Une société américano-israélienne vend des chiens pour 125 000 $ à des Juifs soucieux de leur sécurité
Israel Protection K9 dresse et place des chiens de type militaire auprès de familles juives inquiétées par l'antisémitisme aux États-Unis et en Europe
Daniel Cohen, conseiller scolaire juif à Los Angeles, cherchait à adopter un chien au moment du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas contre Israël en octobre 2023. Il était bouleversé par cet assaut. Quelques semaines plus tard, il a été encore plus ébranlé lorsqu’un homme s’était introduit dans une maison de son quartier et avait proféré des insultes à caractère antisémite.
Cohen s’est mis à chercher un chien de protection dressé en ligne, lorsqu’il a trouvé une entreprise nommée Israel Protection K9. Cette société l’a aidé à choisir un berger allemand de 40 kg nommé Zeus. Et en décembre 2023, il l’a rapporté à Los Angeles.
« C’est un gros chien. Il est magnifique. Et lorsque je me promène, personne ne vient m’embêter en présence d’un si gros chien », a déclaré Cohen.
Israel Protection K9 a déclaré avoir constaté une augmentation de la demande depuis le 7 octobre 2023, les Juifs cherchant à se protéger face à la montée de l’antisémitisme, malgré le coût élevé des chiens de type militaire. L’intérêt pour ces chiens s’inscrit dans le cadre d’une série de mesures que les Juifs de la Diaspora ont adoptées ces dernières années pour assurer leur sécurité.
L’entreprise, basée en dehors de Jérusalem, a commencé ses activités à temps partiel en janvier 2023. Elle a vendu environ cinq à dix chiens au cours de sa première année. Cette année, l’entreprise placera plus de vingt chiens chez des propriétaires, et en a actuellement quarante-cinq autres en cours de dressage. Cette augmentation intervient malgré un décalage entre les commandes et les livraisons, car il faut environ dix-huit mois pour former les chiens, a indiqué le cofondateur de l’entreprise, Eli Bobroff.
Tous les clients, à l’exception de deux ou trois, sont juifs, a déclaré Bobroff. Environ huit des chiens vendus se trouvent aux États-Unis, tandis que les autres sont en Europe et en Israël.
« Nous avons constaté une augmentation considérable, non pas en raison de notre marketing ou de quoi que ce soit de ce genre, mais simplement parce que des Juifs recherchent des mots-clés tels que ‘protection Israël’ ou ‘chiens de protection Israël’, et cherchent des options viables en matière de sécurité », a expliqué Bobroff.
La demande ayant augmenté, les prix ont suivi la même tendance. Les chiens se vendaient initialement autour de 30 000 dollars, mais se négocient désormais entre 75 000 et 125 000 dollars. Cohen a acheté Zeus pour 25 000 dollars, grâce à l’héritage de son père récemment décédé. Les chiens les plus chers ont un meilleur pedigree génétique et bénéficient d’un entraînement supplémentaire, comme la capacité à effectuer des recherches dans le périmètre du domicile. Parmi les Juifs aisés qui ont récemment contacté l’entreprise, on trouve un promoteur immobilier en Californie et un homme d’affaires qui dirige une société cotée en bourse, a indiqué Bobroff. Le prix est aligné sur celui d’une poignée d’autres entreprises offrant des services similaires dans d’autres pays.
Chiens de protection vs. chiens de garde
Originaire du sud de la Californie, Bobroff travaillait dans le secteur de la santé lorsqu’il a pris une année sabbatique en Israël à l’âge de 19 ans. Il n’avait jamais eu de chien, car sa mère était allergique. C’était la première fois qu’il vivait seul, c’est pourquoi il a commencé à chercher un chien. Attiré par le sensationnel, il pratique des activités telles que le parachutisme, ce qui l’a amené à s’intéresser à un type de chien « qui a du tempérament ». Ne pouvant pas se permettre d’acheter un chien de protection dressé, il a pris un berger allemand pour le dresser lui-même, et a commencé à contacter des dresseurs en Israël.

Il a été orienté vers le dresseur Arik Deri, un ancien combattant de l’unité d’élite du Corps du Génie Militaire Yahalom. Deri avait travaillé avec l’unité canine Oketz de l’armée israélienne, ce qui avait éveillé son intérêt pour les chiens de protection, et il s’était lancé dans le dressage après son service militaire. Deri dressait les chiens d’autres personnes à l’heure, mais tous deux se sont aperçus qu’ils pourraient gagner plus d’argent en élevant et en dressant eux-mêmes des chiens. Ils ont décidé de se lancer dans les affaires ensemble : Deri s’occuperait du dressage et Bobroff de la partie commerciale.
Lors de leur premier « essai », Deri a élevé deux chiens chez lui. L’intérêt s’est accru et ils ont développé l’entreprise, ce qui les a amenés tous les deux à quitter leur emploi pour se consacrer à plein temps à leur société.
Bobroff et Deri se sont rendus à l’étranger pour se procurer des chiens dans des pays comme l’Allemagne et les Pays-Bas et les élever eux-mêmes. La plupart sont des bergers allemands ou des malinois belges, la race préférée d’Oketz. L’entraînement commence lorsque les chiens ont quelques jours, l’équipe les exposant à différents environnements et diverses formes de contact. Les chiens sont familiarisés avec les enfants et les tout-petits afin qu’ils se sentent en sécurité au sein des familles. L’entreprise compte environ huit employés, a précisé Bobroff.
Les chiens de protection sont différents des chiens de garde. Les chiens de protection sont très obéissants, peuvent évaluer et répondre à différentes menaces et sont axés sur la protection des personnes. Les chiens de garde défendent la propriété, par exemple en aboyant contre des inconnus, et ont tendance à être plus grands et plus intimidants.
L’entreprise travaille avec les clients pour placer le chien le mieux adapté à leurs besoins, en tenant compte de facteurs tels que la convivialité avec les enfants et les autres animaux de compagnie du foyer. Lorsque le chien est dressé, le personnel le livre à son nouveau propriétaire et passe environ une semaine avec lui dans le cadre d’un « processus d’intégration », pour lui apprendre à s’occuper du chien et aborder des sujets tels que les ordres en hébreu, le langage corporel, la psychologie canine et la mise en pratique de scénarii de protection. Une fois le processus terminé, l’entreprise reste en contact avec les propriétaires.
Une recrudescence des mesures d’autodéfense
Les Juifs de la Diaspora ont pris différentes mesures de sécurité en raison de la montée de l’antisémitisme ces dernières années, comme s’initier au krav maga ou s’entraîner avec des groupes de sécurité communautaires pour protéger leurs synagogues. D’autres ont acquis des armes à feu, ce qui, selon les professionnels de la sécurité, présente des risques importants.
Mitch Silber, le responsable de l’Initiative de sécurité communautaire, qui coordonne la sécurité des communautés juives dans la région de New York, a déclaré ne pas connaître Israel Protection K9 ni avoir entendu parler de Juifs ayant fait l’acquisition de chiens de protection. Toutefois, cela s’inscrivait dans le cadre d’autres mesures de sécurité et était probablement plus sûr que les armes à feu.

« Il est certain que depuis le 7 octobre, nous avons vu beaucoup de Juifs acheter des armes à feu. Je pense que c’est juste une autre version du même phénomène, où les Juifs se sentent en insécurité et cherchent des moyens de se sentir plus en sécurité », a déclaré Silber.
« Avec une arme à feu, on craint que les enfants n’y aient accès et qu’ils se tirent dessus. Avec un chien, s’il est bien dressé, tant qu’ils savent qui sont les bonnes personnes, je pense que c’est plus sûr. »
Daniel, un homme d’affaires européen qui a refusé de donner son nom de famille pour des raisons de confidentialité, a déclaré qu’il s’inquiétait de plus en plus pour sa sécurité en raison de la flambée de l’antisémitisme en Europe. Des manifestations anti-Israël ont eu lieu dans sa ville natale et des vandales ont tagué des graffitis disant « Fuck Jews » et « Dirty Jew » sur son bureau.
Il ne voulait pas d’arme à feu et les lois restrictives sur le port d’armes l’empêchaient de toute façon de s’en procurer une. Son épouse et lui ont envisagé d’embaucher un chauffeur, mais il a admis avoir du mal à faire confiance aux employés. Il a toujours été un « amoureux des animaux », a-t-il souligné, et s’est donc mis à s’intéresser aux chiens de protection.
Il s’est dit que les dresseurs israéliens avaient plus d’expérience pratique en matière de sécurité que les entreprises européennes. Il a pris contact avec Israel Protection K9 et a fait l’acquisition le mois dernier d’un berger malinois nommé Aries qui l’accompagne désormais presque partout, y compris à son bureau.
« Tout le monde peut le toucher. Parfois, ma femme me dit : ‘Bon sang, il est trop amical. Il a l’air trop gentil.’ Mais c’est ce que je voulais. Je ne veux pas me prendre la tête », a déclaré Daniel.
Il y a quelques jours, Daniel se promenait avec Aries la nuit lorsqu’un homme s’est approché d’eux.
« Alors que nous avancions, je lui ai ordonné de monter la garde et il s’est littéralement dressé, en moins d’une seconde, et a regardé l’homme, puis a aboyé. Je l’ai immédiatement arrêté », a-t-il raconté.
« J’espère que d’autres chiens pourront aider des familles juives en Europe et aux États-Unis, car le monde est quelque peu bouleversé » a déclaré Daniel, ajoutant qu’Aries avait suscité l’intérêt de certains de ses proches. Quand il emmène Aries à l’école pour aller chercher ses enfants, tous ses camarades de classe jouent avec lui.
« Tout le monde est très curieux et surpris par mon choix, car quand on parle de sécurité, on ne pense pas à un chien », a-t-il indiqué. « Mais en voyant Aries et en voyant ce qu’il fait et comment il le fait, de nombreuses familles s’y intéressent davantage. »
Ce n’est pas « seulement » l’antisémitisme
L’antisémitisme est un facteur déterminant pour les nouveaux propriétaires. Mais ils recherchent également une protection contre la criminalité quotidienne et un lien avec Israël.
Cohen a expliqué qu’il y avait « beaucoup de drogués et de cinglés » dans son quartier, et qu’il avait par le passé adopté des pitbulls qu’il promenait la nuit et qui contribuaient à éloigner les gens mal intentionnés. Il avait lu des articles sur les chiens de protection pendant des années. Après la mort de son dernier chien, le massacre de plus de 1 200 personnes par le Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël et l’héritage qu’il avait reçu l’ont incité à en acheter un au lieu d’en adopter un.
« Si vous avez juste un gros pitbull, ces chiens sont gentils comme tout. Mais quand les choses se corsent, vont-ils vous protéger ? Difficile à dire », s’est-il interrogé.
Cohen, qui vit avec sa femme et leurs deux enfants âgés de huit et seize ans, a expliqué que Zeus les aidait à se sentir plus en sécurité et favorisait leur lien avec Israël. Il aime répondre à des questions sur Zeus et se réjouit de voir que ses enfants apprennent quelques mots d’hébreu en apprenant les ordres à donner à leur chien.
Zeus est dressé pour protéger lorsque Cohen donne l’ordre ‘shmor’, qui signifie ‘garde’ en hébreu.

« On parle d’une puissance énorme quand on donne l’ordre. Quand on passe de l’état où il halète, sourit et joue avec ses oreilles, à celui où vous prononcez le mot et où tout se déclenche. Quand vous dites ‘shmor’ et que vous donnez cet ordre, une puissance immense se dégage ; c’est en quelque sorte une expérience spirituelle. Je ne sais pas comment l’expliquer. »
Cohen joue à « va chercher » avec Zeus dans un parc et lui fait pratiquer l’obéissance pour qu’il reste toujours alerte. Par exemple, lorsque Cohen place la nourriture de Zeus à sa portée, il lui demande de se coucher au lieu de manger, afin que le chien reste attentif aux ordres spécifiques et ne se contente pas de réagir aux signaux verbaux attendus.
Le chien surveille les étrangers mais se comporte calmement avec les autres personnes, par exemple, en n’aboyant pas lorsque des visiteurs viennent à la maison. Cohen a raconté qu’il se trouvait avec Zeus sur le parking d’une école lorsque l’un des professeurs d’hébreu de sa fille s’est approché d’elle.
« Zeus le regardait de très près. Zeus m’a regardé, comme pour me dire : ‘C’est le moment ? Je fonce ?’ Mais je lui ai juste dit de se coucher et tout s’est bien passé. »
Il décrit Zeus comme un animal de compagnie plutôt que comme un chien de travail. La fille de Cohen aime attraper l’os de Zeus et courir dans la maison avec Zeus à ses trousses. Le chien tient également compagnie à son fils pendant qu’il joue aux jeux vidéo.
« En ce moment, il est probablement en train de regarder la télévision avec ma femme sur le canapé », a supposé Cohen.
« Je dirais que pour nous, il est plus un animal de compagnie. Un animal de compagnie qui, nous le savons, peut nous protéger quand nous en avons besoin, si jamais nous en avons besoin. »
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