Une étude se penche sur le diagnostic précoce de la maladie de Parkinson
Des chercheurs de l'Université hébraïque ont identifié un mécanisme dans le cerveau qui pourrait augurer de cette maladie dégénérative, évoquant aussi la constipation
Une nouvelle étude réalisée par des chercheurs israéliens pourrait permettre de diagnostiquer de façon plus précoce la maladie de Parkinson, soit des années plus tôt que ce n’est le cas actuellement, ce qui ouvrirait potentiellement la porte à une meilleure lutte contre la progression de la maladie.
Une équipe de l’Université hébraïque de Jérusalem a ainsi isolé un facteur déterminant qui, s’il est commun, n’est pas souvent discuté dans cette maladie dégénérative : la constipation.
Tandis que la constipation chronique est un problème banal, l’âge venant, et qu’il n’indique pas un dysfonctionnement en soi, elle est également directement liée à Parkinson, apparaissant parfois chez des patients vingt ans avant qu’un diagnostic de Parkinson ne soit posé.
Les médecins manquent actuellement d’une méthodologie validée en laboratoire pour le diagnostic définitif de Parkinson, et la maladie est principalement détectée par le biais de symptômes moteurs qui indiquent que le malade souffre de cette pathologie – tremblements, rigidité et difficultés pour se déplacer, problèmes d’équilibre et de coordination.
Au moment où ces symptômes sont clairement visibles, le cerveau a perdu trop de cellules de dopamine pour pouvoir guérir. Les traitements qui sont actuellement disponibles ciblent les symptômes plutôt que d’inverser la progression de la maladie.
Mais un diagnostic précoce peut être d’une importance primordiale. De nombreux traitements prometteurs ont échoué lors de leurs essais mais, selon le professeur de l’Université hébraïque Joshua Goldberg, qui a dirigé l’étude la plus récente, ce n’est pas nécessairement parce que quelque chose s’était mal passé avec le traitement – mais tout simplement parce que le diagnostic avait été posé trop tard pour qu’un médicament potentiel soit réellement utile.
La recherche de l’Université hébraïque – publiée mercredi dans le journal Science Advances et dirigée par le professeur Goldberg du département de Neurobiologie médicale, en collaboration avec le professeur Jochen Roeper de l’université Goethe de Francfort, en Allemagne – mentionne la constipation comme symptôme potentiel précoce de la maladie.
La maladie de Parkinson est liée depuis longtemps à la formation de dépôts minuscules de déchets de protéine dans les cellules du cerveau nommés « les corps de Lewy », du nom du docteur Friedrich Lewy qui les avait découvertes en 1912. Il est encore difficile de dire si ces dépôts sont une cause de la maladie dégénérative ou s’ils n’en sont qu’un symptôme. Selon Goldberg, cela pourrait être un peu des deux.
Mais la présence de « corps de Lewy » n’est pas facile à détecter chez les patients vivants et leur présence dans le cerveau n’a été observée qu’après la mort des malades. Ils ne peuvent donc pas être utilisés comme outil diagnostic.
L’un des premiers lieux, dans le cerveau, où peuvent être trouvés les « corps de Lewy » est la zone affectant les activités gastro-intestinales – et plus spécifiquement dans le tractus gastro-intestinal supérieur.
L’équipe du professeur Goldberg a tenté d’identifier le mécanisme sous-jacent précis liant la présence de « corps de Lewy » dans le cerveau à la constipation. La constipation non-Parkinsonienne – qui n’est pas dirigée par des problèmes cérébraux – se centre davantage sur le grand intestin plutôt que sur le tractus gastro-intestinal supérieur. Et les scientifiques espèrent donc identifier le mécanisme responsable de la constipation dans le tractus gastro-intestinal supérieur qui leur permettra de détecter les cas susceptibles de susciter des inquiétudes.
Dans son étude, l’équipe de recherche a trouvé un moyen de détecter la manière dont les « corps de Lewy » ont un impact sur le système gastro-intestinal en utilisant une protéine spécifique, l’alpha-synucléine, qui est connue pour être la principale constituante des « corps de Lewy ».
L’équipe a surexprimé l’alpha-synucléine dans les cellules de cerveau de souris qui modulent l’activité du tractus gastro-intestinal supérieur.
« Le résultat a été que la surexpression de la protéine a amené ces cellules cérébrales à rétrécir et leur activité électrique à ralentir », a noté l’étude. Puis les souris ont développé un type de constipation similaire à celui qui est associé à Parkinson.
« Il est donc probable que c’est ce processus qui se produit également chez les êtres humains au stade précoce de la maladie de Parkinson », a continué l’étude.
« Pour autant que nous le sachions, c’est la première fois qu’il est possible de décrire une chaîne des événements simple faisant le lien entre la manière dont la protéine alpha-synucléine a un impact sur les cellules cérébrales et les symptômes précoces qui précèdent la maladie et que nous connaissons depuis longtemps », continue Goldberg, vantant le potentiel de cette découverte.
« Prenons par exemple un patient de 55 à 60 ans qui souffre de constipation. Nous pourrions un jour créer un test sur la base des changements neuronaux que nous avons découverts pour déterminer s’il y a un élément neuronal en jeu qui pourrait nous faire penser à Parkinson », dit-il encore.
Goldberg souligne que le diagnostic précoce ne se baserait pas seulement sur la constipation et qu’une batterie de tests pourrait être utilisée pour indiquer une présence de la maladie.
Ce qui pourrait permettre d’administrer des traitements curatifs avant que les cellules ne meurent massivement dans le cerveau, laissant le malade définitivement et de plus en plus handicapé.
Alors qu’il a admis qu’il y avait, pour le moment, surtout des hypothèses, il a déclaré « qu’un jour, à l’avenir, nous sommes certains que nous serons capables d’identifier une grande variété de biomarqueurs – et notamment physiologiques, comme celui que nous proposons aujourd’hui – qui nous permettront de diagnostiquer de manière sûre la maladie, bien avant que ce n’est encore le cas aujourd’hui ».