Un programme clandestin soigne des milliers de malades orthodoxes à domicile
L'homme qui a lancé cette initiative privée menée sans que les autorités ne le sachent explique qu'elle sauve des vies en allégeant les pressions sur les hôpitaux

Un vaste réseau de bénévoles, dans les secteurs ultra-orthodoxes, soigne discrètement et à domicile des milliers de malades du coronavirus, et ce depuis des mois – une alternative à la prise en charge dans les hôpitaux, actuellement bondés – un programme qui passerait sous le radar des autorités.
Cette initiative a vu le jour dans les mouvements haredim antisionistes désireux d’éviter les hôpitaux israéliens. Elle s’est ensuite propagée dans la communauté toute entière alors que les centres médicaux étaient menacés de saturation et que les personnels-soignants étaient submergés, a fait savoir la Douzième chaîne dimanche soir.
Selon ses organisateurs, ce programme offrirait de meilleurs soins que ce n’est le cas dans les hôpitaux et permettrait d’alléger une partie du fardeau qui pèse sur le système de soins. Ils ont préconisé la mise en place d’une initiative similaire hors de la communauté ultra-orthodoxe.
Au moins 170 personnes prises en charge par ce réseau secret de bénévoles se trouveraient actuellement dans un état grave et plus de 2 000 personnes dans un état critique ont bénéficié de traitements au cours des six derniers mois, selon le reportage. Les organisateurs affirment que seuls 10 à 15 patients ont fini à l’hôpital et que trois – notamment un malade qui a été filmé par la Douzième chaîne, la semaine dernière – ont succombé à la maladie.
La chaîne a indiqué que plusieurs leaders de la communauté haredi avaient bénéficié de ces soins à domicile et notamment le chef du mouvement hassidique Belz, dorénavant complètement guéri.
Des images filmées au siège de l’initiative, dans le quartier de Mea Sharim, à Jérusalem, ont montré des équipements médicaux ainsi qu’un grand nombre de tests de dépistage au coronavirus, les organisateurs affirmant qu’ils avaient en possession, au total, 220 concentrateurs d’oxygène répartis dans plusieurs villes et municipalités.
« Nous ne fournissons que la consultation initiale et indiquons le niveau de saturation en oxygène et la tension », a déclaré l’un des initiateurs du programme, Yitzhak Markovich, de l’organisation « Hasdei Amram ». « Un médecin et un infirmier viennent, à domicile, prélever des échantillons sanguins puis nous les transférons à un laboratoire. Il y a deux laboratoires qui travaillent avec nous », a-t-il continué.
Markovich a montré une liste de 170 patients qui ont actuellement besoin d’un équipement médical, ajoutant que l’Etat n’avait pas connaissance de leur cas et que 330 autres personnes, vivant à Jérusalem, Beit Shemesh, Bnei Brak, Ashdod, Modiin Illit et Elad – qui prenaient simplement des médicaments pour traiter les symptômes – n’avaient été, eux non plus, enregistrés nulle part.
Il a expliqué que les 170 personnes inscrites sur la liste seraient considérés par les hôpitaux comme étant dans un état grave, ce qui signifie que l’Etat juif compterait, en définitive, plus de 1 000 personnes gravement atteintes par le virus et non 837 – le chiffre avancé lundi matin par le ministère de la Santé.
Il a ajouté que les médecins décidaient des cas dans lesquels une hospitalisation devenait indispensable.

Les caméras de la Douzième chaîne ont filmé un bénévole se rendant aux domiciles de plusieurs hommes âgés dans un état grave – et notamment chez un septuagénaire, âgé précisément de 76 ans, qui aura reçu la visite des membres du réseau trois à quatre fois par jour. Il s’était trouvé dans l’incapacité de parler et avait connu des problèmes respiratoires majeurs pendant plusieurs jours.
Il avait refusé d’aller à l’hôpital, sa famille affirmant que cela serait très dangereux et que le traitement reçu à domicile serait meilleur en raison de la surcharge du système et de la séparation d’avec sa famille.
Selon la Douzième chaîne, l’homme a été finalement emmené à l’hôpital contre sa volonté après la détérioration de son état de santé. Il est mort trois heures à peine après avoir été filmé.
Les médecins participant au projet, qui appartiennent tous à des institutions médicales établies, ont refusé d’être nommés publiquement.
L’un d’entre eux a déclaré : « En tant que médecin, je soigne des êtres humains. Notre objectif n’est pas d’aider des gens à contourner la loi. Notre objectif, c’est d’aider le système de soins et d’alléger le fardeau qui pèse sur lui. Il n’est pas question ici d’un ‘Etat dans l’Etat' », s’est-il exclamé.
Ce point de vue n’est pas partagé par les organisateurs ultra-orthodoxes du programme.
« C’est une marque d’autonomie ici, et alors ? », a déclaré l’un d’eux. « Est-ce qu’on a volé quelque chose ? Est-ce qu’il y a un danger ? On vient en aide, c’est tout. Les gens guérissent et presque aucun de nos malades n’est mort, alors les gens peuvent bien dire ce qu’ils veulent : Je considère pour ma part qu’on sauve des vies. »

Environ 7 000 Israéliens, selon les estimations, disposent actuellement, chez eux, de dispositifs d’oxygène appartement au groupe d’aide médicale Yad Sarah, qui travaille avec des bénévoles, a indiqué son directeur-général Moshe Cohen au micro de la radio militaire, jeudi – ce qui permet l’hospitalisation à domicile.
Cohen a affirmé que sans Yad Sarah, le système de soins serait surchargé. Yad Sarah fournit des équipements médicaux à un grand nombre de membres de la communauté ultra-orthodoxe.
Les chiffres du ministère de la Santé publiés dans la matinée de lundi ont révélé que le nombre d’Israéliens touchés par le coronavirus, depuis le début de la pandémie, s’élevait à 292 230, dont 53 850 cas actifs. Le bilan des décès s’élève à 1 993 morts.