Une synagogue sibérienne construite par des cantonistes rendue à la communauté
Le grand-rabbin de Russie a procédé à une cérémonie de passation de pouvoir sur l’une des rares synagogues en bois
TOMSK, Russie ( JTA) – Une synagogue en bois, construite en Sibérie en 1906 par des Juifs qui avaient été kidnappés et enrôlés dans l’armée du tsar, a été restituée à la communauté juive locale.
L’an dernier, la communauté juive de Tomsk a reçu le contrôle de la Synagogue des Soldats. La passation de pouvoir a officiellement pris effet jeudi, lors d’une cérémonie en présence de Berel Lazar, grand-rabbin de Russie.
La bâtisse avait été construite pas des vétérans de l’armée russe, notamment par des personnes qui avaient été enrôlées de force alors qu’ils étaient enfants, parfois dès l’âge de 8 ans. Connus sous le nom des cantonistes, ils étaient les victimes d’une politique appliquée entre 1827 et 1856, qui contraignait les communautés juives à remettre aux autorités 10 enfants de plus de 12 ans pour chaque millier de Juifs.
Les enfants étaient placés dans des résidences militaires et enrôlés pour 20 ans dès l’âge de 18 ans. En plus des 75 000 cantonistes juifs, la Russie tsariste comptait également 300 000 cantonistes non-juifs.
Mais les non-juifs étaient placés en résidence mlilitaire à l’âge de 17-18 ans. Selon Josef Mendelevitch, rabbin et auteur d’un livre sur les cantonistes publié en 2010, le fait d’y placer les enfants juifs dès l’âge de 12 ans visait à convertir les conscrits juifs au christianisme.
De nombreux non-Juifs souhaitent devenir cantonistes, parce qu’ils étaient alors nourris et logés gratuitement, mais pour les Juifs, « cela signifiait que leur monde s’écroulait parce qu’il était impossible de pratiquer le judaïsme et d’en observer les restrictions » au sein de l’armée, dit-il.
En 1721, les Juifs ont été exemptés de remettre leurs fils à l’armée, quand les premiers cantonistes s’enrôlaient, et ce jusqu’en 1827. L’exemption s’est appliquée à nouveau en 1856.
De nombreux cantonistes juifs ont été convertis au christianisme, mais certains, dont les fondateurs de la synagogue Tomsk, ont résisté à la pression exercée par leurs commandants, a expliqué Mendelevitch.
Les autorités communistes avaient confisqué l’immeuble de deux étages en 1930, et en ont fait des bureaux de la mairie, puis un complexe d’appartements. En 2013, la ville a accepté de restituer la synagogue à la communauté juive locale, qui compte près d’un millier de personnes, selon Levi Kaminetsky, grand-rabbin de la Tomsk et émissaire du mouvement Habad dans la région.
La municipalité a trouvé des logements alternatifs pour les locataires des appartements et a scellé l’immeuble, car il présente actuellement des dangers. En effet, son infrastructure et ses fondations nécessitent de sérieuses réparations.
La communauté s’attelle à construire un centre communautaire juive adjacent à la seule synagogue en activité. « Pour être honnête, cela va être difficile de rénover et rouvrir la Synagogue des Soldats, mais nous avons le devoir de nous en occuper dès que possible, pour en préserver l’héritage », a déclaré Kaminestsky.