailleurs nus.

En réaction, des Juifs britanniques ont participé à une manifestation sans précédent sur la place du Parlement pour dénoncer l’antisémitisme qui submerge le parti Travailliste. La foule avait scandé « trop, c’est trop ».

Après une focalisation de l’attention publique sur le problème, le parti Travailliste va peut-être être visé par une enquête officielle de la Commission d’Egalité et des Droits de l’homme du Royaume-Uni, le principal organisme gouvernemental de veille contre le racisme.

L’équipe du Times of Israel a contribué à l’article.

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