Israël en guerre - Jour 370

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Un kibboutz ravagé le 7 octobre trouve un second souffle grâce aux pommes de terre et tomates génétiquement modifiées

Durement frappé, le kibboutz Holit teste une pomme de terre dont les toxines naturelles ont été génétiquement modifiées et une tomate qui pousse à l'état semi-séché

Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.

Pommes de terre Rumafeed récemment récoltées dans le Neguev, dans le sud d'Israël. (Ore Eldan, Rumafeed)
Pommes de terre Rumafeed récemment récoltées dans le Neguev, dans le sud d'Israël. (Ore Eldan, Rumafeed)

Dans le cadre de sa remise en état suite au pogrom commis par le Hamas le 7 octobre, le kibboutz Holit, situé à la frontière de Gaza, va tester deux nouvelles variétés de légumes particulièrement innovantes : une pomme de terre dont les toxines naturelles ont été génétiquement supprimées et une tomate qui pousse à l’état semi-séché sur pied.

Ces pommes de terre font partie de la famille des Solanum (morelles). A l’instar des aubergines et des tomates, elles contiennent de la solanine, un poison glycoalcaloïde utilisé par les plantes pour protéger des herbivores.

Les agriculteurs qui récoltent les pommes de terre en coupent et éliminent régulièrement les feuilles.

Dorénavant, grâce aux travaux sur le génome du professeur émérite Haim Rabinowitch, fondateur et directeur technique de Rumafeed, ces tiges et feuilles pourront être utilisées comme aliments pour le bétail, ce qui permettra de libérer des terres pour les cultures.

Rumafeed est l’une des cinq entreprises choisies cette année pour travailler avec Intel Ignite Tel-Aviv, l’accélérateur de startups qui a choisi de confier à Holit ces essais sur les pommes de terre.

Ex-recteur de l’Université hébraïque et de la faculté d’agriculture, Rabinowitch est expert en physiologie et génétique végétales. Il a fait partie de l’équipe qui a mis au point les premières tomates cerises commercialisées dans les années 1980, ainsi que les premières tomates cerises de longue conservation comptant deux rangées de chaque côté de la tige centrale.

Le professeur émérite Haim Rabinowitch avec ses pommes de terre sur une parcelle d’observation du Neguev dans le sud d’Israël. (Ore Eldan, Rumafeed)

Il explique au Times of Israël que c’est en réfléchissant aux problèmes d’une population mondiale en forte expansion et des « 2,3 milliards de personnes qui se couchent le ventre vide » qu’il a pris conscience de la nécessité de faire quelque chose contre le gaspillage occasionné par la culture des pommes de terre et des tomates.

« Avant la récolte, on utilise des herbicides pour détruire les feuilles », explique-t-il. « Imaginez les dommages causés à l’environnement. Près de 400 millions de tonnes de pommes de terre sont cultivées chaque année de par le monde. Près de 170 tonnes sont jetées, sans oublier des intrants tels que l’eau et la main-d’œuvre.

Rabinowitch précise que la valeur nutritionnelle des feuilles de pomme de terre est comparable à celle de la luzerne et que les moutons nourris avec les feuilles de pomme de terre prennent 20 % de poids en plus que ceux nourris avec les feuilles de luzerne.

Environ 20 % des terres agricoles d’Israël sont situées dans la zone frontalière de Gaza. Elles correspondent à 60 % des champs de pommes de terre, 50 % des champs de tomates et 40 % des zones de culture des carottes et des choux. Aujourd’hui, les producteurs de pommes de terre israéliens importent des semences de pommes de terre de l’étranger.

Les pommes de terre Rumafeed sont triées au kibboutz Saad dans le Neguev, dans le sud d’Israël. (Ore Eldan, Rumafeed)

L’idée de Rabinowitch est d’installer au kibboutz Holit un centre dans lequel les agriculteurs pourront se procurer des semences génétiquement modifiées.

Il explique être à la recherche de 3 millions de shekels – idéalement 12 millions de shekels sur trois à quatre ans – pour implanter les installations permettant de cultiver des graines issues de cultures tissulaires jusqu’à l’obtention de plantes abouties.

David Ben Lulu, habitant du kibboutz Revivim chargé de la présidence du kibboutz Holit tant que ses membres vivent dans des logements temporaires, a salué « une idée formidable ».

Bien décidés à faire du kibboutz un centre d’innovation agricole, Ben Lulu et d’autres ont rencontré plusieurs startups, dimanche, et décidé de s’associer avec trois d’entre elles, à commencer par Rumafeed. Le premier essai de pommes de terre est prévu pour le printemps prochain.

Des tomates semi-séchées de Supree sur pied. (Avec l’aimable autorisation de Supree)

L’une des deux autres startups – Suprême, filiale de NRGene – développe des fruits et légumes qui sèchent naturellement sur pied tout en conservant leurs propriétés nutritionnelles et leur goût. Le kibboutz Holit testera également les tomates semi-séchées.

Le porte-parole de Suprême explique qu’il s’agit pour elle « d’accroitre sa surface agricole et ses capacités de production » et qu’elle est en pourparlers avec plusieurs kibboutzim, notamment dans la zone frontalière de Gaza. Ces collaborations sont pour elle une étape stratégique vers la réalisation de ses objectifs d’expansion et le moyen de contribuer à la reconstruction des communautés agricoles locales, ajoute le porte-parole.

La troisième start-up dont les travaux seront accueillis au kibboutz Holit est Liva, qui s’est spécialisé dans l’utilisation des bonnes bactéries pour lutter contre la détérioration des aliments par les microbes et en améliorer la durée de conservation, des fraises aux avocats en passant par le pain.

Lors du pogrom du 7 octobre, 12 habitants de Holit ont été assassinés, ainsi qu’un ouvrier moldave et deux travailleurs népalais.

Youssef Hamis Ziyadne et ses enfants Hamza, Bilal et Aisha, originaires de la communauté bédouine d’Israël, ont été enlevés à Gaza alors qu’ils travaillaient au kibboutz. Aïcha et Bilal ont été libérés en novembre. Youssef et Hamza sont toujours otages du Hamas dans l’enclave côtière.

Le kibboutz est actuellement vide, à l’exception des membres de l’équipe de sécurité qui en assurent la surveillance. Les membres de la communauté ne devraient pas revenir avant la fin de l’été prochain.

Selon Ben Lulu, directeur commercial depuis 14 ans chez Revivim, qui s’est associé à Holit et au kibboutz Reim dans le cadre d’un partenariat agricole tripartite, dit que le projet est de créer un écosystème à Holit pour tester les start-ups agricoles.

La communauté de Holit pleure encore ses morts, blessés et disparus et « nous pensons au renouveau », conclut Ben Lulu. « C’est sans doute l’apanage de ceux qui, comme moi, vivent ailleurs. »

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