Un hôtel italien refuse la réservation d’un couple israélien, accusé de « génocide »
Booking.com a retiré l'hôtel des Dolomites de son site Internet, la communauté juive italienne et les autorités locales ont dénoncé un comportement antisémite
ROME — Le gérant d’un petit hôtel du nord de l’Italie a refusé une réservation faite par un couple israélien en accusant le peuple israélien d’être « responsable d’un génocide ». Les groupes juifs, de leur côté, ont fustigé un incident antisémite.
Le couple avait réservé deux nuitées pour le début du mois de novembre à l’hôtel Garni Ongaro à Selva di Cadore, un petit village de montagne niché dans les Dolomites, par le biais de la plateforme internet de réservation en ligne Booking.com.
A la veille de leur départ, le couple a reçu un message de l’hôtel : « Bonjour. Nous vous informons que les Israéliens, responsables d’un génocide en cours, ne sont pas des clients bienvenus dans notre établissement. »
Le gérant de l’hôtel a alors invité les touristes à annuler leur réservation, ajoutant que l’établissement serait « heureux de procéder à une annulation gratuite ». L’homme a depuis supprimé son profil sur Facebook – et il n’avait pas répondu à notre demande de commentaire au moment de la rédaction de cet article.
« Je ressens une infinie tristesse quand je pense à l’ignorance affichée par certains », a commenté Dario Calimani, le président de la Communauté juive de Venise, dans la journée de jeudi. « Ces gens, quand ils sont en désaccord avec ce qu’Israël peut faire, propagent et élargissent leur haine à l’égard de tous les Israéliens ».
L’incident a attiré l’attention du ministère des Affaires étrangères qui a confirmé avoir ouvert une enquête.
Vendredi, Booking.com a indiqué avoir supprimé l’hôtel de sa plateforme.
DISGUSTING: Hotel Garni Ongaro in Italy is sending this message to Israeli guests. This is the definition of collective punishment and should not be tolerated.
The pro-Palestinian mind virus has infected far too many people in the West. pic.twitter.com/MjH5RjO5yH
— Eyal Yakoby (@EYakoby) November 14, 2024
« Nous ne tolérons pas les discriminations, quelles qu’elles soient, et lorsque nous sommes amenés à recevoir une alerte – c’est rare – faisant part d’un comportement discriminatoire de la part d’un établissement, nous enquêtons immédiatement et nous expulserons toutes les structures concernées de notre plateforme comme nous venons de le faire dans ce cas précis », a dit le site de tourisme dans un courriel envoyé à l’Associated Press.
Le gouverneur de la région de Veneto, Luca Zaia, a évoqué un incident « extrêmement grave ».
« Je suis très perturbé et je suis sous le choc après ce qui s’est passé », a-t-il dit. « Veneto doit garantir que ses portes restent ouvertes à tous ».
Les incidents liés à l’antisémitisme ont augmenté en Italie – ils ont été de 80 à 90 par semaine, l’année dernière. Un chiffre à comparer à la trentaine d’incidents hebdomadaires qui étaient enregistrés avant que n’éclate la guerre à Gaza, a fait remarquer l’Observatoire de l’antisémitisme.
Le mois dernier, une fresque qui représentait un survivant du pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre 2023 – les hommes armés avaient tué plus de 1 200 personnes, des civils en majorité, et ils avaient kidnappé 251 personnes, prises en otage dans la bande de Gaza – a été vandalisée à Milan.
Le ministère de la Santé de Gaza, qui est dirigé par le Hamas, affirme que plus de 43 000 personnes ont été tuées ou sont présumées mortes dans les combats jusqu’à présent. Ce bilan est invérifiable et il ne fait pas de distinction entre civils et combattants. De son côté, Israël avait indiqué, au mois d’août, avoir tué quelque 17 000 hommes armés dans les combats depuis le début de la guerre, en plus d’un millier d’hommes sur le territoire israélien, le 7 octobre et dans les jours qui avaient suivi.
Israël nie avec vigueur les accusations de génocide à Gaza, affirmant que les soldats font tout leur possible pour éviter les victimes civiles alors qu’ils affrontent le groupe terroriste au pouvoir dans la bande. Ils soulignent que le Hamas s’incruste dans les structures civiles – hôpitaux, habitations, tunnels fortifiés creusés sous les immeubles résidentiels – lorsqu’il lance ses attaques contre l’État juif.
La nouvelle de l’incident survenu dans l’hôtel a eu lieu le même jour de la rencontre organisée, au Vatican, entre des ex-otages, leurs proches et le pape François.
Sharone Lifshitz, dont le père est encore retenu en captivité – sa mère avait été remise en liberté l’année dernière – a répondu à une demande de commentaire, disant que ce n’était pas une bonne chose de considérer tous les Israéliens comme des représentants du gouvernement, tout comme ce serait une erreur de considérer tous les Américains comme des représentants du gouvernement des États-Unis. La tendance à se prêter à ce type de raisonnement est un signe d’antisémitisme, a-t-elle ajouté.
« Tout le monde n’est pas d’accord avec le gouvernement italien – et pourtant, je ne pense pas que les Italiens qui voyagent à travers le monde soient jugés personnellement, en tant qu’individus, en fonction des actions qui ont pu être entreprises par leur gouvernement », a-t-elle expliqué.
« Le gouvernement d’Israël fait de nombreuses choses avec lesquelles je suis absolument, catégoriquement en désaccord en tant que personne… Et pourtant, nous sommes jugés comme des représentants du gouvernement », a-t-elle continué. « Je pense que l’antisémitisme et l’incapacité, de la part de trop de gens, à faire la distinction entre les individus et l’État semble être liée de manière très importante au peuple d’Israël et au peuple juif ».