Un nez électronique pour détecter cancers et pré-cancers de l’estomac
Le test affiche un taux de fiabilité de 73 % pour le classement entre cancéreux et les autres
Un nez électronique mis au point par des Israéliens s’est révélé capable de détecter des changements dans l’haleine de personnes atteintes de cancer de l’estomac ou risquant d’en développer, selon un article publié mardi.
Ce n’est pas la première fois qu’est testée la technique consistant à analyser chimiquement les composés organiques volatils (VOC en anglais) contenus dans l’haleine de patients pour déceler des cancers.
On sait que la production de VOC est altérée chez des patients atteints de tumeurs malignes, sans qu’on comprenne avec précision les mécanismes biochimiques impliqués dans cette transformation.
La détection de ces modifications par des appareils complexes fonctionnant comme des nez électroniques (voire même par des chiens à l’odorat développé dans un essai autrichien en 2012) a déjà été expérimentée par le passé pour détecter des cancers du poumon ou du côlon.
Ce type d’approche a l’avantage de rendre le dépistage « non invasif, indolore et sans effet secondaire indésirable », met en avant une équipe de chercheurs israéliens et lettons qui se sont eux intéressés à la détection du cancer de l’estomac.
La nouveauté de cet essai, conduit à Riga, en Lettonie, tient au nombre relativement important de patients testés. Les précédents essais ne concernaient que « de petits groupes de patients », souligne l’article publié en ligne dans la revue Gut du groupe britannique BMJ.
L’essai a par ailleurs cherché à distinguer les patients souffrant de cancers avérés de l’estomac, de ceux ayant des lésions gastriques « à haut risque » de développer plus tard un cancer et de ceux avec des lésions gastriques « à bas risque » de tumeur.
Un cancer de l’estomac naît en effet d’une « cascade de lésions précancéreuses », rappellent les chercheurs.
Au total 488 patients ont été testés, dont des personnes ayant déjà été diagnostiquées d’un cancer de l’estomac et d’autres porteuses de lésions gastriques avec différents profils de risque cancéreux.
Nanoparticules d’or
De simples échantillons d’haleine ont été prélevés sur chacun des patients, qui avaient au préalable jeûné pendant 12 heures.
Deux méthodes d’analyse de l’haleine ont été expérimentées en parallèle: l’une coûteuse mais déjà éprouvée (par chromatographie en phase gazeuse) et l’autre expérimentale, moins chère et plus simple (par analyse « nanoarray »), en utilisant des détecteurs avec des nanoparticules d’or.
Cette dernière méthode mise au point à l’Israel Institute of Technology de Haïfa, s’est montrée capable de « distinguer efficacement » les patients souffrant d’un cancer de l’estomac, de ceux porteurs de lésions à « haut risque », de ceux ayant des lésions à « bas risque » et encore de ceux exempts de toute lésion gastrique.
Les chercheurs estiment que ce test « potentiellement bon marché » pourrait être développé pour surveiller l’évolution de patients souffrant de lésions précancéreuses pour savoir si celles-ci évoluent ou non vers des cancers.
Pouvoir distinguer les lésions à faible risque d’évolution en cancer de celles qui comportent un risque élevé, par un simple test d’haleine, « permettrait d’éviter des endoscopies inutiles et de limiter les examens à ceux qui en ont réellement besoin », selon les chercheurs.
Mais le gastroentérologue français Jean-Christophe Saurin, du Centre hospitalier de Lyon, avoue son scepticisme face à cette méthode encore « très préliminaire » et dont la sensibilité pour distinguer les patients cancéreux des autres « n’est pas exceptionnelle ».
Le test affiche un taux de fiabilité de 73 % pour le classement entre cancéreux et les autres. Pour être « intéressant », l’essai nécessiterait « d’être reproduit par d’autres » et de comporter un volet « prospectif » sur l’évolution des patients catalogués comme à « risque de cancer », estime le Dr Saurin.
La technologie israélienne va toutefois être testée dans plusieurs pays européens sur plusieurs « milliers de patients », certains porteurs de lésions précancéreuses, dans le but de « valider » la méthode, selon l’article.