Un film israélien aborde la question des mariages « achetés »
Présenté au Festival du film israélien de Boston, « Valeria is Getting Married » évoque les questions morales et émotionnelles de ces unions
BOSTON – La guerre en Ukraine fait les gros titres depuis maintenant 13 mois, mais un nouveau long métrage israélien aborde une question, négligée dans l’ancienne république soviétique, mais toujours d’une actualité brulante, celui des épouses par correspondance.
Réalisé par la cinéaste israélienne Michal Vinik, « Valeria is Getting Married » raconte l’histoire de deux sœurs ukrainiennes, Christina et Valeria.
Chacune quitte son pays pour un mariage arrangé en Israël, mais leur destin est on ne peut plus different.
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Christina est confortablement mariée, mais sans passion, au courtier matrimonial sabra, Michael.
De son côté, lorsque Valeria rencontre Eitan en personne, son futur fiancé israélien, c’est la déception. Elle court s’enfermer dans la salle de bain de sa sœur et jette la clé, pour n’en sortir qu’au départ d’Eitan.
« L’amour est mondialisé aujourd’hui, comme n’importe quelle autre marchandise », affirme Vinik au Times of Israel.
« Valeria is Getting Married » a remporté le prix Ophir 2022 du meilleur scénario, l’une de ses 13 nominations de l’équivalent israélien des Oscars.
Il a également été distingué par le Festival international du film de Haïfa, qui lui a décerné le prix du meilleur film et du meilleur scénario.
Il a été projeté au Festival du film israélien de Boston le 19 mars.
« Je pense que cela dit quelque chose de profond sur les relations entre les sexes, que ce soit entre hommes et femmes, femmes et femmes, femmes et hommes », ajoute-t-elle.
La distribution du film est internationale : Dasha Tvoronovich, l’actrice qui joue Valeria, est originaire d’Ukraine. Tout comme le personnage qu’elle incarne dans le film, elle ne comprend pas l’hébreu.
Pendant le tournage du film, Tvoronovich a dû faire face à d’autres problèmes mondiaux, comme la fermeture des frontières d’Israël au début de la pandémie de COVID-19.
« C’était l’époque de la COVID, avant les vaccins », rappelle Vinik.
« Tout était très compliqué. Puis il y a eu la guerre entre la Russie et l’Ukraine, ce qui a encore compliqué les choses. »
Les recherches de Vinik sur la question des épouses par correspondance en Israël l’ont conduite dans les endroits les plus improbables, tels ce site Internet en hébreu qui promet des mariages arrangés ou cette chaine YouTube du même acabit, mise en ligne par un Américain et son épouse ukrainienne.
« C’est diversifié et mondialisé aujourd’hui », répète-t-elle, relevant toutefois que c’est moins courant en Israël qu’aux États-Unis, et que les mariées sont le plus souvent originaires des Philippines ou d’Ukraine.
« Ce n’est pas illégal parce que ce n’est pas vraiment de la prostitution. C’est d’une autre nature. »
Elle évoque ce que cette « autre nature » peut recouvrir, et qui fait que des femmes quittent leur pays pour plonger dans l’inconnu, à l’étranger, avec des hommes pour intermédiaires ou comme destinations.
Ces femmes, « parfois, elles ont l’impression qu’elles n’ont pas le choix », assure Vinik.
« Elles veulent quitter leur pays. C’est souvent leur principale motivation. »
Les hommes, « ce sont parfois des coeurs brisés », dit-elle. « Quelque chose dans leur estime de soi est détruit. »
Le film raconte le jour, très charge émotionnellement, où Valeria arrive en Israël.
Ses seules connaissances sur place sont sa sœur, son beau-frère et son fiancé.
D’autres problèmes l’attendent.
Valeria — « Lera » — ne comprend pas l’hébreu.
On s’attend à ce qu’elle aille à l’oulpan et que, tout comme sa sœur, elle se convertisse officiellement au judaïsme.
La réalisatrice a fait en sorte de manifester de la sympathie envers tous ses personnages, mais force est de constater que c’est parfois difficile.
Christina et Valeria offrent une image et une vision des choses très contrastée, explique Vinik – « l’une est pragmatique », alors que « la cadette n’a pas encore fait une croix sur ses rêves romantiques ».
Le film montre ce qui se passe lorsque Valeria, en dépit des circonstances, décide de prendre sa vie en main.
C’est un thème qui parle beaucoup à la réalisatrice, mais aussi, au-delà, à son public.
« Toutes les femmes à qui j’ai pu parler voient où je veux en venir », explique Vinik.
« Pendant de nombreuses années, les inégalités financières entre les sexes [ont été] dramatiques. Je sais que l’idée que les femmes soient financièrement indépendantes est encore nouvelle. Prenons ma génération, par exemple : nos mères et grands-mères ne divorçaient pas, elles n’avaient pas d’argent pour être autonomes. »
A propos des deux protagonistes masculins, Michael et Eitan, elle dit « j’adore vraiment le personnage [de Michael] ».
« J’essaie de ne pas porter de jugement. Pour autant, je ne pense pas que quiconque devrait acheter des femmes, des hommes ou des organes. Dans cette histoire, je savais que je devais aussi aimer les personnages masculins. »
Cela semble plus difficile pour elle de ressentir cela envers Eitan.
Il offre à sa future épouse un téléphone Samsung et mémorise des proverbes russes pour la séduire, mais ceci est éclipsé par des choses plus graves.
« Il fait de belles choses, sauf lorsqu’il achète une femme », affirme Vinik.
Elle affirme que, dans la réalité, 90 % de ces mariages arrangés ne durent pas.
« Mais j’en connais qui durent », dit-elle.
« Il y a de bons couples, pas uniquement des histoires tristes. Même si, au final, ce n’est pas une chose très morale. »
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