Un panel médical devrait statuer que Malka Leifer a feint la maladie psychique
L'avocat de cette directrice d'école recherchée pour abus sexuels chercherait à empêcher le panel de tirer ses conclusions, ce qui aurait un impact sur l'extradition de l'accusée
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Un comité de médecins nommé par la cour devrait déterminer que Malka Leifer a bien feint la maladie psychique pour éviter son extradition en Australie, où elle est accusée de 74 chefs d’abus sexuels, s’est vu confirmer jeudi le Times of Israël.
Cette décision prise par le comité aurait un impact considérable sur le jugement que se prépare à rendre la cour de district de Jérusalem, le 23 septembre, dans le dossier impliquant cette ancienne directrice de l’école ultra-orthodoxe pour filles Adass Israel de Melbourne, qui doit se prononcer sur l’aptitude psychologique de Leifer à vivre une audience d’extradition.
Au cours d’une réunion organisée le mois dernier, le panel avait « indiqué » qu’il pensait que Leifer mentait, avait déclaré un responsable médical au Times of Israël, confirmant en cela un reportage diffusé par la Treizième chaîne. Toutefois, deux psychiatres et un avocat avaient réclamé des documents supplémentaires concernant son traitement en prison avant de prendre une décision définitive.
Le comité doit encore se réunir.
Leifer avait quitté l’Australie en 2008 avec l’aide des membres du conseil d’administration de l’école Adass lorsque les accusations à son encontre avaient émergé.
Elle avait été arrêtée en Israël en 2014 après une demande d’extradition émise par Melbourne, mais la cour de Jérusalem a suspendu la procédure en 2016, évaluant qu’elle était psychologiquement dans l’incapacité de subir un procès. Acceptant l’argument soumis par la défense, qui avait clamé qu’elle était trop malade pour seulement quitter son lit, le juge Amnon Cohen avait finalement levé toutes les restrictions à l’encontre de l’ancienne directrice.
Cohen avait néanmoins ordonné qu’elle apparaisse tous les six mois devant une commission médicale qui déciderait s’il fallait qu’elle continue à être soumise à un traitement psychiatrique.
Suite à une opération sous couverture qui avait semé le doute sur son réel état psychologique, Leifer avait été arrêtée une nouvelle fois au mois de février 2018 et est depuis restée en détention.
L’opération avait été lancée sur demande d’Interpol après l’obtention d’images la montrant se déplacer dans sa ville de résidence sans difficulté apparente.
L’ONG Jewish Community Watch (JCW) avait en effet engagé des détectives privés, lesquels avaient caché des caméras dans l’implantation ultra-orthodoxe d’Emmanuel où Leifer et sa famille avaient trouvé refuge.
Chana Lomp, juge de la cour de district de Jérusalem chargé du dossier de Leifer depuis sa dernière arrestation, avait alors ordonné qu’elle continue à apparaître devant le panel tous les six mois.
Ce dernier devait se réunir encore une fois le 11 juillet, une rencontre pendant laquelle ses membres devaient prendre connaissance de documents supplémentaires qu’ils avaient demandé avant de prendre une décision.
Mais l’avocat de Leifer, Yehuda Fried, était malade et la réunion avait été décalée d’une semaine. Elle a été de nouveau annulée après que l’avocat est parti en vacances, a déclaré un responsable médical au Times of Israël.
Les deux parties se sont rencontrées jeudi mais l’audience a été une nouvelle fois reportée après que le président a accepté une requête de Fried, qui demandait le départ d’un médecin qui, selon le juriste, avait des préjugés contre sa cliente, a fait savoir la Treizième chaîne. Ce médecin était présent lors d’une réunion en date du 24 juin.
Un responsable judiciaire a confié au Times of Israël que Fried avait tenté, en vain, de faire effacer les notes prises lors de l’audience du 24 juin.
Fried a refusé une demande de commentaires.
Alors que les tribunaux vont être en congé pendant le mois d’août, une audience de suivi doit encore être programmée et elle pourrait ne pas avoir lieu avant que le tribunal de Jérusalem ne rende sa décision concernant l’aptitude psychologique de Leifer à être extradée.
Si le panel se réunit avant le 23 septembre, son jugement devrait avoir un poids considérable dans la décision rendue par Lomp dans la mesure où elle a ordonné à la commission de continuer à se réunir.
Pour sa part, une victime présumée de Leifer, Dassi Erlich, a déclaré se sentir « abandonnée par un système qui devrait être simple mais qui, d’une manière ou d’une autre, a permis qu’on le manipule encore et encore ».
« Jusqu’à présent, c’est Leifer qui échappe à la justice et maintenant, c’est son avocat qui exploite toutes les occasions pour s’assurer que la justice ne se mette pas en marche », a-t-elle ajouté.
Malgré les preuves apparemment écrasantes qui ont été fournies par l’organisation JCW, la procédure d’extradition de Leifer avait traîné encore une année supplémentaire, le tribunal continuant à débattre de son état psychologique.
Le psychiatre du district de Jérusalem responsable de l’évaluation de Leifer, le docteur Jacob Charnes, avait changé d’avis à trois occasions concernant la capacité de Lifer à être extradée.
Au mois d’avril 2015, Charnes avait signé un avis juridique affirmant que la pédophile présumée était apte à être envoyée vers l’Australie.
Au mois de décembre de la même année, il était revenu sur sa conclusion dans un autre avis en direction du tribunal.
Après la nouvelle arrestation de Leifer, en 2018, les psychiatres avaient remis à jour une évaluation dans laquelle ils estimaient, une fois encore, qu’elle était en mesure d’être extradée.
Charnes avait alors refusé de signer le document pendant plusieurs mois avant de finalement le ratifier.
Toutefois, quand le psychiatre avait été interrogé par la défense concernant son évaluation, à la fin de l’année dernière, il avait expliqué au tribunal recommander un examen supplémentaire de Leifer – une proposition rejetée par les deux parties.
Au mois de février, la police a ouvert une enquête sur le vice-ministre de la Santé Yaakov Litzman qui est soupçonné d’avoir exercé des pressions sur les personnels de son bureau – et notamment sur Charnes — pour qu’ils changent les conclusions de leurs évaluations psychiatriques en jugeant que Leifer ne supporterait pas une extradition.
Un responsable judiciaire avait déclaré au Times of Israël que la police soupçonnait Charnes d’avoir modifié sa conclusion après avoir été contacté par le bureau de Litzman. Charnes avait été interrogé après lecture de ses droits dans l’affaire lancée contre le vice-ministre.
Le mois dernier, le radiodiffuseur Kan avant annoncé que la police réfléchissait à recommander l’inculpation de Liberman qui aurait utilisé son bureau pour fournir une aide illicite à des délinquants sexuels présumés.