« Une lutte inimaginable » : la mère d’Edan Alexander se bat pour son fils otage
Yael Alexander, mère d'un soldat de Tsahal américano-israélien, navigue entre Israël, sa maison du New Jersey et Washington : "Depuis le 7 octobre, je me sens au bord du gouffre"

Yael Alexander, la mère d’Edan, soldat pris en otage par des terroristes du Hamas à la frontière de Gaza le 7 octobre 2023, s’effondre sur le canapé, dans le salon de ses parents, en lisant un article sur son téléphone.
« Super, il a cité le nom d’Edan », déclare Alexander à propos d’un article de CBS News citant l’envoyé spécial des États-Unis au Moyen-Orient, Steve Witkoff.
Interrogé sur la libération de ce natif de Tenafly, dans le New Jersey, considéré comme le dernier otage américain vivant, Witkoff a déclaré à CBS : « Il est une priorité. Nous allons parvenir à ramener Edan chez lui. »
Ce sont des phrases comme celles-ci qui font que Yael Alexander connait de puissantes montées d’adrénaline.
« C’est un peu comme des montagnes russes », confie-t-elle au Times of Israel. « J’ai l’impression d’être au bord du gouffre depuis le 7 octobre. Je suis dans un bain d’adrénaline, à 100 %, toute la journée, mais c’est normal lorsque votre fils est en captivité dans les tunnels du Hamas et que vous devez le faire sortir, et vite. »
Depuis ce jour fatidique, chacune des journées de Yael et Adi Alexander, qui sont nés et ont grandi en Israël mais vivent depuis les 20 dernières années avec leurs trois enfants aux États-Unis.

Cette semaine, pourtant, l’urgence se fait plus pressante encore, explique Alexander, alors que la première phase de l’accord sur les otages, conclu avec le Hamas, touche à sa fin, et que la deuxième phase, qui permettrait à Edan Alexander et aux 62 derniers otages de retrouver la liberté, reste à négocier.
« C’est un moment très difficile », poursuit Alexander, créatrice de gâteaux et artiste qui ne travaille plus depuis que son fils a été pris en otage. « Ce combat est en tout point inimaginable. Je ne m’y attendais pas ».
Elle évoque une impression d’action, avec le président Donald Trump, qui, selon elle, n’était pas perceptible du temps de la précédente administration.
« Trump tweete, il en parle, on le sent passionné : il veut que cela arrive », affirme-t-elle. « Peut-être parle-t-il la langue du Moyen-Orient ? »

Ces 16 derniers mois, Alexander et son mari ont fait la navette entre Israël, leur maison de Tenafly, et Washington, DC, pour des réunions, des interviews et des rassemblements. Seul leur plus jeune fils, Roy, âgé de 13 ans, vit encore à la maison. Sa sœur aînée, Mika, étudie à l’université.
« C’est très difficile de se battre pour son beau garçon et d’avoir une vie de famille normale », confie Alexander. « Nous sommes partout à la fois mais j’ai malgré tout toujours l’impression que ce n’est pas suffisant. »
Quand Alexander et son mari vont en Israël, ils s’appuient sur leur famille, à commencer par les parents de Yael et ses quatre frères et sœurs, dont trois vivent dans le même immeuble à Tel Aviv, à l’endroit-même où le père de Yael a vécu toute sa vie.
Varda Ben Baruch, la mère de Yael, est présente à tous les rassemblements sur la Place des Otages et souvent là lors des sit-in de Shift 101, avec son traditionnel fedora et son rouge à lèvres brillant, tenant bien haut l’affiche d’Edan.

« Je suis la matriarche de la famille », explique Ben Baruch depuis son salon, décoré des nombreuses sculptures en bronze qu’elle a réalisées au fil des ans, d’une impressionnante collection d’objets juifs en argent et de portraits d’Edan, qui a sa chambre dans l’appartement de ses grands-parents. « Je dois garder des forces pour tout le monde – mon mari, mes enfants, mes petits-enfants, Edan. »
Ben Baruch explique que son mari et elle ont été des sortes de « seconds parents » pour Edan lorsqu’il est venu faire son service militaire : ils ont lavé son linge et pansé ses coupures, soigné ses contusions pendant sa formation de base.
Elle se dit choquée que le gouvernement n’ait pas fait libérer les otages dans les jours suivant le 7 octobre.
« J’étais persuadée qu’au bout de cinq jours, le gouvernement nous ramènerait nos enfants », confie Ben Baruch. « La guerre n’a pas commencé tout de suite », rappelle-t-elle en faisant allusion à l’opération terrestre à Gaza.
« Je ne suis pas en colère », explique-t-elle. « Je demande et j’exige, parce que la colère ne sert à rien. C’est une insulte pour notre humanité d’avoir des otages là-bas. Il faut qu’ils pensent aux familles et aux otages. »
Sa fille, Yael, troisième d’une fratrie de cinq, se trouvait en Israël le 7 octobre 2023, lorsque le Hamas a attaqué les communautés et villes frontalières de Gaza. La famille avait prévu de venir en Israël tous les mois pendant le temps du service militaire d’Edan.
Edan était rentré chez lui, aux États-Unis, en août 2023, et une fois les grandes fêtes juives passées, Yael Alexander était venue en Israël passer une partie de Souccot avec Edan et le reste de sa famille, avant de retourner chez elle pour la fin des fêtes.

Elle lui a parlé à 7 heures du matin le 7 octobre, peu après le début de l’attaque du Hamas, et quelques minutes avant qu’il ne soit emmené en captivité par des terroristes du Hamas. Le reste des Alexander – Adi, Mika et Roy – l’a rejointe en Israël, et c’est le 12 octobre que la famille a découvert qu’Edan avait été pris en otage.
« Quand ils sont arrivés le 9 octobre, j’ai pleuré comme une petite fille », confie-t-elle. « Je n’avais pas de réponses parce que nous ne savions pas où se trouvait Edan. Je me souviens encore de ce moment, je n’avais jamais pleuré comme ça. Peut-être que je pleurerai comme ça quand je reverrai Edan. »
La famille a reçu plusieurs signes de vie d’Edan, de la part d’otages libérés en novembre 2023 qui l’avaient vu, menotté dans les tunnels. Il leur a dit qu’il était un soldat américano-israélien, un des otages a pu le prendre dans ses bras et lui a donné de l’eau à boire.
En novembre 2024, Alexander a été vu dans une vidéo de propagande du Hamas, le visage émacié et pâle, avec des cernes sous les yeux.

Yael Alexander était en Israël cette semaine-là, soucieuse d’être géographiquement proche d’Edan lors de sa fête américaine préférée, Thanksgiving.
Ce soldat américano-israélien est désormais le dernier otage américain connu enlevé par les terroristes du Hamas le 7 octobre et qui serait encore en vie.
Dans les premiers mois qui ont suivi le 7 octobre, il y avait huit ressortissants binationaux – américains et israéliens – et leurs proches avaient formé un groupe composé des Alexander, de Rachel Goldberg et Jon Polin, les parents de Hersh Goldberg-Polin, tué en captivité à la fin du mois d’août, d’Orna et Ronen Neutra, les parents d’Omer Neutra, un autre soldat dont on a finalement appris qu’il avait été tué le 7 octobre et son corps, emmené en captivité, d’Iris Weinstein Haggai, fille de Judy Weinstein Haggai, Américano-Canado-Israélienne tuée en même temps que son mari, Gadi Haggai, le 7 octobre et dont les corps avaient été emmenés en captivité et enfin de Ruby et Hagit Chen, les parents d’Itay Chen, soldat tué dont la dépouille avait été prise en otage.

Deux autres otages, Sagui Dekel-Chen, lui aussi israélo-américain, et Keith Siegel, Américain installé en Israël depuis des dizaines d’années, ont été libérés ces dernières semaines.
« C’est différent maintenant parce que le groupe est nettement plus réduit », confie Alexander. « Certains d’entre nous ont reçu des nouvelles épouvantables, pour d’autres cela s’est très bien terminé, mais c’est très difficile. Au début, presque tout le monde était en vie, et soudain, on se met à recevoir mauvaises nouvelles sur mauvaises nouvelles, les pires qui soient. »
La semaine dernière a apporté son lot de douleur lorsque les corps d’Oded Lifshitz, Shiri Bibas et ses deux petits garçons ont été rapatriés dans des cercueils, suivis de la diffusion d’une autre vidéo du Hamas avec deux otages – Evyatar David et Guy Gilboa-Dalal – contraints d’assister à la libération d’autres otages, samedi.
« C’est un jeu malsain, très malsain », affirme Alexander. « C’est la chose la plus cruelle qui soit. Il faut leur porter secours. J’espère que Trump aura vu cette vidéo. »
Pour l’instant, poursuit Alexander, ils attendent les décisions sur la deuxième phase de l’accord, en espérant que leur fils figure sur la liste.
Elle s’inquiète de ses conditions de détention horribles, dans les tunnels de Gaza, sachant qu’Edan est très probablement maintenu dans un état similaire à celui des autres otages, sans beaucoup d’air, dans ces tunnels, sans soleil, dans la saleté et sous la torture.
« Il faut qu’Edan reste fort », conclut-elle. « Je tiens à ce qu’il sache que nous venons sans arrêt pour être là, près de lui, et que nous serons là quand il sera libéré. »
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