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Un document censuré du FBI fait allusion aux efforts israéliens pour aider Trump

Selon le document, un contact de Jérusalem aurait dit à Roger Stone, proche conseiller de Trump, en 2016 : "Il va perdre à moins que l'on intervienne. Nous avons des infos clés"

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, et le président américain Donald Trump se serrent la main au Musée Israël à Jérusalem, le 23 mai 2017. (AP/Sebastian Scheiner)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, et le président américain Donald Trump se serrent la main au Musée Israël à Jérusalem, le 23 mai 2017. (AP/Sebastian Scheiner)

Roger Stone, proche de longue date du président américain Donald Trump, condamné l’année dernière dans le cadre de l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur les liens entre la Russie et la campagne Trump, a été en contact avec un ou plusieurs Israéliens influents lors de la campagne présidentielle américaine de 2016. L’un des Israéliens a notamment prévenu Stone que Trump « allait perdre sauf si nous intervenons » et a promis qu’Israël avait des « infos clés ».

L’échange entre Stone et ce contact basé à Jérusalem apparaît dans des documents du FBI rendus publics mardi. Les documents – des déclarations sous serment du FBI effectuées pour permettre l’obtention de mandats d’arrêt dans l’enquête criminelle sur Stone – ont été publiés après une procédure judiciaire lancée par l’agence Associated Press et d’autres organes de presse.

Conseiller de longue date de Trump, Stone a travaillé officiellement sur la campagne présidentielle de 2016 jusqu’à août 2015 – Trump avait alors annoncé son licenciement. Il a cependant continué à communiquer avec les équipes de campagne, selon l’enquête de Mueller.

Le document du FBI, qui est largement censuré, comprend une référence explicite à Israël et une à Jérusalem, et une série de références à des responsables gouvernementaux : un « ministre », un « ministre du cabinet », un « ministre sans portefeuille dans le cabinet qui s’occupe des questions concernant la défense et les affaires étrangères », au « PM », et au « Premier ministre ». Dans toutes ces références, les noms et les pays des ministres et du Premier ministre concernés ont été censurés.

Une partie du document du FBI avec des références censurées à un « ministre », un « ministre du cabinet », un « ministre sans porte-feuille dans le cabinet qui s’occupe des questions concernant la défense et les affaires étrangères », et au « Premier ministre ».

Benjamin Netanyahu était le Premier ministre d’Israël en 2016, et le gouvernement israélien incluait un ministre sans portefeuille, Tzachi Hanegbi, nommé en mai. Il avait pour responsabilité des questions liées à la défense et aux affaires étrangères. Une référence à un Premier ministre anonyme dans le document apparaît ainsi : « Le ou autour du 28 juin 2016, [NOM CENSURÉ] a envoyé un message à STONE, « DE RETOUR À DC APRÈS DES CONSULTATIONS URGENTES AVEC LE PM À ROME. DOIS VOUS RENCONTRER MER SOIR AVEC DJ TRUMP À NYC ». Netanyahu avait effectué une visite d’Etat en Italie fin juin 2016.

Roger Stone arrive pour recevoir sa condamnation dans un tribunal fédéral à Washington, le 20 février 2020. (AP Photo/Manuel Balce Ceneta)

La référence explicite à Israël apparaît tôt dans le texte d’une déclaration sous serment de mai 2018 effectuée par un agent du FBI afin d’appuyer une demande de mandat. Elle se rapporte à un échange entre Stone et Jérôme Corsi, auteur américain et adapte des théories conspirationnistes américain. « Le 20 août 2016, CORSI a dit à STONE qu’ils doivent rencontrer [NOM CENSURE] pour déterminer si Israël prévoit de faire quelque chose en Oct », notait la déclaration sous serment.

La référence explicite à Jérusalem apparaît ensuite dans le même document, dans le contexte d’échanges entre Stone et son contact anonyme dans la capitale israélienne. « Le ou autour du 12 août 2016, [NOM CENSURÉ] a envoyé un message à STONE : ‘Roger, bonjour de Jérusalem. Du progrès ? Il va perdre à moins que l’on intervienne. Nous avons des infos clés. La clé est entre vos mains ! De retour aux Etats-Unis la semaine prochaine. Comment va votre pneumonie ? Merci.’ STONE a répondu : ‘Je vais bien. Les choses se sont compliquées. Réflexion. R.’ Le « Il » de la phrase « Il va perdre » serait une référence apparente à Trump.

Une partie du document du FBI, avec des termes censurés concernant des échanges entre Roger Stone et un contact à Jérusalem.

Le document censuré fait de nombreuses références à une « surprise en octobre » — apparemment la publication de documents par Julian Assange de Wikileaks afin de nuire à la campagne présidentielle d’Hillary Clinton et sauver celle de Trump.

Evoquant les références à Israël dans un article consacré au document publié tard mardi, le site Internet américain Politico a noté : « Les nouveaux messages révélés soulèvent souvent plus de questions qu’ils n’apportent de réponses. Ils montrent que Stone est en contact avec des présumés officiels de haut rang qui tentent d’arranger des rencontres avec Trump au plus fort de la campagne de 2016. »

Donald Trump devant le tribunal fédéral à Newark dans le New Jersey avec Roger Stone (à droite), le directeur du comité présidentiel de Trump, le 25 octobre 1999, pour la prestation de serment de la sœur de Trump comme juge d’appel de la cour fédérale. (AP Photo/Daniel Hulshizer)

Les documents publiés révèlent également l’étendue des communications entre Stone et Assange, dont le site Internet a publié pendant la campagne présidentielle de 2016 des emails des Démocrates piratés par les Russes. Les documents soulignent aussi les efforts des alliés de Trump à en savoir davantage sur la publication d’informations qui pourraient gêner la concurrente démocrate Hillary Clinton.

Les documents du FBI ont été rendus publics alors que Stone, condamné l’année dernière dans l’enquête de Mueller sur les liens entre la Russie et la campagne de Trump, attend une date pour son emprisonnement – les prisons fédérales sont actuellement confrontées à l’épidémie de coronavirus.

Dans un message privé sur Twitter de juin 2017 cité dans les documents, Stone avait affirmé à Assange qu’en « tant que journaliste, peu importe d’où vient l’information [concernant la fuite des mails démocrates], tant qu’elle est vraie et authentique ».

Le 19 mai 2017, le fondateur de Wikileaks Julian Assange s’exprime depuis le balcon de l’ambassade de l’Equateur à Londres. (Justin Tallis / AFP)

Il a cité comme exemple une décision de la Cour suprême de 1971 qui a facilité la publication dans la presse des Pentagone Papers, des documents classifiés du gouvernement sur la guerre du Vietnam.

« Si le gouvernement américain s’en prend à vous, je ferai tomber l’ensemble du château de cartes », a écrit Stone, selon une transcription du message cité dans la déclaration sous serment. « Quand les accusations d’agressions sexuelles montées de toutes pièces seront abandonnées, je n’ai connaissance d’aucun crime dont vous auriez à être gracié – salutations les plus respectueuses, R. »

Stone faisait probablement référence à l’enquête pour agression sexuelle abandonnée par les autorités suédoises. Assange, qui à l’époque se terrait dans l’ambassade de l’Equateur à Londres, a été inculpé l’année dernière pour une série de crimes par le Département américain de la Justice. Il est notamment accusé de violations de l’Espionage Act. Il aurait ainsi donné des instructions à l’ancien analyste du renseignement américain Chelsea Manning dans l’une des plus grandes fuites d’informations classifiées de l’histoire américaine.

Selon les documents, Assange, qui est emprisonné à Londres et qui lutte contre son extradition aux Etats-Unis, a répondu au message de Stone en 2017 en déclarant : « Entre la CIA et le DoJ [département de justice], ils en font pas mal. Du côté du DoJ, c’est très fort de la part de ceux qui sont obsédés à faire chuter Trump en essayant de faire pression sur nous pour sceller un accord. »

Stone a répondu qu’il faisait tout son possible pour « traiter la question au plus haut niveau gouvernemental ».

Les documents illustrent la curiosité de la campagne de Trump pour savoir quelles informations de Wikileaks allaient être rendues publiques. L’ancien conseiller de la Maison Blanche Steve Bannon a déclaré à l’équipe de Mueller lors des auditions qu’il avait interrogé Stone au sujet de Wikileaks parce qu’il avait entendu que Stone disposait d’un canal de communication avec Assange. Bannon espérait la publication de davantage d’informations compromettantes.

L’enquête de Mueller a permis d’identifier des contacts importants lors de la campagne de 2016 entre des proches de Trump et les Russes. Mais elle n’a pas établi de projet criminel visant à faire basculer l’issue de l’élection présidentielle.

Dans un communiqué publié mardi, Stone a reconnu que les déclarations sous serment contenaient des échanges, mais il a insisté pour dire que ceux-ci « ne prouvent aucun crime ».

« Je n’ai aucune crainte concernant leur publication parce qu’ils confirment qu’il n’y a eu aucune activité illégale et certainement pas de conspiration russe de ma part lors de l’élection de 2016 », a déclaré Stone. « Il n’y a, à ce jour, aucune preuve que j’avais ou que je connaissais la source ou le contenu des révélations de Wikileaks avant leur révélation publique. »

Stone était parmi les six proches de Trump inculpés dans l’enquête de Mueller. Il a été condamné l’année dernière pour avoir menti à des élus, pour avoir tenté d’influencer un témoin et pour obstruction à l’enquête du Congrès sur l’implication de la Russie dans la campagne présidentielle de 2016.

En février, un juge a condamné Stone à 40 mois de prison dans une affaire qui a mis à jour des fractures à l’intérieur du Département de la Justice. Des frictions ont éclaté entre Trump et le ministre de la Justice William Barr, qui a déclaré que les tweets du président sur l’affaire rendaient son travail « impossible ».

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