Un moment d’humilité pour un Israël auto-satisfait
Si nous sommes censés soigner cette nation, le meurtre d’Abou Khdeir doit nous enlever l’illusion que nous sommes moralement supérieurs à nos voisins
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Alors, est-ce que ce meurtre est plus bouleversant pour Israël que l’assassinat d’Yitzhak Rabin, quand un arrogant psychopathe a décidé, dans un contexte qui ne lui a fourni que très peu d’encouragements, que Dieu voulait de lui qu’il assassine le Premier ministre d’Israël pour éviter que l’on abandonne la Terre promise par l’Eternel aux mains des méprisables Palestiniens ?
Est-ce plus bouleversant que les meurtres en masse perpétrés par Baruch Goldstein, le médecin qui a tiré sur 29 Palestiniens alors qu’ils priaient aux tombeaux des Patriarches ?
Ce sont des crimes terribles et inimaginables, ces meurtres qui nous entachent tous, qui ont changé le cours de l’histoire cette terre, qui ont poussé cette démocratie fragile au bord du gouffre – ils trouvent toujours un écho deux décennies plus tard.
Et pourtant, le meurtre brutal du résident de Jérusalem Est de 16 ans, Mohammad Abou Khdeir, supposément par un groupe de Juifs extrémistes, ne nous entache et nous couvre pas moins de honte, et pose de nouvelles questions effroyables sur notre pays et sur la direction qu’il prend.
Si nous devons guérir cette nation, le meurtre de mercredi dernier doit nous débarrasser, une bonne fois pour toutes, de cette illusion complaisante que nous avons une supériorité morale spécifique sur nos voisins. Si nous avions eu une telle supériorité, elle ne doit pas être affirmée par des gens qui peuvent engendrer un groupe de criminels capables d’enlever au hasard un adolescent arabe et de le brûler à mort car son seul crime a été de se trouver là le jour de l’enterrement de trois victimes juives du terrorisme.
Nous, Israéliens, étions persuadés que nous n’avions aucun point commun avec les tueurs du Hamas qui ont assassiné les trois adolescents israéliens innocents sans aucun scrupule – nous avions tort.
Nous devons comprendre qu’alors que nous sommes dans notre bon droit de nous élever contre les incitations constantes contre Israël, souvent encouragées par le leadership palestinien, notre maison n’est pas plus acceptable.
Il est réconfortant d’entendre nos politiciens et nos rabbins rechercher dans les profondeurs de leurs lexiques pour trouver les mots pour condamner, mais ils sonnent un peu creux dans une ambiance d’hostilité formée par les politiciens et les éditorialistes arabes.
J’ai souvent souligné l’environnement toxique existant en Cisjordanie qui a créé un assassin palestinien de 16 ans coupable d’avoir tué un soldat de 18 ans, Eden Attias, alors qu’il dormait dans un bus en route pour Afula en novembre dernier.
Que peut-on alors dire de l’environnement israélien dans lequel un groupe de jeunes est capable de brûler à mort un adolescent palestinien, tout en sachant qu’ils avaient essayé d’enlever un garçon palestinien de 9 ans la veille ?
Ils ont commencé ? Ils sont pires ? Ils nous haïssent ? Eh bien peut-être que c’était le cas et peut être que ça l’est encore, et peut-être que c’est une réalité. Mais ces arguments ne nous aident pas. Ces arguments ne vont pas sauver notre société.
Nous avons besoin d’accepter le fait que notre domination, en plus de mettre en danger la démocratie israélienne, nous ronge, noircit nos cœurs. Nous ne pouvons pas imposer des accords de paix à nos voisins qui s’opposent à tous compromis qui permettraient de garantir notre sécurité, mais nous devons tout faire pour essayer de créer un environnement dans lequel nous pourrions faire des progrès – un environnement éclairé pour les deux parties.
Clairement, nous sommes affectés par le fait de vivre dans une région où l’on est généralement indifférent au don de Dieu qu’est la vie. Si l’Etat juif, la patrie de la Nation juive, ne symbolise plus le respect de la vie, nous n’avons pas de droit particulier à être ici.
Nous sommes tirés vers le bas, et la vidéo de policiers de la police des frontières, vraisemblablement battant violemment le cousin d’Abou Khdeir, souligne l’intensité du risque que nous pourrions sombrer.
Peut-être que Tariq Abou Khdeir a participé à de violentes manifestations contre les forces israéliennes, même s’il le nie. Peut-être qu’il a résisté à l’arrestation et avait un lance-pierre, comme la police l’affirme.
Et peut-être que la vidéo le montrant se faire battre a été remaniée de manière tendancieuse.
Mais cet enregistrement semble montrer un suspect qui ne pose aucun risque et qui se fait matraquer sans pitié en prenant des coups de pied par des policiers en uniforme.
Les autorités devraient, au lieu de tenter de s’excuser, s’attaquer au problème de cette habitude intenable qui existe dans les rangs.
On peut essayer de se réconforter en affirmant que nos voyous et nos tueurs sont des aberrations, méprisées par la population en général, alors que leurs voyous et leurs tueurs sont généralement considérés et salués comme des héros.
Mais nos aberrations se multiplient : nos tueurs, nos voyous, nos groupes terroristes juifs et nos attaquants en uniforme. Et contrairement aux Palestiniens, nous ne pouvons pas utiliser « l’occupation » comme ligne de défense – car nous sommes les maîtres de notre destinée et nous devons réaffirmer nos valeurs supérieures.